Tuxedomoon › Ship of fools

Encore une chronique de Tuxedomoon, encore une chronique difficile… Ce groupe est insaisissable, tout comme sa discographie, pas vraiment jalonnée par une suite d’albums « standard » de 40-50 minutes, mais plutôt peuplée de mystérieux EP, singles et autres disques concepts. D’ailleurs, ce Ship of fools, sous-titré « concert at home for your dreaming and dancing pleasure » (“gratos avec ça” ? pourrait-on rajouter ? Un concept fort alléchant en tout cas) n’est autre qu’un mini-album live, ce qui ne l’empêche pas de contenir des nouvelles chansons, disponibles nulle-part ailleurs… Le groupe, adepte de l’échange d’instruments entre les membres – ce live ne fait bien sûr par exception –s’applique encore une fois à brouiller toutes les pistes et à rester lointain, d’aussi près que l’on puisse s’en approcher. Comme un animal sauvage. La face A est formidable, s’ouvrant sur le magnifique Atlantis, une pop-song en robe de soirée dos-nu, mélodique et mélancolique à souhait, très proche de la pochette dans l’ambiance… Couleurs pastels, saxophoniste en ombre chinoise… Sans doute l’un de leurs morceaux les plus accessibles, rejoignant le meilleur de la pop européenne de l’époque. On ne s’en lasse pas. C’est presque dommage qu’ils prennent le contre-pied, comme à leur habitude, dès le morceau suivant, le plus uptempo et volontairement faux (dissonnant et disharmonique) Reeding Righting Rythmatic, sportif comme du Revolting Cocks. Break The Rules sonne le retour d’une ambiance nocturne et quelque peu festive, même si l’expérimental n’est jamais loin.... La face B déçoit un peu après ces 3 titres bien denses : elle est quasiment entièrement constituée de piano solo, certes superbement arrangé, mais on lui préfèrera la chansonnette The Train, qui clôt l’album… Même si la voix de Steve Brown commence à y sonner quelque peu banale et fade, à l’opposé de la musique. Le tout donne une sacrée envie de boire du gin-papaye. Quant à déterminer quelle facette exactement de leur art Tuxedomoon nous ont donné à voir avec ce mini-album : mystère et boule de gomme. Difficile de distinguer des périodes dans la carrière du groupe, mais une chose est sûre : ce disque a été enregistré pendant ma naissance. Un signe. Ou pas. Et si les notes de pochettes mentaient ?