Parallel Worlds / Ian Boddy › Exit Strategy

Le label DiN d’Ian Boddy s’est toujours spécialisé à offrir une musique qui transcende les frontières habituelles d’une MÉ conventionnelle et même progressive. Empreint de mysticisme et d’étrangéité, unique à l’univers sonore du duo Ian Boddy et Bakis Sirros, Exit Strategy est un album où la musicalité n’a d’égal que la créativité du duo très éclectique. Tissé à même les sculptures ambiantes aux sonorités composites de Bakis Sirros et habillé de lentes et langoureuses couches de synthé caustique d’Ian Boddy, Exit Strategy est une envoûtante musique industrielle qui niche entre les lourdes zones atmosphériques et les rythmes hésitants à la Redshift et Arc. Un beau dosage où la musique est comme nulle chose ailleurs. Ici, comme dans un univers parallèle!
Portal nous ouvre l’obscur et ténébreux univers métallique de Ian Boddy et Parallel Worlds avec de sombres mugissements méphistophéliques qui flottent au-dessus de percussions feutrées. Des percussions/pulsations aux effets de ventouses résonnent dans un univers strié d’ululements métalliques et de fins chapelets cristallins qui défilent dans une pure ambiance abstraite où les lamentations diurnes flottent telles des âmes errantes avant que Portal se dirige vers un lourd rythme statique et infernal. Un bref mais lourd moment où les esprits se révoltent et s’apaisent pour infiltrer le monde plus musical d’Impresario. Se nourrissant aussi d’atmosphères abscons et de percussions aux sonorités hétéroclites Impresario évolue entre différents segments rythmiques. Il s’envole lentement avec de belles couches de synthé, ainsi que de belles orchestrations mouvantes et ondoyantes, sur un mouvement qui prend une tangente plus animé avec un tempo lourd et lent ondulant sous de sinueuses réverbérations, des strates aux hurlements d’effroi et des percussions/pulsations métalliques-éclectiques. Un lourd mouvement au rythme un peu flou où les réminiscences d’Arc et Redshift se font entendre sur des pulsations glauques et un délicat piano diabolique qui étale un léger ricanement sur une structure rythmique en perpétuel renouvellement. L’intro de Soliloquy nous enveloppe d’un doux voile serein. Au loin et juste en arrière on y entend des tic-tacs qui battent de façon arythmique et une belle basse qui moule une structure légèrement pesante alors que Soliloquy dévie sur un lent rythme doux et sensuel drapé de belles strates réconfortantes, quoique toujours un peu sombres, où le piano s’échappe et entremêle ses notes avec de belles percussions cristallines. C’est un très beau titre, entre la beauté et la noirceur, qui dissipe les brumes ténébreuses des 2 premiers titres et qui se veut un bel intermède avant de plonger dans Entwined, un long titre ambiant aux obscures atmosphères où sonorités hétéroclites meublent un long mouvement remplis de souffles noirs qui expirent dans un sombre jardin infesté de criquets métalliques.
L’intro d’Exit Strategy trempe dans une ambiance très glauque. J’y entends des inspirations de Schmoëlling alors que le tempo s’anime lourdement avec des accords qui transcendent en sphères ascendantes. Des accords qui grimpent sur un lourd et lent mouvement sinueux parfumé de lourdes couches métalliques et animés de percussions hétéroclites et d’une bonne ligne de basse. Le tempo glisse dans une indécision où de superbes et étranges sonorités façonnent d’étonnantes percussions sur une structure endémique où de suaves et prenantes strates métalliques survolent de belles bribes mélodieuses. Hidden est un peu dans le moule d’Entwined. C’est un titre sombre et ambiant qui prend forme avec une nébuleuse intro où de fines pulsations éparses éveillent un monde sombre avec de lugubres couches et lamentations de synthé aux souffles métalliques qui flottent et hurlent vaporeusement parmi des cerceaux métalliques aux cliquetis musicaux. Tranquillement Hidden s’éteint dans l’intro de Return et son rythme incertain qui pulse dans une ambiance très intimiste où les mellotrons chantent de belles mélodies poignantes sur un tempo hésitant. Oscillant entre deux phases rythmiques, l’ambiant et le rythme fragmenté, Return progresse avec de lents pas de loups qui enjambent une évolution cadencée constamment freiné par des éléments musicaux éclectiques et des élans retenus que les mouvances des synthés mellotronnés embrassent et étreignent de leurs vaporeuses brumes musicales. C’est une superbe façon de conclure un très bel album d’une musique toujours aux antipodes de ses rythmes et harmonies.
À ne pas en douter, Exit Strategy est à la hauteur de ce que l’on peut s’attendre d’un duo aussi imprévisible que fascinant. C’est un très bel album où les ténèbres rencontrent les lumières mélodieuses d’une journée tamisée par les lourds voiles de mellotron et de synthé aussi nébuleux que céleste. Oscillant entre les rythmes lents, lourds et francs ainsi que les sombres atmosphères des licornes des ténèbres, Boddy/ Sirros réussit à créer une ambiance musicale unique où les bizarreries sonores de Bakis Sirros se moulent à merveille avec la vision musicale très avant-gardiste d’Ian Boddy. Exit Strategy est un album à écouter les oreilles grandes ouvertes et les yeux suivront cet étonnant parcours musical.