Ill Bill & Vinnie Paz › Heavy Metal Kings

Vivant encerclé par les vignes, je me souviens avoir apprécié l'an passé en découvrant ce Heavy Metal Kings d'entendre Vinnie Paz beugler à plusieurs reprises le nom du meilleur pinard de l'univers connu (je parle évidemment du Bourgogne). Ah, on me signale dans l'oreillette que c'est qu'une métaphore classieuse pour l'hémoglobine... et que cette intro de chronique est à chier ?!!! OK, mais en même temps, pour un Vinnie Paz... J'veux dire, ce gusse concourre avec Ill Bill dans la catégorie des rappeurs au flow de catcheur. C'est à dire que techniquement bravo, bien fait et fun quelques minutes, mais en dehors des puceaux obèses coiffés d'un mullet personne peut s'extasier devant un combat entier. Avec un poing commun aussi évident dans la laideur massive, il était logique que Bill et Paz se fassent une collab' après plusieurs duels sur album. Et il n'y a rien de surprenant à ce que Heavy Metal Kings soit sans surprise pour tous ceux qui auraient suivi l'évolution des maisons-mères Babygrande et Uncle Howie Records ces cinq ou six dernières années. Avec les derniers Jedi Mind Tricks (le projet est d'ailleurs né d'un simple featuring sur Servants In Hell) et surtout avec son Armée des Pharaons, Paz nous a prouvé que le flow pouvait gagner en agressivité en même temps que l'inspiration partait en cacahuète. Avec ses propres collaborations et ses solos, Ill Bill, que ce soit via La Coka Nostra, ses solos ou ses apparitions, nous a prouvé qu'il n'avait pas grand intérêt, à part bourriner et s'afficher aux côtés de quadras lessivés et déprimants que la presse spécialisée appelle dans son jargon "légendes du hip-hop". Heavy Metal Kings, la collab de deux "fat" MC's des années 2000, est donc logiquement "fat". Pensez à 300, ou mieux à la série Spartacus, là, avec le sexe la boue les muscles saillants et le sang partout sous filtre photoshop, version hip-hop. Rien que de commun à l'heure actuelle, donc. Le charme indéniable vient de l'aspect moche musclé & linéaire (mais pas monotone vu que chaque titre a son petit truc kitsch à lui). Bill et Paz rappent comme des Land Cruisers sur une mono-voie balisée par une DDE fan de Carl Orff et Suicide Commando. En dehors de quelques passages comme "Oath of the Goat" ou la petite instru cypress-fast food assurée par Muggs (survivant comme il peut à l'heure actuelle comme en témoigne entre autres le très plat Kill Devil Hills), place à l'équation symphonique plastique / electro dark prolo / gros beats WWE. Pour le fond, paranoïa sociale, occultisme à deux balles et egotrips gentiment hallucinés nous ramènent au museau le parfum du Future Is Now de Non-Phixion, autant que la jolie pochette voïvodienne à reliefs. Et heureusement, en dépit des signes avant-coureurs tels que cette fameuse pochette ou le référentiel bovin de la tracklist, pas de mix métal-rap fait n'importe comment, même si à mon avis lll Bill - et ses productions perso sur ce disque le prouvent autant que son flow - ne pourra à mon avis jamais s'affranchir de l'emprise mentale de son charismatique petit frère. Heavy Metal Kings est au final la grosse pichenette attendue, du vrai bon gros horrorcore de blaireaux. L'album solide, racoleur, calibré et totalement actuel, dans toute son esthétique stérile surpuissante de survival imberbe et burné.