Erik Wøllo › Silent Currents

Que j’aime la musique d’Erik Wøllo. J’ai appris à connaître ce très bon guitariste Norvégien à travers ses collaborations avec Steve Roach et son album Gateway. C’est un fin guitariste qui réussit à harmoniser ses couches et nappes de guitares aux synthés ou impulsions séquencées de Steve Roach, aux harmonies tribales de Deborah Martin et la musique très expérimentale de Bernhard Wöstheinrich. Sur Silent Currents, il propose 2 enregistrements en concert donnés en 2002 et 2007 sur les ondes de l’émission de MÉ culte de Chuck Van Zyl; Star's End. Deux concerts d’une durée moyenne de 52 minutes, divisés en près de 26 segments. Des prestations aux textures musicales envoûtantes qui dépeint la dextérité, tant aux guitares qu’aux synthés de ce brillant musicien où la maturité et l’ingéniosité s’entend sur ce très beau coffret de 2 CD où 7 années séparent les 2 concerts.
Enregistré lors de l’émission du 27 Avril 2002, Silent Currents 1 amorce son long voyage musical avec un fin mouvement linéaire d’où émergent de subtils riffs qui s’enchaînent en délicates boucles sous un ciel tamisé de couches et strates d’une fusion synthé/guitare. Le début du mouvement est doucement ambiant et atonal avec de délicates modulations teintées d’effets sonores hétéroclites émergeant des grottes Arizoniennes et entourées de suaves couches de guitares spectrales qui flottent sous de fines réverbérations et qui s’entrecroisent parmi d’oblongues pulsations morphiques, alors que Silent Currents 1 embrasse ses premières séquences vers la 17ième minute. C’est un fin mouvement séquentiel avec des accords qui alternent dans une suave succession, alors qu’émergent de langoureuses lamentations d’une six-cordes mélancolique qui nous guide vers un miroitant mouvement scintillant avec des accords de guitares effleurant doucement la surface de la tranquillité sous l’effet fantomatique des ondulantes et sinueuses couches de guitare. Silent Currents 1 devient plus sombre et lourd. "Part 7" flotte dans une lourdeur abyssale avec de chevrotantes lignes d’une fusion syncrétique qui ondoient dans une lourde atmosphère métallique avant d’aboutir sur un limpide mouvement où de fins accords cristallins et de délicats solos de synthé dansent dans une spirale cosmique. Un beau moment mélodieux avant que les pulsations hétéroclites de "Part 9" sautillent d’un mouvement saccadé, nous plongeant dans une fusion des univers tribaux et ‘‘soundscapes’’ de Steve Roach. C’est un délicieux univers éclectique entouré de cerceaux métalliques qui s’entrechoquent à l’ombre des strates de synthé aux chœurs aussi discrets que les accords de guitare. Ce bouillonnant passage sombre dévie vers les douceurs oniriques de "Part 10" et de ses superbes et douces couches de guitares qui hurlent avec tendresse dans un désert solitaire, permutant en lourdes couches de synthé qui glissent sur un très beau mouvement linéaire. Les premières percussions se font entendre sur "Part 11". Elles résonnent d’un mouvement arythmique sur une sinueuse ligne métallique au grisaillement croissant pour embrasser les douceurs soporifiques de "Part 12" et de son synthé aux inertes couches angéliques, sonnant l’heure du dodo à poings et yeux fermés.
Un long souffle synthétisé fragmente ses sonorités de verres pour dessiner une fine ligne hachurée dont l’écho se fond aux lourdes réverbérations et aux suaves chœurs mélodieux. Enregistré lors de l’émission du 28 Octobre 2007, Silent Currents 2 amorce ce concert avec plus d’émotivité et de chaleureux souffles de synthé qui se faufilent parmi des arpèges scintillants et des couches d’une guitare statique. Il y a tout une richesse sonore sur ce concert avec une meilleure fusion synthé/guitare qui multiplie les couches oniriques dans des structures morphiques emplies de délicats scintillements. Les premières pulsations d’un monde surréaliste émergent sur "Part 3". Elles sautillent de leurs échos, moulant une étonnante arythmie dans une lourde ambiance nourrie de brefs solos de guitares et de lourdes strates d’un synthé sombres et enveloppantes. Mélangeant atonie et harmonie avec des accords de guitares qui roulent en boucles et de brefs solos qui flottent dans d’hybrides mouvements ambiants, Silent Currents 2 sillonne ses 14 segments avec une plus grande fluidité et une intense faune musicale qui faisait défaut sur le concert de 2002. Erik Wøllo a mûri et a acquit une plus grande dextérité, lui permettant d’entrelacer ses segments avec une plus grande richesse musicale. Si les sombres couches de synthé dessinent toujours des ondes spectrales, il y reste toujours une limpidité harmonieuse qui s’en détache juxtaposant deux entités bien différentes sur le même mouvement, comme sur "Part 6". Les errances synthétisées abondent, tissant de superbes mouvements ambiants qui sont souvent surpris par des pulsations impromptues comme on peut entendre sur "Part 7" et "Part 9" avec son suave chant flûté dans un univers aux multiples dimensions sonores. Il y a de beaux passages où la guitare saupoudre ses notes dans de douces structures échoïques, brodant de surréalistes mais accrochantes mélodies dans de denses incantations synthétisées ("Part 8") ou des mouvements solitaires partagés avec des couches de synthé morphiques dans un désert de crotales ("Part 10"). L’univers de Silent Currents 2 est riche en passages séquentiels, "Part 11" et "Part 13", ou singulièrement animés d’éclectiques pulsations qui font chavirer les univers musicaux entre l’ambiant, le rythme léger et mélancolique comme sur "Part 12".
Bref, 2 mondes et 7 années séparent les deux prestations d’Erik Wøllo et ça s’entend. Si Silent Currents 1 est plus ambiant et atonal, Silent Currents 2 est plus vivant et musical. On y entend un Erik Wøllo avec plus de maturité et d’assurance qui n’a plus peur des rythmes et défis pour maîtriser plusieurs instruments en concert. Silent Currents est un bel album qui s’adresse principalement aux fans de Wøllo, quoique le 2ième CD soit d’une étonnante musicalité et pourrait plaire aux amateurs de musique ambiante et des univers diversifiés des riches sonorités dites ‘‘soundscapes’’ et ‘‘landscapes’’. À noter la superbe pochette qui enveloppe ce très beau coffret de genre digipack qui est une belle petite œuvre d’art et qui abonde dans les réalisations du label de Sam Rosenthal; Projekt.