CCCP › Ecco i miei gioielli

Vous connaissez mon amour des groupes dark italiens; il était donc légitime que j'en arrive à parler d'une formation culte, témoin admirable de la particularité et de la créativité de la scène undeground transalpine des 80's: CCCP. Crée suite à la rencontre de Giovanni Lindo Feretti et du guitariste Massimo Zamboni en 1982 à Berlin, le groupe n'aura de cesse de fustiger les dérives de la société de consommation, l'abrutissement de masse, les mensonges de la communication, non sans un humour parfois mordant, jusqu'à la chute du Mur en 1989 où les deux compères changeront de nom de pour C.S.I (Consorzio Suonatori Indipendenti), poursuivant un parcours artistique basé sur les valeurs humaines, une recherche de justice qui se rit des frontières et des ethnies. Cette excellente compilation, si elle est loin d'être exhaustive, propose néanmoins un intéressant regard sur les diverses facettes du groupe. 'Citadine e citadini, questi sono i miei gioielli' annonce une voix féminine et 'The radio plays' de débuter sur un tempo relativement dub vaguement Clashien mais d'emblée la voix en italien donne cette coleur particulière qui personnellement me file le frisson à chaque fois. 'Inch'allah-ça va', interprété en français, se place dans une atmosphère cabaret/chanson, sensuelle mais profondément désenchantée également ('Est-ce que c'est dangereux ? On m'a volé mon âme...'). 'Curami' accélère le tempo, on est en plein post punk. CCCP a toujours su mêler les genres; très punk dans l'âme mais s'abreuvant également à l'obscurité du post punk goth et de l'anarcho-punk, se parant de touches new wave et d'une larme ethno (même si C.S.I développera davantage cet aspect). La pièce de résistance vient en une interprétation gothic rock de l'hymne soviétique. Suit 'Traffito', une pièce magnifique, au chant contestataire, scandé plus que chanté, oscillant entre parties mélancoliques et rapides. 'Tu menti' ? Du pur gothic rock à l'italienne. Si parfois le ton a l'air gentil comme sur 'Annarella' et ses accents proches du slow, l'ironie, voir la tristesse ne sont jamais bien loin, le morceau étant sorti à l'époque de la chute du mur, soit pour CCCP la confirmation de l'échec de l'utopie communiste. 'Svegliami' est typique de la méthode de chant de Giovanni sur un certains nombre de pièces: un couplet récité à toute vitesse puis glissement vers un refrain plus mélodique; le combo a toujours su habilement doser énergie et mélodie. 'Amandoti' renoue avec la touche cabaret mais en nettement plus prononcé avec accordéons, basse et un spleen absolu, palpable. Tout le contraire de 'Le qualità della danza' et de son thème de clavier très arabisant(appuyé par des percussions orientales)qui donne des fourmis dans les jambes. 'Palestina' use de cette technique mais pour des atmosphères nettement plus sombres. Pour que la visite soit complète, je vous parlerais encore de 'E verò' lui-aussi légèrement oriental dans ses inspirations (par la suite, C.S.I. voyageront beaucoup en Orient) et 'Rozzemilia', la chanson la plus punk de cette compilation, plus typique du CCCP des débuts. Manquent certes des pièces comme 'Libera me Domine' à l'orgue d'église, 'CCCP' et autres. Il n'empêche, 'Ecco i miei gioielli' est une carte de visite efficace pour pénétrer l'univers d'un groupe dont la musique est déjà tout un monde à elle seule.