Squarcicatrici › S/t

Squarcicatrici est une ambitieuse formation dont le pied à terre est situé en Italie mais qui, pour son nouvel album éponyme, ouvre l’horizon de ses possibilités en y incluant pléthore d’invités venus d’un peu partout apporter des bribes de leurs couleurs locales respectives. Cosmopolite m’apparaît être l’adjectif qui sied le mieux à cette session d’enregistrement riche en rebondissements de toutes sortes ... Ouvrons le livre. Un Paolo Conté revenu du carnaval de Rio se perd dans le brouillard épais des docks à deux pas d’un marché clandestin chinois. Il assiste impuissant à l’assassinat d’un combo klezmer mort torché et aux abois, dégommés par les rafales d’une dizaine de mitrailleuses expectorant leurs douilles dans un cliquetis des enfers. Quand la fumée se dissipe, une danseuse espagnole au regard de braise apparaît, une rose plantée entre les dents. Les ondulations chaloupées de sa croupe semblent opérer leurs charmes sur notre homme lorsque, soudain, un rastaman surgit de nulle part les accoste pour leur refourguer sa beuh ... Oui, bah, euh, à force de vouloir se la jouer versatile, Squarcicatrici perd parfois le fil des histoires qu’il tente de raconter. Un peu comme dans "Le Magnifique", le film de Belmondo, vous vous souvenez ? L’atmosphère moite reste toutefois celle d’une bossa nova fatiguée, jouée par un ensemble qui jette à chaque fois toutes ses dernières forces dans la bataille. Tour à tour mélodieux, plaintif ou chaotique, Squarcicatrici séduira assurément l’amateur de jazz moderne, mais aussi tous les expérimentateurs de tous bords qui voient la musique comme le véhicule privilégié à l’expression de sentiments trop profonds que pour être traduits par de simples et si corruptibles mots. Un disque certes difficile à pénétrer, mais qui peut s’avérer gratifiant sur la longueur.