Slug › S/t

Le label indépendant Off Records signe un joli coup en débauchant certains membres du Magma nouvelle génération : la chanteuse Himiko Paganotti et le claviériste Emmanuel Borghi, connu également pour son excellent projet One Shot. La formation est complétée par l’addition de John Trap à la guitare, ainsi que Gabriel Dilasser à la basse et, histoire de famille oblige, Antoine Paganotti à la batterie, venus prêter leur concours sur certains titres (l’évident exercice rock "Grey"). Toutefois, l’écoute de l’album risque de rapidement refroidir plus d’un fanatique transi puisque nous sommes ici aux antipodes des incantations hypnotiques qui ont fait la réputation du groupe de Christian Vander. Off reste cohérent dans son approche artistique, et c’est remarquable : la musique de Slug repose en effet sur un socle qui se nourrit aussi bien des musiques électroniques que d’influences jazz ("Dead Trees"). Même si on ne parvient pas à mettre le doigt tout de suite dessus, on sent d’emblée qu’il y a quelque chose dans cette collection de chansons franchement sombres où la voix de Himiko nous sert de guide. Des écoutes répétées permettent de s’imprégner davantage de l’atmosphère générale qui s’en dégage jusqu’à ce que, insidieusement, les mélodies tourmentées du trio nous habitent. On y trouve une langueur fantastique éclairée de cette voix féminine, capable de retenue comme de démesure, se laissant glisser sur des ambiances moites qui, contrairement à d’autres, n’ont pas besoin d’avoir recours aux samples coûte que coûte pour suggérer des sentiments troubles. Guitares, claviers et programmation électronique généralement suffisent. Les Inrocks n'hésitent pas à les comparer à Portishead. J'aimerais être moins expéditif et plus nuancé ; c'est plus volontiers à Pressure Drop que l'écoute du premier album de Slug me fait songer.