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Harvey Milk › Courtesy And Good Will Toward Men

cd • 11 titres • 70:18 min

  • 1Pinnochio's Example10:28
  • 2Brown Water08:57
  • 3Plastic Eggs06:28
  • 4My Broken Heart Will Never Mend10:43
  • 5I Feel Miserable03:48
  • 6The Lord's Prayer03:14
  • 7Sunshine (No Sun) Into The Sun07:21
  • 8Go Back To France03:04
  • 9A Good Thing Gone03:55
  • 10One Of Us Cannot Be Wrongreprise de Leonard Cohen [05:16]
  • 11The Boy With Bosoms06:59

informations

Enregistré en Décembre 1995 - Masterisé par Scott Hull

la réédition 2006 chez relapse contient un deuxième cd bonus, contenant 4 morceaux live enregistrés le 4 Mai 1996 au Bear's : 2-1 Pinnochio's Example (10:58) 2-2 Merlin Is Magic (5:01) 2-3 Come And Spit (6:01) 2-4 F.S.T.P. (13:21). A noter que Kyle Spence remplace Paul Trudeau à la batterie sur ces morceaux.

line up

Creston Spiers (guitares, chant, percussions), Stephen Tanner (basse, guitare [1-5]), Paul Trudeau (batterie)

chronique

Je suis de ceux que la musique à caractère "sombre", et plus encore "dépressif", a toujours bien fait rigoler. Il n'y a rien à faire, aux couinements rednecks de ce cher Jonathan Davis, j'avais toujours préféré la tristesse encore teintée d'espoir de Neil Young, où, avant cela, la lassitude moribonde mais jamais complaisante de Radiohead. En gros, la violence, symptôme d'un minimum d'extériorisation, ne pouvait s'accorder à la tristesse sans sonner faux où geignard pour moi. Mais Harvey Milk, j'avoue, m'a fait changer d'avis. Là, ok, j'admets, "Courtesy" est un monstre de souffrance et de peine. Alors avant de commencer, big up à une scribouillarde de Noise mag, Francoise Massacre pour ne pas la nommer, qui m'aura convaincu, par ses articles, de me pencher sur ce groupe miraculeux, véritable OVNI de la scène Sludge/Doom dont ils se tamponnent par ailleurs. En fait Harvey Milk, c'est 3 homos (ou pas ?) fans des Melvins, musicalement coupés du monde dans leur sud ricain, et qui ne manquent pas de couilles pour livrer une musique aussi crue et difficile dans une ville - Athens, Georgie - qui affectionne plutôt le rock indé. Rien que leur nom a de quoi impressionner, (Harvey Milk est un genre de Martin Luther King gay, pour résumer bêtement) surtout quand on connaît la bourinnitude et l'homophobie de la scène metal US. Un batteur ivre, un gratteux vomissant sang et boue, un chanteur en forme de gargouille dépressive essayant de s'extirper de cette même boue, voilà à qui on a affaire. Il y avait, faut croire, cette espèce d'odeur de soufre dans l'air en 95, pour que "Pinnochio's Example", le truc abominable, inhumain et poreux qui ouvre l'album, emploie le même cluster que celui qui nous saute à la gorge au début de Violenza Domestica de Bungle... En bien pire, et répété jusqu'à que ta tête explose. Sauf qu'Harvey Milk ose le coup du trou noir en milieu de morceau (le SILENCE, ce grand vide que les groupes "lourds" semblent craindre plus que Satan lui-même), avant de balancer son cri de guerre favori : "Woooooooooooooooï". Comment vous faire un dessin ? Vous voyez le chien tripède de l'ultime Alice In Chains ? Ben imaginez-le hurler à la lune avec d'autres potes estropiés. Et quand, au bout de 8 min 50, Creston Spiers pose les premières paroles du disque, d'une voix éteinte et au timbre liturgique, on comprend qu'on ne rentre définitivement pas en territoire ami. Torture, pénitence, larmes et désolation, voilà ce qui nous attend au fil de ce long, pénible calvaire. Il doit y avoir une part de voyeurisme sadique chez les amateurs d'Harvey Milk (de plus en plus nombreux depuis la reformation, alors que la première carrière du groupe s'était heurté à l'indifférence d'un monde encore loin d'être prêt), pour apprécier certains moments à la limite du soutenable. On pense notamment à la reprise du "One of us..." de Leonard Cohen (vous avez dit incongru ?), qui n'est rien d'autre que le son d'un homme en train d'expier sa douleur armé de sa seule voix rocailleuse (à ce stade là, c'est presque un canyon) et d'une seule guitare acoustique. Catharsis où exhibitionnisme malsain ? A vous de juger. Pour en revenir au début, Brown Water nous donne un premier aperçu de la sensibilité à fleur de peau des songwriters, avant de réaliser l'illustration sonore d'un éboulement de métal, qui intervient au moment où l'on s'attend le moins. Le morceau finit par prendre un envol épique ahurissant, façon "All Apologies" de Nirvana, mais en plus Doomy, et avec pas mal de décibels en plus. Et ce solo ! Depuis combien de temps un solo de gratte n'avait pas ému comme ça ? Harvey Milk nous prend par la main et nous amène dans une zone où plus rien ne nous fait rire, et où un solo complètement over-the-top qui s'achève en branlage de manche aigu arrive à nous faire sombrer la tête dans l'eau marron... Sorti du contexte, les multiples incartades grunge voire heavy du groupe feraient glousser, mais croyez moi, en écoutant le disque, on en mène pas large. Plastic Eggs, c'est un sludge melvinsien lézardé de breaks salopards, suivi par LE morceau du disque, voire du groupe : My Broken Heart Will Never Mend. 10 minutes de lourdeur instrumentale suprême, accompagné de solos d'une beauté à se damner. C'est le seul morceau où la douleur est transcendée, pour former une sorte d'expérience mystique, un Nirvana musical à écouter seul la nuit, en fixant un cerisier en fleur sous les étoiles, par exemple. Jamais une 6 cordes distordue n'aura sonné comme ça, jamais une batterie n'aura cogné avec tant d'amour, jamais une basse n'aura vrombi aussi ridiculeusement bas. Enfin, si, sur "Sunshine (no sun)", je crois bien que ça descend encore plus dans les graves, ce qui ne manque pas de pétillant pour une reprise de "I Want You" de Kiss qui s'arrête au bout de 20 secondes pour devenir une ode à la déformation et à la dissonance, hantée par des appels d'airs traversés de terribles sifflement spectraux. De toute façon, à partir de la ballade piano-voix The Lord's Prayer, la touche next devient votre meilleure amie, la paire de ciseaux qui coupe la corde de laquelle vous commencez à vous balancer sans même vous en rendre compte."Go Back To France" flirterait presque avec l'indus dans son mal-être, "A Good Thing Gone" se vautre dans son agonie, avec une petite outro façon enterrement, et "The Boy With Bosoms" achève en poursuivant l'extase de "My Broken Heart". Ah, et cet espèce de xylophone à la fois pervers et éperdu, cette richesse mélodique... Courtesy est un album incroyablement beau, mais aussi, dans le désordre : dépouillé, lent à en crever, sombre (un adjectif que j'économise), introspectif, cruel, insalubre et éprouvant à se taper d'une traite. On pourrait donner des repères, dire que ça se situe probablement entre les Melvins (véritables maîtres à penser du trio), Earth, Eyehategod (pour le son), et un Mark Lanegan à qui on viendrait d'assassiner toute sa famille sous ses yeux. Tout en donnant une LECON de lourdeur, de bruit, et d'intensité maléfique au 3/4 des groupes qui prétendent à ces qualificatifs. Harvey Milk, ça commence à se savoir : c'est comme un vieux calva : c'est minimaliste, ça a vécu, et ça fait mal par où ça passe. Noir chef d'oeuvre.

note       Publiée le dimanche 10 août 2008

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Cinabre Envoyez un message privé àCinabre
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Un classique.

Message édité le 19-02-2024 à 16:09 par Cinabre

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WZX Envoyez un message privé àWZX

"My Broken Heart Will Never Mend" en voilà un qui porte bien son nom : comment se remettre d'un morceau pareil ? Mystère. Et cette voix...

Cet album n'est pas encore dans le top des tops et ça je ne peu le toléré !

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WZX Envoyez un message privé àWZX

Ressorti en ce dimanche hivernal au brouillard épais. Mériterait le tag GoD en 30 albums, çui-ci. Allez, sortons-lui le collier de perles maison.

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allthatglitters Envoyez un message privé àallthatglitters

Si tu fais ta petite nature et que tu passes la première piste après ça coule comme un bon whisky dans la gorge.

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Cera Envoyez un message privé àCera

C'est vrai qu'au premier abord, ce disque est exigeant. J'avais même abandonné l'idée d'apprécier ce groupe, jusqu'à ce que je tombe sur "special wishes" et "Life...". Et la tout c'est éclairé. Ne passez pas à coté.

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