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The Residents › Freak Show

cd • 14 titres

  • 1Everyone Comes To The Freak Show 5:24
  • 2Harry's Introduction 0:34
  • 3Harry The Head 3:02
  • 4Herman Watches TV 2:38
  • 5Herman, The Human Mole 3:59
  • 6Wanda Does Her Act 2:03
  • 7Wanda, The Worm Woman 4:38
  • 8Jack Amuses The Crowd 0:46
  • 9Jack, The Boneless Boy 5:57
  • 10Benny Bounces 0:34
  • 11Benny, The Bouncing Bump 6:10
  • 12Mickey, The Mumbling Midget 4:39
  • 13Lillie 7:00
  • 14Nobody Laughs When They Leave 5:57

informations

J'ignore si la version CD-ROM est recommandable vu le coup de vieux, voire même encore jouable par Windows 7... Il existe beaucoup d'éditions (et de formats!) pour Freak Show. La première mouture ne comprenait pas les interludes "sur scène" (2,4,6,8,10), ils apparaîssent sur la Special Edition de 2003 et réapparaissent sur la version CD + DVD sorti chez Mute qui est celle chroniquée ici (je n'ai mis que les titres CD sur la tracklist cependant). La bande dessinée sortie chez Dark Horse Comics est plus que recommandée, d'autant qu'elle est encore trouvable à prix raisonnable.

chronique

"All the world's a stage" écrivait Shakespeare. Les Residents, eux, transforment l'univers tout entier en Freak Show. C'est ici que commence à mon sens la véritable période de storytelling du groupe pourtant refroidi après le cuisant échec de la grandiloquente Mole Trilogy, bien trop hermétique pour devenir autre chose qu'une curiosité artistique, les américains étant moins réceptifs au théâtre absurdiste d'après-guerre dont la syntaxe est peut-être la seule à se rapprocher de l'univers des Moles, s'éloignant de plus en plus de l'influence de Zappa et de Cpt. Beefheart pour s'approcher de quelque chose de plus Kafkaïen et Ionesco-esque. Bref, après avoir démoli toute la musique populaire de leur pays, de Gershwin aux Rolling Stones en passant par les Beatles (Meet the Residents), Elvis Presley (The King & Eye), Hank Williams (Stars & Hank Forever) ou encore le Top 40 à la pelleteuse (The Commercial Album), que leur restait-il, sinon construire un univers rien qu'à eux pour continuer à s'exhiber ? Les Freak Shows soumis à la question éthique posent le problême de savoir qui du public ou des attractions sont les véritables monstres ; qui des Residents ou du Top 40 sont les plus insupportables ou, par corollaire, qui de Throbbing Gristle ou de Britney Spears fait de la véritable musique industrielle. Et donc, à vouloir explorer quelque chose d'autre, ils se sont retrouvés à monter leur propre monstrueuse parade. Dans ce triste microcosme où le mythe, spectaculaire, se confond souvent avec une réalité bien plus pathétique, la Cryptic Corporaton a simplement poussé le bouchon un peu plus loin en s'adjoignant une panoplie de rebuts humains affligeants dont la misère est au coeur de l'album : Harry the Head, Herman the Human Mole (on ne se refait pas), Jelly Jack the Boneless Boy et autres Benny the Bouncing Bump ; autant de poupées d'exorcisme pour les Residents qui - en qualité de démiurges, spectateurs, promoteurs et autocritiques – exhibent en une série de chansons leurs vies devant et derrière les coulisses. Vous aurez remarqué que je n'ai toujours pas parlé de la musique parce que précisément, The Freak Show déborde largement du cadre et ce depuis sa naissance : à peine sorti en tant qu'album, le projet fut recréé entièrement en bande dessinée, et pas par n'importe qui : Dave McKean, John bolton, Savage Pencil, Brian Bolland, Matt Howarth et j'en passe, tous se sont appropriés le background d'un des personnages pour en faire une collection unique en son genre qui sortit chez Dark Horse Comics en 1992 et qui reste, paradoxalement, une des pièces maîtresses du puzzle. Par la suite c'est sous la forme d'un CD-Rom interactif en tant qu'oeuvre – encore une première dans le monde de l'art multimédia, après leurs percées dans le vidéo clip – que le cirque s'épanouira, puis, plus anecdotiquement, dans une véritable pièce de théâtre approuvée par ses parrains mais monté par une troupe entièrement indépendante. Mais trève de procrastination : parlons musique. C'est, comme je l'ai dit, beaucoup plus narratif et moins expérimental que par le passé : pratiquement descriptif par moments, comme l'ouverture, véritable hymne de cirque, ou par les présentations emphatiques de Monsieur Loyal. Comme plus tard sur The Gingerbread Man, un thème récurrent lie les personnages entre eux tandis que chacun raconte sa vie en deux temps : premièrement sur scène ('Jack Amuses the Crowd', 'Wanda does her Act', 'Benny bounces' etc), puis en coulisse, où l'on entre alors dans leurs pensées et leurs aspirations secrètes ('Herman the Human Mole', 'Wanda the Worm Woman', 'Jack the Boneless Boy'...). À chacun son propre thème sous la fanfaronnade gothique de façade : cabaret-blues pour Harry the Head, musique minimale et souterraine pour the Human Mole qui renvoie sans aucun doute à la trilogie en question – sous une forme plus polie et moins brute toutefois, jazz absurdiste pour Wanda et, pour l'histoire la plus triste de toutes, celle du Boneless Boy (bonsaï kitten avant l'heure, version humaine), deux thèmes différents entre la description qu'il fait de sa condition d'objet de curiosité et ce qu'il devient lorsqu'il rêve de vengeance. Chaque caractère a sa voix propre : ralentie, étirée et poussive pour Jack, froide et détachée pour Herman, grotesque et demeurée pour Benny... les voix féminines semblent quant à elle beaucoup plus humaines ; mais en fil rouge se trouve aussi, récurrent, un choeur narratif omniscient semblant poursuivre le travail de Monsieur Loyal là où il ne fait que le minimum des présentations. Autant le dire d'emblée, on n'est jamais seul dans cet album : les histoires et les monstres s'enchaînent rapidement, s'embriquent parfois – the show must go on, quel que soit la détresse morale de ses participants. Si l'intensité du disque ne faiblit pas, l'expérience gagne tout de même à être complétée visuellement, ne serait-ce que par la bande-dessinée, qui fournit quant à elle la sixième boule qui fera défaut en dessous de cette trop longue chronique. Quant à l'expérience du CD-Rom, sans doute aujourd'hui moins percutante qu'à sa sortie, elle peut facilement être retentée par la dernière édition de l'album comprenant un DVD bonus avec de nombreux extraits du spectacle et un début de compilation dudit logiciel avant que son géniteur, le génial Jim Luetke à qui l'on doit aussi Bad Day on the Midway ne passe l'arme à gauche en 2004, ce qui donne une forme à nouveau avortée et incomplète - en un sens, difforme, au Freak Show quant à lui toujours aussi acide. "Is it a rumor.. Or is it a tumor?"

note       Publiée le mardi 6 mars 2012

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Note moyenne        4 votes

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Le Gnomonique Envoyez un message privé àLe Gnomonique

Une vraie tendresse pour celui-là. Clairement suranné mais c'est ce qui me plaît, tant il me rappelle les jeux vidéo de l'époque : sons plastiques, rigidité midi et images en polygones. Leur génie de l'étrange transcenderait presque ces limites pour les réinvestir d'un pouvoir suggestif nouveau. Je ressens la même chose avec le Berlin de Art Zoyd (c'est mon jour pour les parallèles foireux). Mais 4/6 objectivement, car deux ou trois chansons peinent à convaincre faute d'idées de composition vraiment fortes.

Note donnée au disque :       
Solvant Envoyez un message privé àSolvant

entertainment Residents!.

Shelleyan Envoyez un message privé àShelleyan  Shelleyan est en ligne !
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