Hilt › Call The Ambulance (Before I Hurt Myself)

Là, on rentre dans les obscures annales des projets de cEvin Key. Hilt, c'était d'abord un groupe à géométrie variable se construisant autour de Key (principalement à la batterie et aux machines) et de divers groupes de rock et punk de la scène torontoise. Et l'histoire de cet album, c'est celle d'un pari idiot : enregistrer et produire un album commercialement viable de A à Z avec moins de quinze mille dollars canadiens, soit aujourd'hui environ dix mille euros. Ca sent la fin des eighties à plein pif, tendance new wave électronique et batterie triggée genre motorik beat. Pourtant sous cette allure cheap se cachent de véritables merveilles de rock plein de vie et de sueur : 'Down on Mommy's Farm', 'Lets Fall Out' ou 'Back to Insanity' sont de parfait exemples d'une énergie mordante bien plus proche de Foetus que de Skinny Puppy. Aux côtés des guitares fuzzées et hurlantes, ce sont bien beuglements blues/punk alcoolisés d'Alan Nelson (décédé récemment) qui donnent ce cachet unique de surf imbibé à l'haleine d'huile de moteur. Sur des rythmes soutenus s'égrènent riffs étincelants et chansons enroués de fond de bar à trois heures du matin et à l'ampli mal connecté dont chaque note fait grincer le parquet. Pour une fois la production crade, budget oblige, sert tout à fait l'ambiance directe de ces seize hymnes anti-intellectuels mais parfaitement conservés dans l'alcool et prêts à refaire surface dans toute soirée rock indus crados qui se respecte. Pourtant, tout n'est pas que violence et sueur, comme le prouve le tranquille 'Get Stuck' ou le grand 'Wood Soup', en guise de générique de fin sur orgue synthétique et qui se chante et se rechante entre amis bourrés en guise d'adieu. Pourtant, le charme grandissant du disque et ce qu'il véhicule comme esprit de fraternité dans la misère alcoolique donne vite envie d'y retourner perdre ses plumes.