Rogue Element › Rare Tracks-Volume II

Bien que ce 2ième volet d’inédits de Rogue Element surplombe une période plus près de ce que nous connaissons du duo, soit des albums Storm Passage et Premonition, Rare Tracks Vol. II nous laisse quelque peu perplexe et sur notre appétit. Scindé en 2 parties, soit l’une où Rogue Element est seul maître à bord de son vaisseau musical avec des titres comme Prelude 2003 et Down-Temp et l’autre partie avec la collaboration d’artistes extérieur au monde musical du duo Pollard/Ramsay, Conserve the Preserve et Sequential Explorers, Rare Tracks Vol. II circule tel un parallèle sonore où les idées externes au monde de Rogue Element se moulent bien timidement au patrimoine musical de duo Anglais.
Dès les premières mesures de Prelude 2003, nous sommes en plein territoire connu avec une lourde et lente séquence hypnotique qui avance pas à pas, accompagnée d’un synthé aux sonorités hybrides où des chœurs ténébreux vacillent dans une riche texture sonore hétéroclite emplie de solos tortueux. Une marche des mal-aimés qui déambulent dans une douce noirceur morphique où des sonorités biscornues composent avec un synthé lugubre qui ne laisse aucune place à une approche sereine. Une belle intro gothique qui explose d’une séquence s’agitant avec frénésie au dessus de cette toile sonore patibulaire. Une superbe ligne séquentielle aux parcours arythmiques qui dégage ce ciel embué des brumeuses caustiques qui réfléchissaient l’odeur morbide de son intro. Les mellotrons flûtés et oniriques viennent et vont dans ce délire cadencé qui s’épuise et pulse ses accords avec essoufflement, pénétrant une vague cosmique aux doux reflets de prismes carillonnés. Nous sommes à la 2ième portion de ce long titre et des éléments sonores plus galactiques que syncrétiques parsèment cette longue route aux hésitations sonores qui veillent sur un clavier aux accords baroques. Peu à peu, on sent la présence d’un séquenceur qui guette le relâchement de cet étrange désharmonie des sens pour frapper. Et la frappe est terrible avec des lignes séquentielles superposées qui subdivisent un rythme, tel un batteur peut le faire, dans un bel environnement sonore où les chœurs, plus angéliques cette fois-ci, foisonnent dans une divagation synthétisée aux souffles tant oniriques que symphoniques. Une superbe dualité dans les harmonies qui allie la sauvage présence des séquenceurs-batteurs aux langoureuses strates d’un synthé morphique aux sonorités hybrides. Un mélange de Rubycon et Encore que l’on ne se tromperait. Un très bon titre oublié qui est étonnant de richesse pour un album composé d’inédits. Composé avec la participation d’Adrian Dolente, Conserve the Preserve est une symphonie pour errance spirituelle où de lourdes réverbérations caustiques sillonnent un firmament musical empli de douces vapes d’un mellotron planant et de lamentations ocrées et enclumées. Une étrange approche morphique qui rejoint les intrigantes aventures du Baron Froese sur Macula Transfert où un habile mélange de sonorités composites se moule à des accords de clavier déviants et un dense mellotron aux errances brumeuses et aux lourdes ondes éthérées. Du Moody Blues transféré sur du Dream, en passant par du Pink Floyd; tout un arsenal d’éther pour un si court titre sombre et ambiant.
Composé avec l’aide de Mick Daniel d’Hashtronaut, Sequential Explorers nous présente un visage quelque peu différent de Rogue Element. Une ode pour guitare cosmique avec des riffs et solos fantomatiques sur un séquenceur aux minimalismes accords qui tambourinent et sautillent nerveusement dans les vapes d’un synthé hypnotique avec ses boucles en séries de souffles d’un hibou diurne qui ulule tout doucement. Tout tranquillement, Sequential Explorers s’évapore dans de lourdes réverbérations, des accords de clavier égarés et un mellotron flûté qui clôt cette escapade de Rogue Element sur des terres Krautrock. Un vent lointain, bousculé par des résonnances tirebouchonnées ouvrent les premières mesures flottantes de Down-Temp. L’atmosphère y est très éclectique avec des effets sonores multiples qui nous entraînent dans les effluves psychédéliques de Pink Floyd sur Welcome to the Machine. Une douce pulsation initie une lente marche funèbre qu’un mellotron très brumeux rend avec justesse. Des souffles flûtés dispersent à peine cette brume ocrée qui enveloppe mystérieusement la procession de Down-Temp qui s’anime peu à peu sur un fin mouvement séquentiel circulaire qui vrille en boucle, initiant une douce rythmique à la Software (Mergener-Weisser).
Cette 2ième mouture d’inédits que Rogue Element offre à ses fans sera les combler. On y retrouve tous les ingrédients qui sont fidèles à la musique du groupe, avec des additifs qui ajoutent une dimension quelque peu inconfortable aux premières écoutes, mais qui se révèlent être à la hauteur des complexités musicales de Jerome Ramsey & Brendan Pollard. Prelude 2003 et Down-Temp sont superbes et méritent amplement le détour, alors que Conserve the Preserve et Sequential Explorers déambulent avec attachement, comme dans un univers parallèle au monde musical de Rogue Element.