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Stevie Wonder › Where I'm coming from

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nicliot      jeudi 29 juin 2023 - 11:39
nowyouknow      samedi 1 février 2020 - 17:13

cd • 9 titres • 36:39 min

  • 1Look Around 2:45
  • 2Do Yourself A Favor 5:58
  • 3Think Of Me As Your Soldier 3:30
  • 4Something Out Of The Blue 2:58
  • 5If You Really Love Me 2:56
  • 6I Wanna Talk To You 5:10
  • 7Take Up A Course In Happiness 3:03
  • 8Never Dreamed You'd Leave In Summer 2:53
  • 9Sunshine In Their Eyes 7:00

informations

Arrangement par David Van DePitte , Jerry Long , Paul Riser - Produit et arrangé par Stevie Wonder - Enregistré de Juillet 1970 à Février 1971

line up

Stevie Wonder, Syreeta Wright (co-composition) , The Funk Brothers (instruments), ...

chronique

Signe des temps : cet album est sorti en même temps que What’s Goin’ On, autre émancipation - plus étonnante - d’un artiste Motown. Marvin Gaye pour ne pas le nommer, probablement influencé par Stevie Wonder qui fut le premier à tenir tête au Big Boss Gordy. Ce qui n’est pas rien quand on connaît le personnage. Le mot d’ordre général est à l’éveil, à la prise de conscience… Look Around, c’est un peu le ‘What’s goin’on’ (la chanson) de Wonder : avec sa basse profonde et ses clavecins mystérieux, elle impressionne de maturité et de concision. On dirait du Nobuo Uematsu, pour ceux qui connaissent, et ce n’est décidément plus de la Soul Music, c’est autre chose. Mais avec le féroce Do Yourself A Favor, c’est carrément une révélation : Wonder déploie ses ailes et adopte le funk, cette nouvelle musique qui fait souffler un vent de liberté, de pattes d’eph, d’afros et de fringues flashy sur toute la communauté… Et autant vous dire que c’est réussi : il fait parler son orgue branché sur pédale wah-wah comme Jimi Hendrix sa guitare, et se permet même une citation enfantine à la fin du morceau, clin d’œil à ce passé qui semble déjà si lointain… La comparaison avec le disque précédent, sorti 9 mois plus tôt, est juste effarante : ce n’est pas le même homme, c’est comme si les Beatles étaient passés de ‘With the beatles’ à ‘Revolver’ sans transition. Something out of the blue est d’ailleurs une sorte de ‘Here there and everywhere’ où un orchestre à corde vient illuminer ce tableau mélancolique, véritable pépite de Baroque Pop… ça continue avec If You Really Love Me, au refrain faussement niais mais se terminant par une harmonie incroyable. I Wanna Talk To You est un règlement de comptes entre un Stevie qui commence à prendre sa voix éraillée caractéristique et un blanc à l’accent du sud imité par ce même Stevie… Récit d’une émancipation, aussi bien envers le patron businessman qu’envers le paternalisme des racistes. Mais c’est Sunshine in their eyes qui impressionne le plus, l’un des tout meilleurs morceaux du soulman, absolument essentiel. Wonder y brise l’un des grands tabous de l’institution Tamla Motown : la conscience politique, jusqu’ici soigneusement étouffée par un Berry Gordy soucieux d’infiltrer les tourne-disques des blancs. Ici, Wonder livre un résumé assez mature de l’ambiance de l’année 70 en ce qui concerne la guerre du vietnam : “Father Bill's gone fighting in a place where he's a stranger/But could men die a stranger in every war/We all hide in shame boldly pointing to another/When the blame we know for sure is right in ourselves”. Avec en prime un ad lib final à la Hey Jude qui emporte les dernières réticences comme un fêtu de paille. Le 13 Mai 71, trois jours après la sortie de ce disque, Wonder est majeur. Il re-négocie à fond son contrat, ce qui lui vaut même des comparaisons avec Orson Welles. Il gagne alors le contrôle artistique et absolu et fonde sa propre maison de prod. (Taurus) et d’édition (Black Bull). Coupé de la chaîne de production et de la structure patriarcale Motown, il réalise seul et sans intervention extérieure cet album - si ce n’est les Funk Brothers pour la dernière fois - chose impensable pour une maison de disque ayant toujours fonctionné comme une famille (voir chronique de I was made to love her). Le résultat : album frondeur, innovant et exceptionnel là où les précédents étaient anecdotiques. Chaque chanson est désormais une entité à part entière, très différente des autres, mais en même temps parfaitement à sa place dans le tracklisting. Sans parler d’album concept (peut-être pour Fulfingness…), il va de soi que ce disque inaugure une nouvelle façon de travailler pour Wonder, et une nouvelle ère personelle et artistique. Wonder devient adulte, et la musique noire populaire avec lui, peut-être en partie grâce à lui. Aussi bon que Music of My Mind en ce qui me concerne.

note       Publiée le mardi 25 janvier 2011

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Todd Rundgren - Runt

Todd Rundgren
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Pour le final de l’album, épique et à tiroirs comme c’était alors à la mode, voire aussi les Fiery Furnaces.

chronique

Stevie Wonder travaille sur ce disque l'année de ses vingt ans... et il a déjà une longue carrière et de nombreux albums derrière lui, comme les chroniques de mon illustre collègue l'ont évoqué. Il aura débuté sur disque à l'âge de douze ans, multi-instrumentiste prodige et chanteur de soul hors du commun au feeling monstrueux, vendu comme génie précoce par les requins de la Tamla Motown, "petite merveille" - aveugle de surcroit - exhibée tel un phénomène de foire. Ce mythe du génie précoce porté en avant pour des raisons commerciales et exploité à tout va, alors que la musique va tellement au-delà de toutes ces considérations vulgaires, me rappelle toujours Mozart... Et la comparaison ne s'arrêtera pas là en ce qui me concerne car dans le domaine de la musique populaire, Stevie Wonder a le même effet sur mon âme que l'Autrichien dans le domaine de la musique classique : il guérit ; il est ce compositeur dont les mélodies géniales et la portée universelle vont faire voler en éclat notre perception de l'art et du monde et vont faire de l'auditeur une personne nouvelle, meilleure. Une période de grâce, pour Stevie Wonder, qui commence véritablement ici. "Where I'm coming from" est souvent décrit comme un album de transition, non sans raison : les synthétiseurs sont déjà là, mais ils côtoient encore les chatoyants arrangements "classiques" de la Motown, avec cordes, cuivres et piano. Pourtant, au-delà de cet aspect, la mue s'est déjà opérée : l'album précédent contenait encore une reprise des Beatles - c'est terminé ici. Artistiquement (et commercialement), Stevie s'est complétement affranchi de la tutelle de sa maison de disques : il produit tout, compose (ou co-compose) tout, est à tous les instruments (eh oui), prend son temps, travaille comme il l'entend et sort les disques qu'il souhaite. Il parle de lui, de son parcours, de ses visions (jamais un aveugle n'aura autant employé ce mot... et nous verrons à quel point il se justifie), et de la société, déjà, en porte-parole généreux de la conscience afro-américaine. Mais sa musique s'adresse vraiment à tout le monde. "Where I'm coming from" est un disque génial. Les notes données en ces chroniques à Stevie Wonder n'auront d'ailleurs de sens qu'à l'échelle Stevie Wonder, tant il se situe durant toute la décennie 1970 sur une autre planète - un peu comme les Beatles durant les années 1960. L'entrée en matière n'a elle-même rien à voir avec ce à quoi Stevie nous avait habitués : solennelle, grave, avertissement sombre et pessimiste à l'humanité, clavier aux échos lointains et voix seuls. Peu d'artistes mettraient un tel titre en introduction sans être ridicule. Mais c'est beau comme un prélude de Bach - et les choeurs participent ici de cette gravité. "Do yourself a favor" nous plonge ensuite dans six minutes d'un rock/funk débridé, où clavinet et orgue Hammond se livrent à une jam session sans pareille sur fond de l'appel "Educate your mind". Énorme. Le reste est à l'avenant. Comme pour les Beatles à partir de "Rubber Soul", il n'y a pas un seul titre moyen ou dispensable sur cet album. Le soul/funk du refrain de "If you really love me" rappelle davantage les époques précédentes, mais ça reste diablement efficace. Bien sûr, il y a les ballades éternelles de Stevie : "Think of me as your soldier", "Something out of the blue", "Never dreamed you'd leave in summer" : jamais sirupeuses à l'époque, simplement éternelles, au lyrisme toujours émouvant, voire poignant (même si la suite sera sous cet aspect meilleure encore), pour la dernière fois ici accompagnées de l'orchestre "classique". "I wanna talk to you" est un dialogue impossible entre un jeune homme noir désespéré et un blanc donneur de leçons, oscillant entre gospel et voix nasillarde selon l'interlocuteur. Il y a aussi de la pop beatlesienne en diable avec "Take up a course in happiness". Mais nous sommes peu préparés au dernier titre, l'hymne "Sunshine in their eyes" qui progresse sept minutes durant jusqu'à son final cathartique, une fusée mélodique à plusieurs étages qui décollent l'un après l'autre et se termine, malgré un constat assez sombre, en explosion de joie. Un sommet dans la carrière de Stevie. "Je suis impatient de voir leurs yeux briller un jour de l'éclat du soleil"... Comme les siens. Et comme les nôtres maintenant. Merci pour ça.

note       Publiée le mardi 25 janvier 2011

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    nowyouknow Envoyez un message privé ànowyouknow

    Look Around impose le respect d'entrée, solennelle avec un magnifique refrain et une ambiance qui rappelle les premiers Doors. If You Really Love Me est un vrai tube imparable. Quant au dernier morceau, à tiroir, il est pas loin d'être merveilleux. L'essentiel est déjà en place, un bien bon album.

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    Trimalcion Envoyez un message privé àTrimalcion
    avatar

    Marrant, j'avais jamais pensé à la comparaison avec "Hey Jude" pour le final de "Sunshine in their eyes", c'est bien vu ! (Cela dit, cette chanson de Stevie est bien meilleure que l'agréable scie des Beatles :)