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Momus › The Ultraconformist

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cyprine      samedi 16 novembre 2013 - 10:26

cd • 10 titres • 41:09 min

  • 1Sinister Themes02:23
  • 2Last of the Window Cleaners03:46
  • 3The Ladies Understand03:18
  • 4Cape and Stick Gang04:38
  • 5The Ultraconformist04:44
  • 6Mother-In-Law05:11
  • 7La Catrina04:08
  • 8The Cheque's in the Post06:34
  • 9Spy on the Moon03:24
  • 10Forests03:03

informations

Enregistré par Doug Martin de Spike Studio (enregistré live à The Cave of the Golden Calf, Heddon Street, London probablement aux alentours de Décembre 1910).

line up

Nick Currie

chronique

  • cabaret synthétique

The Cave of the Golden Calf. Je croyais que ce club avait fermé à l'aube de la première guerre mondiale. La petite porte donnant sur Heddon Street, la même rue qu'on voit sur la pochette de Ziggy Stardust, m'y a pourtant mené tout droit, ou plutôt de travers, après quelques pintes et un temps indéterminé de déambulations dans le fog. Une ambiance du genre pas nette mais assez ouvertement homoérotique pour que je trouve ce lieu sacrément gay. Et un drôle de chanteur sur la scène, une silhouette longiligne et tendue, un blondinet au visage d'ange disgracieux. Il annonce d'emblée que ses chansons seront pleines de thématiques sinistres. Il semble sarcastique mais sait conter les histoires, comme celle du dernier des laveurs de vitre. Il en fait un drame criminel et mafieux plein de satire sociale et de formules grinçantes, le tout enroulé dans un registre de cabaret au refrain pop qui me reste en tête, malgré l'alcool qui me la faisait déjà bien tourner depuis la sortie du pub. Le type est un peu inquiétant, il bouge de façon grotesque et comique sur ces musiques de début de siècle, piano-bar de peu et accordéon à moitié réaliste seulement; il incarne un horrible maquereau tout en grimaces en entonnant "The ladies understand, I'm their favourite, they love me, I treat them like sh…." comme une chanson à boire. Les applaudissements de la foule me résonnent dans la caboche, je ne vois que des silhouette dans la fumée alors que se font entendre des sonorités plus modernes de boite à rythme crachotante et de synthés bourdonnants, le chanteur semble rapper les exploits violents et salaces d'un gang de rue portant fièrement capes et batons, tel Alex et ses droogies version gay as fuck, vénérants l'image de l'actrice et starfuckeuse Lillie Langtry, les Brigades du Tigres sont demandées en renfort. Tiens, maintenant la mélodie fait des boucles, une valse en tangage, aux relents mécaniques d'arrière-cour, et le chanteur ricane presque alors qu'il commence sa nouvelle chanson par "I try to be normal, really I do". On en sort pas, c'est la gayté lyrique, impossible de savoir si ce type se fout de notre gueule "If it paid to be straight, God knows I'd be straight" ou si il est réellement tourmenté par sa condition "If I could get it on, with a sweet little blonde, I swear I would give it a try". Le ton est plus absurde que jamais alors que tombe le refrain "I'm an ultraconformist, I walk through the week with my tongue in my pocket, my hand in my cheek.", qu'il teinte pourtant d'une vraie mélancolie "I'd let out a cry, as loud as the sky, if you could as an ordinary guy". Et quand le mécanisme de la mélodie redémarre après s'être grippée, le drôle de chanteur repart dans une glossolalie d'ivrogne. Au fur et à mesure que le morceau se déroule je ne vois plus que lui dans la pénombre du cabaret, fasciné par le génie en action, mais qui est donc cet étrange personnage ? Un insaisissable en tout cas, du long récit du très sinistre "Mother-In-Law" je ne déchiffre que quelques éléments, surréalistes et dramatiques, d'un humour noir et froid comme le mégot de ma clope oubliée depuis longtemps sur le bord du cendrier. Reste que je frissonne doucement dans le club pourtant étouffant quand résonnent ces derniers mots, la dernière punchline "The devil is the mother of my wife.". Les maquereaux, les criminels, les invertis, le Diable, et maintenant la Camarde elle-même convoquée sous la forme de La Catrina, femme-squelette immigrée du Mexique vers la vieille Angleterre et revenue d'entre les morts sans jamais avoir été vivante pour délivrer un message aux jeunes filles en chair. Le chanteur aurait-il oublié son cynisme ? La chanson, thème morbide excepté, est simplement magnifique et paradoxalement lumineuse, alors que la morte exhorte les vivantes à danser leur vie "Don't wait 'til you've become what I've become, don't wait 'til you're as dead as I am. Dance now while you still can.", en esquissant un pas de deux, sur les os. Et sur des arpèges synthétiques et des pulsasions minimales, le chanteur bizarre maintenant gagné par une gravité inattendue achève son auditoire fasciné par une longue lettre tragique, oscillant sans cesse entre cynisme misogyne et tendresse sincère et désolée, "The Cheque's in the Post". Inventaire post-rupture ou combien pour dédommager la femme qu'il a mal aimé de toutes les saloperies qu'il lui a infligé, des plus quotidiennes et vénielles (se plaindre d'un retard, les remarques sur son poids, les regards sur d'autres femmes plus jeunes), aux plus basses (faire passer des photos d'elle à poil à ses amis, raconter leurs expériences sexuelles dans ses chansons), pour en arriver au point d'orgue, où pour ses péchés les plus graves (ne pas lui avoir fait d'enfant, ne plus avoir eu de désir pour elle) il ne lui donnera rien. Comble de la morgue ou réel aveu d'impuissance devant des actes et des manquement tellement blessants que rien ne pourrait constituer réparation ? Les deux se tissent dans cette interprétation ambigue où une sensibilité fragile se dissimule sous une grimace qui finit par tomber lorsque, alors qu'il se dit acquitté de sa dette et prêt à en contracter une nouvelle auprès d'une autre fille, il en appelle à Marie pour son salut, dans un chant de prière tout en fausse insouciance. La cruauté et l'ambivalence de l'amour synthétisée en quelques minutes, le public peut bien applaudir. Je reste abasourdi sur mon mauvais tabouret, prêtant à peine attention au sautillant dernier morceau, le chanteur y parle d'un espion sur la Lune qui assiste de loin à nos tourments et nos peurs, et voici que me revient en tête le souvenir d'un drôle d'écossais qui chantait que les anges étaient des voyeurs. Il est trop tard quand se referme le rideau et que semble se vider le club au son d'un piano lugubre accompagnée d'un bruit de vieux projecteur. Impression de malaise. Je me lève en titubant. Trop de fumée, mais le lieu paraît étrangement vide malgré ces cris et ces craquements qui me collent des frissons. Tout était faux. Les applaudissements du public. Le petit orchestre. Même l'accent exagérément cockney du chanteur était faux. Témoignage apocryphe d'un récital qui n'a jamais eu lieu, quelque part dans un petit music-hall londonien au début du 20eme siècle. Et pourtant, j'aurais juré avoir entraperçu une silhouette bien réelle sur la scène...

note       Publiée le samedi 12 octobre 2013

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