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Ture Rangström (1884-1947) › Symphonie n°3 en ré bémol majeur "Sang under stjärnorna"

  • 1996 • CPO CPO 999 369-2 • 1 CD

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cyprine      vendredi 30 mai 2014 - 10:09

cd • 1 titre • 55:08 min

  • Symphonie n°3 en ré bémol majeur "Sang under stjärnorna" (1929) | 22:00
  • 1Maestoso22:00
  • Symphonie n°4 "Invocatio" | 32:35

informations

Enregistré en aout 1995 au Konzerthaus "Louis de Geer", Norrköping.

line up

Norrköping Symphony Orchestra; Michail Jurowski (direction)

chronique

"Sang under stjärnorna" est un rêve. Une fantasmagorie sauvage et étincelante, une succession farouche d'effets cosmiques et de scènes irréelles, d'épanouissements sonores saisissants brusqués de rythmes de fanfares, de révélations harmoniques inoubliables, et de longues plages léthargiques, où l'esprit part à la dérive, solitaire et perdu, à la surface d'une eau noire parsemée de l'éclat capricieux des étoiles. "Un voyage de nuit, en mer, à la fois doux et transcendantal" : Rangström, grand admirateur de Debussy, livre ici son oeuvre la plus ouvertement impressionniste. 22 minutes d'acoustique scintillante et de contrastes fabuleux, d'harmonies astrales, d'agitations puissantes perlées de mille détails, et d'accalmies profondes, suspendues à la nuit par des fils d'or de hautbois et de flûtes, parcourues par la brise légère et froide d'un violon solitaire. Atmosphères proprement narcotiques d'une profondeur inouïe, hallucinogènes; une partition qui nous projette d'abord dans le tumulte sublime d'une mer en plein délire, dont les soulèvements monstrueux de vagues protéiformes nous secouent sans relâche, nous enivre à l'excès jusqu'à nous rendre fou, pour nous laisser ensuite, éreinté et fébrile en proie au bord du monde... errance hypnagogique dans le silence nocturne de la mer infinie. Formidable mosaïque d'une multitude de motifs mélodiques étranges, notes en boucles, tourbillons, serpents d'eau, des flots de cordes grondantes qui s'écrasent les unes contre les autres dans le fracas des cymbales, "Le chant sous les étoiles" élève le brusque et le soudain au rang de systèmes oniriques souverains. Évocation fantasque d'une eau sombre et tranquille, qui s'étend à perte de vue sous des lueurs évanescentes sillonnant les ténèbres, il fait du moindre son une substance psychotrope... Rangström le roi sorcier, le symphoniste des ciels immensurables, gonflés d'asperatus. Les lenteurs brucknériennes les plus dévastatrices, l'ombre de Stravinski dans ces mouvements moteurs, ces machines dynamiques pulsatoires et jouissives qui propulsent les ressacs en lames de fond puissantes et en surface desquelles les mélodies véloces et les prouesses timbrales sont l'écume et le sel, l'attaque versicolore des embruns déchaînés. Mais la fureur n'est rien; la folie, un décor. Car "Sang under stjärnorna", oui, est un rêve, et la substance première en est l'émerveillement. Et toujours chez Rangström, les visions et les songes s'accompagnent de ténèbres, l'obscurité habite, sévère et malveillante, l'essence des harmonies. Au coeur de cette partition veille le plus hostile, le plus maléfique des instants ralentis que le terrible suédois ait jamais conçu... vaste zone de silence et de noir absolu, hantée des ombres glauques de cors mornes et luisants, territoire de la mort, qu'un accord d'épouvante sous le ciel invisible suffit à faire régner. C'est là, perdu dans un néant dont les menaces intenses semblent si ancestrales qu'elles ne nous voient même pas, que l'on assiste, totalement pétrifié, à la levée d'accords la plus effroyable et sublime que l'esprit puisse subir; une lente envolée de voiles de cordes spectrales, succession ascendantes d'harmonies chtoniennes à la luminosité glaciale, de densités tremblantes qui s'accumulent en une masse de tension paroxysmique, et s'en vont survoler un paysage immense de cuivres qui se lamentent, balancier de vagues noires aux convulsions sardoniques, traînant leur cruauté, leurs larmes et leur misère... une désolation telle qu'elle en a englouti toute forme de pitié. On les quitte sous la lune, poussé au ralenti sur des murmures changeants de cordes sombres, survolés de nitescences furtives de violons ou de flûtes, le visage rafraîchi par la caresse de formes mélodiques mystérieuses, volatiles comme des courants d'air. "Quiconque s'est déjà trouvé sur une coquille de noix, sous les étoiles éternelles au milieu de l'océan, sait de quoi parle la chanson du marin"... Rangström conte l'errance de l'esprit, les pensées qui s'égarent et se perdent dans l'obscurité vaste et coruscante, se dispersent, comme les reflets fugitifs des étoiles courant sur l'onde marine. L'inquiétude, lourde, profonde, la splendeur du ciel et de la mer dont la nuit confond les limites, mêlent les ombres et les mouvements, l'extase incoercible du solitaire perdu dont les yeux aux aguets surprennent mille lueurs secrètes... des notes phosphorescentes, des sons qui s'évanouissent, des grondements imperceptibles... des esprits rythmiques et mélodieux qui dansent à la surface de l'eau, des fantômes vibratiles... des timbales au loin... très loin, à l'autre bout du monde. Un rêve, vous dis-je, et qui mérite bien mieux que ma trop lourde prose. Il mérite vos oreilles, votre esprit et vos sens. Les mots ne peuvent pas tout dire... et c'est bien pour cela que Rangström a choisi la musique.

note       Publiée le lundi 3 février 2014

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