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Joe Hisaishi › Kids Return

cd • 15 titres • 39:47 min

  • 1Meet Again05:00
  • 2Graduation01:05
  • 3Angel Doll02:19
  • 4Alone01:13
  • 5As A Rival01:27
  • 6Promise... For Us05:06
  • 7Next Round01:27
  • 8Destiny03:30
  • 9I Don't Care02:17
  • 10High Spirits02:01
  • 11Defeat02:27
  • 12Break Down03:44
  • 13No Way Out02:49
  • 14The Day After00:41
  • 15Kids Return04:41

informations

Produit par Joe Hisaishi.

chronique

  • mélodies mortelles de la jeunesse

Ces deux-là foncent droit dans le mur, avec cette énergie et cette insouciance inébranlable propre à la jeunesse. Deux petits branleurs, l'un en rouge, l'autre en bleu, qui pensent avoir trouvé enfin une voie et qui se jettent à corps perdu en avant, au pas de course. Quand à la fin du film, après avoir goûté à l'amertume de l'échec, l'un deux dira "Ca n'a même pas encore commencé pour nous !", pas sûr que Takeshi Kitano soit aussi optimiste. L'insouciance, même après s'être crashé. Kitano en est revenu lui, de son crash à moto, le visage à moitié paralysé, pris de tics nerveux sur son nouveau demi-masque de No. Il ne se montrera pas cette fois-ci, mais parlera de lui comme jamais. Avec pudeur toujours, plaçant les deux apprentis comiques de manzaï, ceux qui réussiront comme lui l'a fait, en arrière plan pour se consacrer aux jeunes désoeuvrés, entre blagues potaches de mauvais goût et petits délits. Leur énergie volatile tout comme le virage irrémédiable vers la catastrophe, cette mélancolie et cette tristesse qui affleure, Joe Hisaishi se doit de l'accompagner dans un thème magnifique, peut-être un de ses plus beaux. Si il ne met pas de côté son goût pour la musique minimaliste et les répétitions incessantes de ritournelles qui se superposent telles une multitude de petits moulins en papier pris dans le vent, il va composer pour Kitano sa partition la plus dynamique, la plus enlevée, la plus rock, utilisant pour la première fois la guitare électrique ainsi que des glissements rythmiques évoquant parfois de loin le hip-hop. Retravaillant ce thème principal selon les scènes, il accompagne tel les sublimes travellings du réalisateur les deux jeunes sur leurs voies qui aboutiront au fond du garage. Mais ça, ils ne le savent pas encore et le thème de Kids Return déborde de volonté juvénile, de soif de conquérir, de bouffer le monde, une musique parfaite pour les entrainements de boxe, pour faire dérouler le bitume toujours plus vite sous ses pas, pour pédaler vers un avenir forcément prometteur. Et malgré tout, il contient aussi en lui dès qu'il ralenti cette inquiétude, ce blues tenace et adolescent devant tout ce qu'il reste à accomplir. Et la solitude quand les routes se séparent, bifurquent, Hisaishi la sussure au piano en solitaire, forcément. Car le combat qui s'annonce est rude, digne des anciens samouraïs, boxeur pour l'un, yakuza pour l'autre, leur destinée s'inscrit dans un Japon moderne impitoyable qui broie même ceux qui veulent suivre un chemin plus droit, plus traditionnel, plus conventionnel. Au-delà de ce thème principal, Hisaishi use de percussions et de sonorités synthétiques très japonaises, à la fois rassurantes et porteuses d'inquiétude, sur des morceaux où il est facile de se laisser hypnotiser, se laisser porter, se laisser faire, comme jadis d'autres surfeurs sur les eaux. Mélodies presque guillerettes et sautillantes aussi quand la jeunesse, avec ce qu'elle a de légère inconscience, ne voit pas venir l'inévitable quand on emprunte une courbe un peu traître. Qu'importe, on verra plus tard, et la partition de Hisaishi relance la machine à courir, à grimper les échelons et advienne que pourra. Ce leitmotiv du thème principal n'est annonciateur que d'une gloriole bien éphémère et laisse sa place à des grandes orgues lugubres, presque mortuaires. Quand la vie te file des uppercuts, c'est comme sur le ring, ça ne pardonne pas. Un coup de sabre non plus. A trop foncer en prenant les raccourcis on se brûle et on s'écrase. A trop en faire aussi, c'est pour cela que Hisaishi, même si il signe là sa bande-originale la plus emphatique pour Kitano, ne se laisse jamais détourner de sa ligne claire. Même quand la menace gronde, il suffit de peu pour faire sonner le glas, quelques synthétiseurs sourds, en mode mineur, quelques nappes qui planent avec tristesse comme le brouillard sur les routes où les taxis qui roulent trop longtemps finissent dans le décor, à chaque fois. Les rythmiques perdent de leur vitalité, les notes de piano s'écrasent comme de grosses gouttes de pluie, et enfin la mélodie des gamins revient, déprimée, abattue, à terre, KO. Elle laisse un temps la place à celle qui serrait le coeur au sortir du lycée, celle d'avant de mordre la poussière, dont la tristesse n'est qu'amplifiée par le chemin parcouru, qui ne les a amené nul part. Les mêmes, un peu plus vieux, avec des blessures aux corps et aux coeurs. Un peu plus vieux mais toujours jeunes et malgré tout, malgré l'amertume, malgré les leçons qu'on souhaiterait ne pas avoir appris, encore insouciants, prêts à repartir pour un prochain round, dès la détonation du starter ou les coups de feux des yakouzes. Ou bien du moins ils essaieront de s'en convaincre. Ils auront pour les emporter ce morceau de Joe Hisaishi, Kids Return, la tête baissée, vers l'avenir, parce qu'il n'y a rien d'autre à faire. Et tant pis si c'est pour finir dans un autre mur. En attendant, ils ont survécu, comme Kitano.

note       Publiée le dimanche 17 novembre 2013

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Note moyenne        4 votes

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(N°6) Envoyez un message privé à(N°6)
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Bien vu ça !

Soup Envoyez un message privé àSoup

Un petit truc rigolo que je viens de percuter : l'intro du thème principal, le dernier morceau du disque, celui avec la giga patate, s'avère en fait être 'nze-nze-nze' le chant des pygmées aka ci même chroniqués. Un petit lien improbable :-)

NevrOp4th Envoyez un message privé àNevrOp4th

Le film est vraiment bien comme on à l'habitude avec Takashi Kitano. Il est émouvant. Une belle peinture de la jeunesse japonaise.

Note donnée au disque :       
saïmone Envoyez un message privé àsaïmone
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Super chro

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