Heureusement qu'il nous reste l’irrévérence. Petit témoin clignotant des réalités rurales, de l'exode massif. Sous les ponts, sous les ruines. En ces temps où toute la crasse resurgit comme après une moquerie, il est bon de se rappeler au souvenir d'A.H.Kraken. Comme si, à trop vouloir chercher la liberté, l'égalité, par un pari fou, on avait orchestré un canular pour voir si l'inverse était possible. Voir où étaient les restes de la Grande France victorieuse de son propre misérabilisme. A.H.Kraken est irrévérencieux. Sale, méchant. Une volonté crasse de faire resurgir le meilleur de l'homme ; l'homme-pogrom, l'homme-juif, l'homme-hyène, comme l'écrivait un nègre. A.H.Kraken est sale. Les pochettes de ce genre ne savent mentir, tout y est, le son, l'attitude, l'atmosphère. Presque les odeurs, si vous vous rapprochez. Des petites histoires, des short story, qu'on imagineraient sorties du cerveau encombré de Volodine et ses nombreux amis. Des histoires de bunkers, de prisonniers, de viols, d’impérialisme. Le froid qui mord, le béton armé, le fusil à l'épaule, les yeux rivés sur le radar, petites tâches vertes d'arabes encore debout. Mort debout. A.H.Kraken est un groupe de frustration. Perdu pour l'histoire. Bête et méchant. Remplis de cette violence rurale qui cogne les yeux bandés. Défense d'entrer. Chiens méchants. Propriété privée. Camping-car, chômage. A.H.Kraken tabasse avec distinction, avec vice. Discrimination positive. Rangez votre esprit, rangez votre honneur : A.H.Kraken c'est la musique rêvée pour enculer.