Laibach › Volk

Volk ("peuple" en allemand, "loup" en slovène) est un des derniers coups d'éclat dans la discographie de Laibach dont la rhétorique, il faut se l'avouer, a bien perdu de son mordant à force de radoter. Le groupe, en collaboration avec un autre groupe slovène du nom de Silence, s'attaque ici au rêve fragile d'un village global et de la place des Nations dans un monde progressivement uniformisé. L'utilisation assumée de Wikipedia comme source principale pour les infos du livret est à ce titre très pertinent, troublant encore l'écart entre nationalisme et idéal universel. Pressés entre des pittoresques peintures de moutons - éternels symboles du peuple docile - les hymnes nationaux et leurs messages sont passés en revue par le NSK, leurs sens étant extorqués par la force, l'exagération ou la dérision ; leur authenticité renforcée à chaque fois par un(e) chanteur(se) du pays concerné puis carrément commentés par Milan Fras, qu'il s'agisse d'une question d'idéologie ou de politique actuelle (il nous parle même de nos ghettos qui brûlent, c'est dire) en en épargnant aucun. Les ambitions conquérantes de l'Amérique et de l'Allemagne, les contradictions de la France, l'hypocrisie de l'Angleterre, le militarisme japonais... Quant à savoir si la musique suit le concept, ma foi, cela va dépendre du degré d'appréciation de chacun concernant les bidouillages électroniques gentiment saturés qu'ils nous livrent ici, même si parsemés au vu des sources, mais fondamentalement similaires à ce qu'on a pu entendre sur WAT, ici mélangées à divers orchestres. 'Francia' a des allures de NIN période Year Zero quand d'autres ont ce petit côté martial néoclassique qui leur sied bien – je pense à 'Turkiye'. Certaines reprises sont tout de même bien moches, telles 'America' et 'Espana' quand d'autres, surprenantes, virent au néoclassique complet, telles 'Nippon' et 'Vaticanae'. L'album se termine par le rêve symbolique de l'hymne du NSK, enregistré -semble-t-il- par un vrai orchestre mais pas sûr qu'il soit à prendre plus au sérieux que ceux qui ont pourtant fait l'histoire. Laibach nous a pondu un commentaire de plus, pince-sans-rire comme à leur habitude, même si l'on est de moins en moins dupes. Reste un bon disque au concept original, et qui nous offre enfin une nouvelle parodie de la Marseillaise, qu'on sentait un peu délaissée depuis la version hérétique de Serge Gainsbourg.