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Philippe Poirier › Qui donne les coups

  • 1998 • EMI records 7243 4 95533 2 3 • 1 CD digipack

cd • 14 titres • 40:44 min

  • 1Mon amie raffole03:35
  • 22149 dorsoduro02:00
  • 3Sans sentiment04:35
  • 4Chant ancien02:16
  • 5Totas's Tongue02:13
  • 6Qui donne les coups04:36
  • 7Vu d'en bas02:19
  • 8Tout semblait immobile04:22
  • 9Aller-retour01:00
  • 10Le transi02:15
  • 11Sentire01:59
  • 12Au milieu02:34
  • 13Les bords02:45
  • 14Pour le cheval03:59

informations

Enregistré à La Petite-Lièpvre, Juillet 1997. Réalisé par Luc Tytgat et Phillipe Poirier (avec Arnaud Rebotini pour 1, 3, 6)

Dessins : Phillipe Poirier

line up

Philippe Poirier

Musiciens additionnels : Pascal Benoit (percussions 1, 4, 6, 8), Marco de Oliveira (programmation des samples 10), Yves Dormoy (sax tenor 1, clarinette basse 5), Arnaud Rebotini (programmation 1, 3, 4, 6), Salvatore Puglia (chant 2, 5), Luc Tygtat (programmation 3, 4)

chronique

Philippe Poirier n'est pas qu'une des têtes pensantes de Kat Onoma. Il est aussi, entre autre, illustrateur de livres pour enfants. A l'écoute de son premier essai en solo, voilà une révélation qui n'est pas étonnante. Son touché est celui d'un dessinateur précis, usant des mots comme de teintes, de lignes, et des instruments comme des rayons de lumière. Celle qui s'insinue partout, entre les feuilles de l'arbres d'où le chanteur félidé observe le corps d'une fille auprès duquel il rêve de se lover, celle qui filtre à travers les nuages de poussière volcanique suspendue dans les airs augurant d'une immense catastrophe immobile et silencieuse, celle qui encore dessine des tracés rectilignes de soleil d'été encadrant la jambe du narrateur d'un instant posé là, au coeur d'une composition qu'il détaille avec force paresse. Les chansons de Poirier, pour peu qu'il se frotte vraiment à ce format, trois ou quatre fois ici, tiennent à peine du chant, à la limite de la description, du sprecht-gesang pour tout dire, des mots qui ne poétisent pas, des mots qui dessinent, qui assemblent des bouts de portraits de bouts de corps de bouts d'êtres, désirés dans l'ombre ou voués à des huées. Même quand il évoque la danse, c'est son amie qui en raffole, et Poirier lui se plaît lui à la raconter, la danse passée au filtre du discours des mots qui bougent juste assez pour évoquer de biais, de l'oeil de celui qui sait voir, qui sait regarder et désirer son amie, qui sait l'attendre au matin. Comme un chat perché quand il ronronne cette perle de pop atmosphérique "Sans sentiment", aux chaudes ondulations, ou diseur de méchancetés sous une rythmique saccadée comme une série de coup de fouets, "Qui donne les coups", moins question qu'affirmation, énumération d'insultes de cocher détaché du haut de son attelage. Il y a souvent une étrangeté dans le débit de ce Poirier, un burlesque pince-sans rire qui nait de situations, d'assemblages absurdes. Mais avant tout, une pointe de crayon qui de simples esquisses musicales, la plupart des pistes de ce premier album solo, fait naître des ambiances de contes, des sons anciens et primitifs, de jazz cassé en boucles électroniques, de glossolalie grotesque sui sussure des paroles peu rassurantes. Des courts-métrages en plans fixes, "Tout semblait immobile", ahurissant récit d'une fin du monde vue à distance, juste avant la catastrophe, dans une torpeur écrasée, où le narrateur finit par abandonner sa contemplation incrédule de cette explosion silencieuse pour se perdre dans celle du corps de sa compagne, comme un dernier refuge au moment de disparaître, les mots alors si détaillés se noient comme sous le coup d'un ultime désir, un dernier recours avant d'y passer, on est bien peu de chose, n'est-ce celle qu'on a aimé. C'est que la musique de Poirier, aussi cérébrale qu'elle puisse sembler au premier abord, est riche d'une très forte sensualité, les textures organiques aussi bien que synthétiques sont comme des tissus, les scintillements de lumière et les variations de températures sont palpables dans sa voix, les couleurs des ciels qui s'irisent en suivant les vagues du "Transi", des "Bords" ou de "Vu d'en bas", instrumentaux tous aussi prompts à susciter des frissons de plaisir que d'inquiétude, en attente de quelque évènement peu souhaitable qui viendra troubler la contemplation estivale de "Au milieu". Oui, décidément, il y a quelque chose de l'art du plan fixe au coeur duquel vibre quelque chose d'invisible, d'un mouvement d'aller et retour inéluctable produisant une confortable malaisance à l'image de ces quelques notes de guitare prisonnières de l'anneau de Möbius de "Pour le cheval", comme on se promène dans une sombre forêt sans jamais retrouver son chemin vers la maison. Le délice des peurs des récits enfantins. La peur qui sourd sous la quiétude du désir non assouvi.

note       Publiée le samedi 12 juillet 2014

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