Public Image Limited › Paris au Printemps

Le live à Tokyo de P.I.L. ? Un plantage horrible pour les uns, un album à l'ambiance spéciale pour les autres, une grosse merde disco aseptisée, bref, il y en a pour tous les commentaires. J'ai beau apprécier cette escapade au Pays du Soleil Levant, il est clair que si on la compare au sulfureux 'Paris au Printemps', il n'y a pas photo, comment imaginer deux performances aussi à l'opposé l'une de l'autre ? Cela tient au line-up au sein duquel on compte encore Jah Wobble et Keith Levene, à une époque et surtout à un malaise. Car si aujourd'hui les gens réalisent enfin le génie de John Lydon et son immense contribution à l'évolution de la musique, il n'en a pas toujours été ainsi et notre rouquin a dû montrer les crocs afin de bien faire comprendre qui il était vraiment. Enregistré suite à deux concerts dans la capitale française en 1980, ce concert ne respire pas franchement l'éclate. C'est glacial dans cette salle et à priori, pas pour des raisons techniques. J'ai attribué cet état de fait à une attitude volontairement hautaine du groupe (Lydon n'a jamais été réputé pour son attitude consensuelle et hypocrite) mais renseignements pris, il semblerait qu'il y ait eu maldonne entre un public attendant l'ex-Sex Pistols et l'artiste lui-même, présentement Public Image Limited et à des années-lumière du punk. Si les réactions du public sont sous-mixées, le malaise reste palpable, il y a des moments de silence au départ de plusieurs titres et le chanteur lance même à un moment 'Shut up !' ('Poptones') et même 'Wankers !' si j'ai bien capté. Lydon lui-même a toujours descendu ce live en flèche, produit uniquement à la demande de Virgin pour couvrir les coûts de 'Metal Box', et réalisé avec des moyens réduits. Justement. Ce live est génial, c'est l'essence noire et brute d'un Public Image Limited sans concession qui se fout comme de sa première chaussette des réactions de ce public bouché et étroit d'esprit. Les morceaux sont longs, grinçants, torturés, répétitifs, les arrangements dépouillés au maximum, avec une rythmique tournant en boucle, une guitare vicieuse et crasseuse malmenant les pauvres accords qu'elle égrène comme pour les rendre les plus affreux possible. Mais quelle intensité, les amis ! 'Careering' est à tomber par terre, 'Lowlife' méconnaissable, 'Theme' annihile les sens, 'Attack' très punky navigue sur le fil du rasoir et 'Poptones' enfonce le clou avec ses harmonies glacées jouissives. 'Paris au printemps' a tout d'un foutoir total: mixage bizarre, ambiance de merde, musique génialement chaotique...Ce que les mecs d'alors n'avaient pas compris en escomptant un show de Johnny Rotten, c'est que John Lydon pouvait être bien plus dangereux encore !