Justicizms, c'est pas exactement comme le précédent Just-Ice. Là, le MC est moins harcelé par le beat robocopien, qui est devenu totalement rectiligne. D'où la boule en moins de ma note : Mantronix ne sont plus là et il en résulte que ce second a un peu moins bien vieilli que le premier même si ça reste plus puissant qu'un paquet de trucs mythiques de l'époque. Parce qu'en fait l'instru, Just-Ice la domine maintenant - grâce à une casquette beaucoup plus odieuse qui en impose, soyons-en certains (et les clips associés m'en soient témoins) - ou plutôt : il s'y glisse. On passe de Mantronix à Manix, s'tu veux... Enfin, à KRS-One, surtout, que je comparerais pas à une capote quand même, bien qu'il protège depuis longtemps le hip-hop des virus-mc's de tout bord. Criminal Minded était encore chaud et La Rock venait de se faire plomber (RIP), et alors le KRS encore sous le choc et en deuil se noyait dans l'alcool, mais surtout dans la conception de beats d'une verticalité inhumaine pour son pote Just-Ice, sans parler de réverbs exagéres, et sans se soucier de considérations telles que la beauté ou l'ambiance. Juste géométriquement industriel et un chouia funky - ce qui empêche pas des expérimentations d'apprenti-chimiste, donc potentiellement létales (comme le faux public qu'il sample et transforme en une sorte de grosse mouette maniaque, sur le titre épo, avec cet ajout de samples de show TV déformés bien flippant, ou sur "Booga Bandit Bitch" avec ses bruits de flotte parasitant le beat). Echos démultipliés du flow, froideur de container - Just-Ice crache ses skills dans cette chambre d'écho comme un maître de l'Atome hip-hop. Flow d'assassin, réellement, pas aussi carré qu'on le croirait à première vue, réellement barré, ODB et Busta sont aussi un peu ses rejetons. Pour ce qui est de la présence vocale en back-up, KRS fait le gros nounours jovial à côté (et nous invite à boire une Guinness, aussi) mais ça suffit pas à détendre, vraiment... n'empêche qu'il lâche du gros verse à l'occase, ne serait-ce que sur le mythique "Moshitup" (origine de "suicide it's a suicide", mais si, vous savez, cette punchline obsédante que vous avez entendu ici et là chez la horde de MC-rejetons-relayeurs ! - ben elle est de tonton KRS, et vous savez quoi ? Il lâchait pas de la punchline pour faire joli mais il était en mode "prosélyte musulman" et essayait de vous convertir aux préceptes du manger halal, sérieux comme Samuel L.Jackson à la fin de Pulp Fiction quand il sermone Travolta ("Pigs are filthy animals, I don't eat filthy animals !") parce que c'est manger du cochon le "suicide"...ahahah sacré KRS, par respect je lâche le sauciflard ficelle que j'étais en train de croquer, obligé !). "The Gangster Of Hip-Hop", titre tout aussi culte, en est le bon exemple : passé le déroulé d'insultes, la coolitude absolue - juste un gros beat qui crève les basses et du beatbox beurré de reverb en appui. Just-Ice y dépose tout le monde sur des raggas de mangeur d'homme. La vraie puissance du flow de daron, et c'est valable pour tous les MC's des années 80, c'est vraiment de s'imposer sans besoin de mélodie ou d'instru envoûtante, sur du beat dénudé à l'os. Skeud monomaniaque à mort, à une idée. Tous les rappeurs ou presque ont toujours aimer parler de leur technique et de leurs parties génitales jusqu'à s'auto-transcender, mais Just-Ice lui rappait tellement gonflé à bloc par son auto-kiff que c'est comme s'il bandait du corps tout entier. Eh ouais, c'est du gros rap new school post-DMC : c'est dur, c'est froid, c'est pas du tout soul ni souple, et ça te cogne à l'ancienne avec des collages sonores dégueulasses comme de très gros stickers collés de travers. Seul les vrais savent. Les autres iront chier dans leur bac en se réfugiant dans la chaleur urbaine des années 90 comme de pauvres petits roudoudous tout mous. Ici, on est chez les Tontons : c'est du brutal... mais faut avouer, y a comme un ptit goût de pomme !