Je regardais la photo de Ian Curtis, l'autre jour...Tout de même, qui aurait cru que ce jeune homme au regard triste, au look sage influencerait tant d'artistes ? Et Richard Hell, Tom Verlaine, avec Television ? Un seul album, bon sang ! Combien de groupes pourtant le citent en référence...Mais qui Joy Division et Television inspirent-ils de nos jours ? Toutes les formations (soit disant pour la moitié d'entre elles) post punk contemporaines, et cela partout dans le monde...Imaginez, même en Chine, puisque le trio Rebuilding the Rights of Statues cite lui aussi parmi ses influences Joy Division, Television mais également Bauhaus, Interpol et Père Ubu. Cela s'entend parfois. Hommage ou pompage ? Un passage de 'Die in 1977' vient directement de 'Slice of life', quant à 'If the monkey becomes (to be) the king', c'est un riff de Siouxsie and the Banshees qu'il emprunte...J'arrête aussitôt, mes commentaires laisseraient croire que nos jeunes Chinois ne sont que des plagiaires et ce n'est nullement le cas. Il leur serait évidemment ardu de mentir quant à leurs influences mais elles sont parfaitement digérées. Il faut dire que le leader, Hua Dong, n'est pas né de la dernière pluie, lui qui a étudié en Allemagne, puis de retour au pays, tenu la batterie pour PK14. D'ailleurs Rebuliding the Rights of Statues n'ont-ils pas carrément (lors des sessions d'enregistrement de ce premier disque à Pékin) attiré l'attention de Brian Eno qui enregistrait dans le même studio ? Du coup, ce dernier n'a pas hésité à jouer un peu de clavier pour eux, excusez du peu. 'Cut off' est une belle réussite orientée post punk/cold wave dans laquelle le groupe parvient à insuffler sa propre fraîcheur, notamment grâce à la sincérité que l'on décèle dans les compositions (les intonations du chant, tantôt désenchantées, parfois ironiques, un peu folles même...). Il faut dire que rien n'est acquis et que la censure officie encore pleinement au Pays de Mao; le trio se voit ainsi contraint de traduire tous ses textes en chinois pour obtenir l'aval des autorités. Ceci n'effraie nullement Hua qui triche volontiers lors de la traduction ('Hanging the police' devenant en mandarin l'équivalent de 'The police are laughing'): 'C'est comme le jeu du chat et de la souris, nous verrons bien qui gagne' affirme-t-il. Souhaitons que nos jeunes gens l'emportent car la chanson en question est une merveille, plus vraiment punk dans la musique (même si la guitare conserve quelque chose de grinçant dans ses sonorités), elle en a conservé la rage qui s'est muée en tension, une sorte de colère froide dissimulée sous une étiquette arty volontiers cynique. Voilà une galette qui ravira les fans d'Interpol en leur proposant une touche particulière, faussement pop, décadente, mordante...L'esprit du post punk originel interprété par trois Chinois, c'est franchement excitant et addictif au fur et à mesure des écoutes.