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Skip James › Today !

  • 1965 • Vanguard VSD 79219 • 1 LP 33 tours
  • 1965 • Vanguard VRS-9219 (album mono) • 1 LP 33 tours
  • 1967 • Vanguard SVRL19001 • 1 LP 33 tours
  • 1988 • Vanguard VMD 79219 • 1 CD
  • 2006 • Vanguard VSD 79219 • 1 LP 33 tours
  • 2011 • Vanguard VRS-9219 (album mono) • 1 LP 33 tours

cd1 • 12 titres • 46:48 min

  • 1Hard Time Killing Floor Blues3:21
  • 2Crow Jane2:57
  • 3Washington D.C. Hospital Center Blues4:10
  • 4Special Rider Blues5:08
  • 5Drunken Spree2:47
  • 6Cherryball4:24
  • 7How Long2:55
  • 8All Night Long5:00
  • 9Cypress Grove4:18
  • 10Look Down The Road3:14
  • 11My Gal6:05
  • 12I’m So Glad1:54

informations

Non crédité.

line up

Skip James (voix, guitare, piano), Contrebasse non créditée sur 7

chronique

Skip James revient. De nulle part. Souffrant, plus sec et revêche que jamais. Un cancer, à vrai dire, ça ne vous arrange pas une gueule de jeune premier. Redécouvert, exposé à nouveau, trente ans passés après sa première séance d’enregistrement – et probablement la seule jusqu’alors. Exhumé par de jeunes cons d’Anglais en fanfreluches à qui celui-là n’aurait même pas fait l’aumône d’un regard – le groupe Cream (Eric Clapton, Jack Bruce et Ginger Baker) sortira l’année d’après son premier album, où figurera une reprise enjouée de son I’m So Glad déjà gravé, donc, en 1931. (Enjouée… Enjouer du Skip James… O Tempora, du-t-il se dire…). Jackpot, alors. Mais déjà, le présent disque est pensé pour payer l’hôpital. Ce qu’il fera. Avant de financer, à la fin, les frais de l’enterrement. L’œuvre d’un homme atteint, alors, l’improbable survie comme seule mire… Sauf que. Sauf que la force de Skip James était depuis toujours l’immobile, le geste exact au point d’effrayer, l’économie suprême. Et qu’ici – où pour la première fois on l’entend avec un son techniquement correct, sur disque – l’homme n’a rien perdu de ses moyens de jeu, de sa puissance d’hypnose tranquille, fascinante. Tout au plus quelques plages – le très inquiétant Hard Time Killing Floor Blues, pour commencer, en ouverture – semblent-elles ralentir le pas, à se ressouvenir des versions d’antan. Mais c’est une ruse, encore – cet homme est ruse sournoise, autant que foi en son art. Car cette lenteur leur va si bien, pour commencer, qu’on en frissonne cette fois encore, parcouru de leur onde. Et puis aussi : parce qu’aux plages d’après – aux inédites d’alors, singulièrement – les doigts de l’homme s’emballent encore. Plus agiles, même. Plus lisibles les lignes d’arpèges en curieux accordages. Et ce timbre singulier, toujours – pas changé vraiment, pas élimé, sa diction plus posée encore, seulement, si c’était possible ; plus froide, oui, l’incandescence (ce type là n’en est pas à un impossible près) – nous avertit par dessus, à travers… Toujours la prenante, l’inéluctable protestation de mortalité, les rappels fatalistes. Le plus étrange – le plus effroyable – c’est que la manière de ce type, le détachement avec quoi nous sont portés les sournois constats et saisissantes prophéties ordinaires ne semblent aucunement affectés par la condition du musicien. Ni plus ni moins d’ironie, là, quand il annonce "Jeanne Corbeau, tu mourras" – il s’agit au fait, au fil des couplets, d’une menace précise de meurtre – que trente quatre ans plus tôt, lorsqu’il chantait que le Diable tenait sa femme. Toujours, à la place, ce même inexplicable froid, inquiétant, captivant. La même minérale indifférence, inchangée par cette mort qui maintenant rôde dans la chair même de celui qui la prédit, l’annonce. Toujours pas de compassion. Toujours pas trace non plus – c’est peut-être le pire – de malveillance prise en passion. L’inéluctable, à la place, toujours, comme avant. Skip James nous lâche une fois de plus, sans sourciller, en tout naturel : toute résistance est inutile… Pourtant, à trois plage de la fin, un basculement curieux se produit. La voix du chanteur semble descendre de quelques tons. Et un essoufflement, soudain, semble s’en emparer. Il y a trace de lutte. Une vie – extraordinairement fragile, par comparaison – semble à cet instant l’habiter… Et si, au fond, ce frémissement de panique latente qu’il nous instillait depuis le début, n’avait été qu’avertissement – certes – mais de fuir l’Ombre, enfin, sachant pourtant qu’au bout, elle nous rattraperait toujours. Mais voilà qu’ayant regardé la route descendante, Skip James recommence à parler de dessouder sa compagne. Une fatigue semble poindre, pourtant, et presque une tendresse, avec. Illusion ? … C’est, qui suit et conclut, une de fois de plus : I’m So Glad. Version brillante, cristalline, lisible presque jusqu’au point douloureux. Le falsetto filant à son allure inaltérable. C’est la plus courte plage. A quatre ans de là, Skip James serait mis en terre. Cinq décennies plus tard, rien ne nous arrive de lui qui serait affaibli.

note       Publiée le vendredi 10 janvier 2014

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