Le punk rachitique a prit du poids, on dirait. Il a pas arrêté la boisson mais il a trouvé un bon boulot en chemise qui cache ses affreux tatouages. On sait jamais ce qui se trame dans le dedans des bons travailleurs ; des envies de viol, de meurtre au fusil à pompe dans les bureaux, de brutalité autour d’un billard. Celui qui rentre chez lui, se désape devant le miroir et fait remonter les cicatrices d’une jeunesse cramée par tous les bouts. Comme lorsqu’on regarde une vieille vidéo de nous enfants, et qu’on se dit qu’on irait bien revoir ces lieux qui nous sont familiers et remplis de souvenirs flous, sachant pertinemment qu’on le fera jamais. Auf Wiedersehen, comme on s’en doute, est un album – enfin, un dix pouces – mélancolique, quand on doit dire au revoir à ses amis après avoir passé l’été de sa vie et qu’on doit rentrer dans son morne quotidien la tête plein des rêves de la veille. C’est sans doute de là que lui vient son côté Paradise Lost de "Believe in Nothing", sur Chinese Town c’est assez flagrant, cette guitare assommée, endolorie, ce solo mou comme une demi-molle après avoir soulevé le même boudin pendant trois ans, tristoune et pas vraiment glorieux. Et de Bauhaus, bien entendu, toujours, et même Joy Division, quand Ian Curtis et Peter Murphy sont invités sur Midnight Beach, avec les restes de la semaine, les nuits blanches, le sommeil sur le sol, le concert de The Horrors et la débandade qui s’ensuivit, quand cette fille nous a jeté avec son air blasé et ses glousseries avec ses copines, qu’on est rentré à pied à quatre heures du mat’ avec l’esprit embué d’alcool et le walkman à fond, s’imaginant dans un film de Vincent Gallo – ça marche aussi pour Pissing at the moon. Ca marche pour tout les titres en fait, cette ambiance nocturne et les lumières artificielles, et la solitude de l’échec la tête pas tout à fait là où elle devrait être ; enfin, tous sauf Something’s on her mind, cet espèce de power slow ringard sirupeux franchement insupportable dépassé les cinq écoutes et qui plombe un peu la jolie note que je comptais lui mettre. Un groupe aussi con ne pouvait pas nous sortir un superbe testament aussi sérieux sans une atroce faute de goût non plus.