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The Afghan Whigs › Gentlemen

  • 1993 • Elektra 9 61501-2 • 1 CD

cd • 11 titres • 48:56 min

  • 1If I Were Going3:05
  • 2Gentlemen3:54
  • 3Be Sweet3:37
  • 4Debonair4:15
  • 5When We Two Parted5:47
  • 6Fountain and Fairfax4:21
  • 7What Jail Is Like3:30
  • 8My Curse (feat. Marcy Mays)5:45
  • 9Now You Know4:10
  • 10I Keep Coming Back4:52
  • 11Brother Woodrow/Closing Prayer5:40

informations

Produit par Greg Dulli, 1992.

line up

John Curley (basse), Steve Earle (batteur) (batterie), Greg Dulli (chant, guitare), Rick McCollum (guitare)

chronique

L’amour. Les femmes. Tout un programme. La soul est la musique qui aura jamais collé d’aussi près à ce sentiment, aussi loin qu’on puisse remonter. Et les disques comme Gentlemen, les groupes comme Afghan Whigs, ne peuvent parler qu’aux romantiques (et narcissiques) confirmés. J’aurais un peu le même problème que certains amateurs de Simply Red ont à partager leur tendresse, pour dire ce qui me fait bander ici, alors j’invoque seulement ce mot : Âme. Comme tous les combos de la vague ricaine fin 80's début 90's, les Whigs ont digéré (très bien même) les influences inévitables de tout ce que le rock/hard rock 70’s a eu de meilleur de Led Zep à Thin Lizzy, niveaux riffs et rythmiques on retrouve donc pas mal d’éléments qu’on aura déjà entendu chez les Red Hot ou Soundgarden, notamment cette aisance pour aller du funky au folk en passant par le hard rock avec une fluidité incroyable. Mais eux sont plus portés sur la soul comme on aime à le répéter à juste titre, définitivement : cette musique chaude, sensuelle et vivante, vibrante même, ils la portent en bandoulière près du cœur et rien d’autre ne nous vient plus immédiatement à l’esprit que "soulful" pour dire ce qui se dégage de ces chansons. Donc grunge pourquoi ? Comparer les Whigs de Cinicinnati à l’Alice de Seattle par exemple serait aussi vain que mettre R.E.M. et Life Of Agony dans le même panier, c’est un fait. La réponse est facile : une simple question de contexte comme souvent, d’époque, de mode, et la réputation de leur label d’origine (Sub Pop) plus que de genre. Je ne suis pas mécontent de voir que ce groupe encore perçu comme un second couteau soit réhabilité ou du moins redécouvert grâce aux Twilight Singers et Gutter Twins récents. Quand on ne connaît rien des deux formations précitées, il peut y avoir un haut-le-cœur, plus qu’avec les Screaming Trees et la voix de Lanegan, qui comme Nick Cave mettra toujours tout le monde d’accord sur sa beau-gossitude vocale et fera mouiller vos copines. La notion de classe est sensiblement différente, ici. C’est ce qui m’a été un peu révélé par les Gutter Twins, mais l’attitude de plus en plus ‘whisky, cigarettes & gospel’ d’un Lanegan finalement parfait dans son rôle de Tom Waits tous publics avait déjà trouvé depuis le début des années 90 son parfait contrepoids (ou du moins complément) en la personne de Greg D., frontman séducteur mais moins consensuel dont on imagine sans peine qu’il est genre d’homme à vénérer les chemises noires à demi-ouvertes et la drague façon Tom Cruise (depuis il a pris du poids, mais à quarante piges on se laisse aller). Le premier défi avec les Whigs consiste donc à encaisser la voix de Dulli, le Don Juan du rock alternatif. J’en connais qui n’y sont pas arrivés. Un type qui déborde autant d’amour et d’arrogance sans avoir peur du ridicule ne peut qu’intimider. Ou dégoûter. Les mauvaises langues pourront évoquer les roucoulades de Bryan Adams, voire Jon Bon Jovi, à travers ce chant de Casanova volontiers geignard, qui se donne pourtant tout entier sans sonner le moins du monde sur-joué ou faux. Faussement niais plutôt, et capable de s’effacer en mode crooner avant de charger en mode rocker à coups de phrases grivoises avec la puissance de persuasion et l’impudeur farouche d’un Glenn Danzig, le mec fascine indéniablement. Et puis sortir des débuts de ballade comme "Ladies, let me tell you about myself" en étant le plus sérieux du monde, faut quand même oser. Et roucoulades il y’a, pour sûr, de toute façon : et c’est ça qui est délicieux, qui fait pour beaucoup dans le charme des Whigs, parce que ces roucoulades puent la sincérité, le vécu, on est loin d’un rock FM sans âme même si on pourrait y penser à première écoute, il suffit de prendre la pleine mesure des arrangements, d’une finesse limite aristocrate, et des mots encore, quand par exemple notre flambeur lâche ce "indecision is MY enemy" complètement hanté, quand ailleurs il fait montre d'une ironie amère et plus loin fait face à ses démons. Difficile de croire à une feinte, rien que de la vérité ici, même si parfumée avec soin, même si agrémentée de sarcasmes, de provocations. Si Cornell est un donut triple saveur fraise-pistache-vanille, Cobain une petite gaufrette sympathique (d’ailleurs il a craqué sur la fin), Staley une carré de chocolat noir 75%, et Vedder un chèvre chaud au miel, tonton Dulli c’est la crêpe fine badigeonnée de sirop d’érable. Un sirop proche du sang, qui provient de ce palpitant malmené par des relations difficiles, qu’il exprime en gardant toujours ce sens de la distinction typique… celle des gentlemen, tout à fait. On sentirait limite l’eau de Cologne rien qu’en sortant le disque de son écrin. J’entends les mauvais élèves ricaner dans le fond. Laissez-vous donc porter par les anecdotes et pensées de l’oncle Greg, ce bellâtre au cœur d’artichaut. Ne riez pas. Appréciez simplement ce rock pur des années 90, qui transpire l’intimité, la langueur d’une fin d’été sur les terrasses des cafés, à repenser à ses amours de vacances, le cœur lourd. Si Gentlemen est pour moi le meilleur album des Whigs (suivi de près par 1965, plus travaillé mais un peu moins accrocheur), c’est parce que c’est celui qui allie le mieux toutes leurs qualités : immédiateté pop, ballades langoureuses, compositions discrètement alambiquées, portées par ce feeling terriblement singulier. Et puis c’est un peu à partir d’ici (donc de leur passage chez Elektra), qu’il se paient enfin une production digne, après deux premiers albums plus brouillons et un Congregation dont la pochette laissait présager un trésor. Celle-ci fera peut-être penser à celles des futurs Placebo, mais ce qu’il y a dedans est d’un tout autre poids. Dès l’intro la mélancolie serre la gorge, et puis il y a ces deux singles superbes ("Gentlemen" & "Debonair") qui restent ce que les Whigs ont fait de plus proche du tube - et les moments les plus pêchus de l’album, ah putain le refrain du titre épo, j'en ai la chair de corbeau rien que d'y penser ("UNDERSTAAAAND, do you UNDESTRAAAAND"). A ranger dans ce que les années 90 ont offert de plus grand, ni plus ni moins. C’est dans les morceaux les plus imprégnés de soul qu’il faudra trouver la partie "grower" du recueil, passé le coup de foudre avec les quatre merveilles alignées d'entrée de jeu. "I Keep Coming Back" est indéniablement le sommet à ce niveau : déchirant comme du Bill Withers, avec un Dulli impérial. Que ce soit dans ses relents bluesly ("When We Two Parted"), le groove splendide des guitares croisées de Dulli et McCollum, la basse discrète de Curley mise à l'honneur sur "When We Two Parted", le jeu de batterie taquin de Earle ou simplement les mélodies subtiles, cet album est un régal. Même quand il virent noisy, les Whigs font dans le feutré, toujours. Et même si l’album faiblit légèrement sur la fin, il faudra s’y prendre à plusieurs fois pour bien s’imprégner de ces ballades, que ce soit la piano “What jail is like” ou l’acoustique "My Curse" en duo avec la nana des Scrawl (qui me rappelle Marianne Faithful), ou encore plus simplement la fin du disque en violons et riffs tourmentés qui renvoie des sales relents de Tindersticks tenaces dans les tripes, putain que c’est beau. Dulli et ses boys nous invitent dans leur salon bien meublé, à siroter des single malt en échangeant quelques anecdotes sur nos conquêtes, en chialant un peu mais en gardant la tête haute. Entre amis, on se confie vite. Il est toujours temps de redonner leur chance à ces quatre messieurs de goût qui n’ont pas eu un succès mérité, et j’en vois une belle avec ce disque, leur plus efficace. Ici pas de son dégueulasse (même si les solos de guitare peuvent facilement donner dans l'écorché) ou de noirceur forcée. Il n'est question que d'élégance. Et de sensualité... à fleur de peau.

note       Publiée le dimanche 14 février 2010

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Note moyenne        11 votes

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Dun23 Envoyez un message privé àDun23

C'est assez classieux cette affaire, j'étais passé à côté complètement à l'époque. Ceci dit, pas sur que ça m'aurait parlé comme maintenant.

GrahamBondSwing Envoyez un message privé àGrahamBondSwing

Un chant désarmant...

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Seijitsu Envoyez un message privé àSeijitsu

Très soulful ce truc. Cela me rappelle un peu l'album de Temple of the Dog.

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NevrOp4th Envoyez un message privé àNevrOp4th

Ce disque est vraiment une merveille.

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Solvant Envoyez un message privé àSolvant

Eux & les Screaming Trees.. rien de plus class' à cette époque.

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