La pochette de ce premier album des Ruts est clairement de celles qui rendent super moche en cd. C’est un coup chance que je possède le LP, bien qu’en toisant de plus près la chose, il est difficile de voir où l’illustrateur a voulu en venir… The Crack est l’un de ces albums qui valent l’écoute pour une petite poignée de chansons, alors que tout le reste s’oublie trop facilement. On a donc la tuerie des dancefloors, Babylon’s Burning, pêchu comme du The Jam et au refrain appelant à l’émeute ( « Babylon’s burning with anxiety !! », pas con, et bien plus vrai que les classiques attaques contre la méchante babylone du reggae jamaïcain), et It was cold, situé quelque part entre The Police et Magazine, avec sa ligne de basse lancinante et sournoise, qui sortent du lot. S.u.s., au texte attaquant la détention préventive (tout comme Dope for guns), fait carrément penser à du Thin Lizzy, c’est dire si le punk 3-accords et pied-au-plancher-sans-regarder-le-mur-qui-arrive-droit-devant est ici délaissé, et à raison. Quant on s’échappe d’une prison à bord d’un bulldozer ayant réduit les murs d’enceinte en gravats, pourquoi rester à bord du bulldozer, alors qu’on peut voir le monde à pied, et trainer par exemple avec les jamaïquains expatriés de Misty In Roots, groupe reggae issu du même quartier que les Ruts ? Et ainsi pondre un truc aussi osé que Jah War (même si aujourd’hui, le même titre relèverait de la paresse consensuelle), authentique reggae qui pourrait sortir de la Jamaïque, si ce n’est pour le solo de guitare dans l’écho et la voix blanche. Bien sûr, niveau rasta credibility, on repassera, mais que ne voilà-t-y pas un excellent morceau de reggae dub… adressé au National Front, ce qui ne manquera pas de rappeler les tristes sires du reggae français, jamais avare d’une petite saillie contre l’extrême droite sur fond de fumette, mais incapables de fouttre le feu quand il le faudrait depuis des années. Quant au reste de la galette… Il n’y a rien, mais alors rien à signaler. C’est du punk presque réac pour 1979, sans forcément adopter une formule toute faite comme le Oï ou le Crust… Ah si, Back Biter se termine par un break lugubre et boisé, mais ce n’est hélas que pour mieux laisser place à Out of order et à ce Human Punk d’un ennui total enregistré live… Les Ruts avaient la réputation d’être l’un des meilleurs groupes de la scène punk, cela devait sûrement être du à la scène, parce qu’en studio… C’est l’encéphalogramme plat côté créativité. The Crack, un putain de méchant EP qui a raté sa vocation.