Bohémien › Bohémien

Malgré la sobriété de son nom, ce dernier album des Italiens de Bohémien est ambitieux: digipack, photos en costumes 'Belle Epoque', un magnifique clip réalisé pour 'Un altro Sabato ancora', un thème décliné en trois actes où semblent dominer les sujets du temps qui passe, la folie et le monde médical, l'art et le sublime, la frontière tenue entre spiritualité et démence...'Un altro Sabato ancora'...Toute la mélancolie dont est capable le combo...Tempi mi-lents, claviers en deuil, le chant si touchant de Alessandro Buccini...La suite se dévoile plus dure, du deathrock bien grinçant et torturé que pimentent quelques magnifiques intro ou passages au clavier et à l'orgue. 'Et nous allons nous promener comme dans une tombe ouverte', nous avertissent les musiciens; l'ombre du défunt Walter Vincenti, ami perdu à jamais, baigne l'album de bout et bout et c'est par une femme qu'il a désormais été remplacé derrières les fûts comme si la pudeur et les liens de l'amitié interdisaient à tout autre homme de le remplacer. Les cinq chansons de l'Acte I se profilent toutes dans cette atmosphère torturée mais jouissive. Les quatre du second témoignent d'une tristesse accrue tel un voile de cendres se posant sur un tableau de maître; hommage à la beauté, la quête de l'absolu et les questions en découlent. Faut-il rechercher le sublime à l'intérieur ou à l'extérieur de soi-même ? Une intensité émotionnelle presque dangereuse frisant la folie laquelle se profile clairement au travers des titres du dernier volet. Alors que l'inspiration semblait fléchir, les instrumentaux se succéder, Bohémien nous file un sacré coup de fouet avec 'Attacca psichica' qui renoue avec le ton torturé du début du disque mêlé de pointes terriblement mélancoliques avec pour point d'orgue l'ultime pièce, le splendide et émouvant 'Petruska' qui annihile dans la beauté funèbre toute forme d'espoir terrestre. Le jeu de clavier, le sens de la mélodie et le chant font mouche à nouveau. Alessandro n'est pas un chanteur excellant dans la technique mais son instinct et sa sincérité dans l'émotion lui permettent de moduler ses intonations d'une manière proprement déchirante par moment, en parfaite adéquation avec les textes. Tragique, dur mais intense et beau.