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Tindersticks › Tindersticks II

16 titres - 70:24 min

  • 1/ El Diablo En El Ojo - 2/ A Night In - 3/ My Sister - 4/ Tiny Tears - 5/ Snowy in F# Minor - 6/ Seaweed - 7/ Vertrauen II - 8/ Talk To Me - 9/ No More Affairs - 10/ Singing - 11/ Travelling Light - 12/ Cherry Blossoms - 13/ She's Gone - 14/ Mistakes - 15/ Vertrauen III - 16/ Sleepy Song

informations

Ian Caple - Conny's Studios, Cologne / Abbey Road, Londres (enregistrement). Tindersticks & Ian Caple (mixage)

line up

Terry Edwards (trompette, saxophone, cor), TINDERSTICKS : David Boulter (claviers), Marck Colwill (basse), Neil Fraser (guitare), Dickon Hinchliffe (violon), Alasdair Macaulay (batterie), Stuart Staples (chant, guitare) + GUESTS: Heather Broadbent, Vic Evans, Zillah Hawley, Suzanna Horne, Tanja Housten, Becky Leetch, Caroline Luckhurst, Kate Mackenzie, Suzannah Marsden, Jeff Moore, Julie Nicholau, Louise Walters, Amanda Westgarth & Wey Witkins (violons), Hanah Bliss, Maritz Bulcock, Ann Louise Child, Kate Fraser, Samie Pullman (alto), Clare Parkholm, Annabelle Simmons, Andrew Skrimshire, Sarah Wilson (violoncelles), Mike Kearsey (trombone), Biff Harrisson (scie musicale), Isobel Monteiro (soupirs sur "My Sister"), Carla Torgerson (chant sur "Travelling Light")

chronique

  • pop orchestrale dépressive

L’automne, dans sa langueur et ses charmes grisonnants, m’a sans cesse rapproché de ce blues raffiné, pas du tout le même que celui du reste de l’année : loin des guitares saturées et des cris déchirés. Un blues plus confortable, moins douloureux mais tout aussi juste, un blues dans lequel je me suis maintes fois plongé avec délectation comme on s’enfonce dans un matelas douillet. J’ai revu ce même film mélancolique, ces mêmes scènes tristes et pourtant si belles qui défileront toujours dans ma tête comme autant d’instantanés : des jours passés à somnoler sur le divan, et des nuits entières à t’attendre, ô vile traîtresse, à attendre que tu me rappelles, stupidement, patiemment, à rêver de ton corps les yeux ouverts, à me remémorer nos enlacements et nos prières enfantines. Je sais pourtant que tu n’as jamais pensé à moi après que c’en fût terminé. M’avoir jeté sans te retourner ne semblait pas assez encore, il fallait que tu m’ignores puis m’oublie. Pauvre salope. J’ai été obligé de m’enfermer, de ne plus voir personne, de ne plus écrire parce que j’avais peur de ce qu’il y’avait en dedans, à l’intérieur de moi, peur de ce que je pouvais ressentir ou dire, peur des gens qui font tant de bruit autour et jamais ne se taisent… Tu ne sauras jamais ce que c’est, toi, de vivre ça. L’isolation, l’envie d’en finir pour continuer, et la télé allumée dont on ne fixe que le contour. Et l’appartement, dans lequel je reste cloîtré. Et les fugues intérieures. Loin des gens, loin de tout ce qui nous salit. Au rythme des averses, j’ai pleuré, mais au moins une voix venait me réconforter de temps en temps, une voix paternelle et rassurante même si elle savait faire mal en disant la vérité - car dans le blues, il n’y a jamais de mensonges – et c’est pour ça que ça fait du bien : parce que ça fait du mal. Quelle était cette voix, et d’où venait ce chant de crooner désolé ? C’était le père Stuart, cette voix ténébreuse qui m’a souvent évoqué ce qu’aurait pu être Nick Cave s’il n’avait pas choisi le Clergé comme lieu de rédemption. Une voix nonchalante et pataude, mais si grave, si sincère ; celle d’un homme fatigué, usé par les femmes plus que par l’alcool ; une voix brunie par le temps qui passe et les morts ensevelies. Il chantait sur un tempo tranquille, le plus souvent, allongé sur un tapis de violons, tantôt accoudé à un piano délicat, tantôt vautré contre des cuivres solennels. Les arrangements audacieux créaient comme un drap qui m’enveloppait, une sorte de grand rideau dans lequel je m’enroulais, me recroquevillais. S’il n’y avait que la guitare sèche pour égrener ses notes, je me sentais à l’abri aussi, comme blotti dans une alcôve éclairée à la bougie. Et si j’entendais une voix de femme chanter avec lui le temps d’un duo, cela ne sonnait pas comme une profanation mais au contraire comme un acte de présence : la femme peut prendre part au spleen masculin, la femme peut rentrer dans le blues car c’est à cause de la femme que j’en écoute. Quoiqu’il advienne de toute façon, j’étais envoûté. Tout semblait sortir d’un film, un vieux film romantique en noir et blanc – mais tout me paraissait si récent, si proche en même temps. Ces mélodies au parfum de spiritueux, parfois si lentes. J’aimais cette lenteur, cette fausse paresse et tout ce que ce voluptueux pathos pouvait m’offrir dans ma solitude. Et puis je m’endormais en ne songeant à plus rien, sinon aux lendemains assassins. Il arrivait souvent que le matin, au réveil, je le réécoute – parce que ça me faisait du bien. Les ballades, si longues et si belles, me berçaient, me cajolaient. Elles pouvaient être tragiques, et savaient toujours se faire crépuscule même si la lumière du jour passant par l’entrebâillement de la porte cherchait à les contrarier. Très intimes le plus souvent, il leur arrivait soudain de prendre une ampleur presque symphonique, quand les violons s’en mêlaient et s'unissaient pour les porter haut. L’atmosphère cafardeuse, le parfum capiteux et les promesses de l’aube se joignaient alors en un même mouvement : celui de la main qui referme les paupières du défunt. Avec calme et attention. Aujourd’hui, c’est le printemps, pourtant j’y goûte encore avec délectation, et à chaque fois je revois l’automne d’avant, les longues ballades en intérieur, et cette atmosphère feutrée qui empêchait tout débordement d’émotion, bridait la colère pour en faire un cataplasme chaud et enivrant. Ce disque a toujours été celui de la déprime élégante, ce que j’appellerais d’ailleurs la déprime en costar : celle qu’on peut vivre de temps en temps à la lueur des chandelles avec un verre de cognac à portée de main, un havane entre les doigts et un cendrier comme animal de compagnie. Celle qu’on savoure avec égoïsme, bien habillé pour l'apprécier comme un luxe et allongé sur le canapé en retenant ses larmes, dans l’attente de jours meilleurs qui ne viendront jamais.

note       Publiée le vendredi 4 avril 2008

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Aladdin_Sane Envoyez un message privé àAladdin_Sane

Un bout de temps que je n'avais pas écouté cette merveille.

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Aladdin_Sane Envoyez un message privé àAladdin_Sane

Il a longtemps été mon préféré celui-là, avant que je ne découvre tardivement "Curtains". De toute façon, le début de carrière de ce groupe est à saluer.

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SEN Envoyez un message privé àSEN

Perso j'écoute pratiquement que celui là !

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boumbastik Envoyez un message privé àboumbastik

Un mystère ce groupe pour moi. Encore aujourd'hui amoureux fou de leur 1er album, écouté des centaines de fois, je n'ai accroché à aucun de leurs albums suivants, et c'est pas faute d'avoir essayé. Dans aucun je n'y ai retrouvé l'intensité et les arrangements qui caractérisaient le 1er (sauf peut-être sur Curtains, allez). Encore plus bizarre, je les ai kiffés en concert alors qu'ils n'ont joué aucun morceau du 1er album. Va comprenDe.

SEN Envoyez un message privé àSEN

Mon premier Tinderstick ! Le meilleur ! Tiens je vais me le racheter en vinyle aussi moi !

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