Tad, c’est du grunge à la fois dégueulasse et pas méchant pour deux sous... Nan, en fait, Tad, c’est juste le grunge du purin et des aisselles, celui qui sent le tautiton (le saucisson qui fait titon) et le gros lard en marcel, le genre fan bedonnant de Motörhead qui suinte comme un porc devant toi pendant les concerts et dont l’odeur piquante t’assaille les narines sans retenue, jusqu’à t’en filer la nausée. Parce que Tad, ça schlingue ouais, et pas qu’un peu, même si ça peut sonner tout gentillet ou pas plus crade que n’importe quel groupe du « mouv’ » (entendez grunge). On pourrait les considérer comme les « vieux ragondins du greunj », ou les « vrais ringards de Seattle », compte tenu de l’influence seventies prédominante dans leur style (de Lynyrd Skynyrd au Creedence en gros). Leur blues ressemble à un pull-over miteux, leur groove à une paire de pataugas… Tranquille quoi. Hyper décontracté du gland, sur le hamac, bibine à la main, une bonne plâtrée de gruyère jaunâtre entre les doigts de pied. Emmenés par un leader charismatique aux allures de bûcheron dont le surnom est à l’origine de leur nom (putain ça rime, trop fort), les trois bonhommes s’en donnent gaiement, de toute façon leur rock ne peut venir que de Seattle et si tu connais le rock de Seattle tu n’seras point dépaysé mon Jeannot, le seul truc c’est qu’il sonne très barbu, bien plus poilu que celui de ses cousins - si tu vois où j’veux en venir. Pas si éloigné de Mudhoney dans l’esprit, mais beaucoup plus typé hardos… une sorte de rencontre entre les riffs lourdingues des Melvins et la beaufitude carnassière des Guns… Coool. La voix du gros Tad Doyle, à la fois rocailleuse et fluide, caresse nos oreilles en les tapissant de croûtes. Pas mal de titres sympas ou plus si affinité, dans cette belle gnôle gouleyante. "Jinx" est cultissime, le genre de tube qui t’accroche le colback illico presto et te pend aux porte-manteaux par les narines : riff hyper cool, un poil speedé, refrain post-it, emballé c’est pesé, merci monsieur le charcutier. Le terrible "Candi", pataud et possédé, le solo déglingué sur "Flame Tavern", les dissonances de "Wired God" et sa cacophonie finale, le pisseux "Stumblin’ Man"… miam miam ! "3D Witch Hunt", plus mélodique et posé, sautille gaiement et essuie les traces de morve sur le col du veston. A titre personnel, j’ai une nette préférence pour "Jack Pepsi", avec sa ligne de basse blindée, ses guitares en entrelacs malades et son rythme funky irrésistible, et "Crane’s Cafe", le genre de titre trépidant et vineux qui se collera direct dans le crâne du jeune rebelle à mèche paumé dans les rayons du Prisu, en manque de Desperados et de Smirnoff-citron. Oui, Tad, c’est aussi le grunge de tous les jours, le grunge qu’on confierait à tout le monde sans craindre de réaction de rejet, le grunge printanier et PMU-style, c’est un feeling tranquille et baveux, straight from the goulot of the bottle of vieille vinasse, qui n’exclu pas quelques écorchures bienvenues. Enquille-toi "Giant Killer" et son groove, ses riffs qui couinent, s’étirent et se dilatent comme des peaux de saucisse sous l’effet de la chaleur, sa batterie plam-plam (quand je dis plam-plam ça veut dire que ça claque), enquille-toi la ballade aux petits oignons "Plague Years", oh, comme c’est mimi, il jouent à sonner emo, ah ah ! Tad, c’est vraiment cool et ils pourraient jouer du FM que je m’en foutrais. On parle pas assez de ce groupe, et j’pense que si tu connais pas ces braves gars et qu’tu t’intéresses un minimum au grunge bah passer à côté ce serait bien con. Le mieux c’est de commencer par ce 8-way, ça te donnera une petite idée (pis à ton avis si je le chronique c’est pour faire joli ? Hein ? Bon)... Ambiances grailleuses et atmosphère propice à la cuite aux vieux rouge, des putain de riffs tantôt suinteux tantôt virevoltants, un groove très Melvinien, et un sens de la déconnade à s’en estropier du gallinacé au décapsuleur juste pour le fun, ça te branchera à coup sûr sauf si tu n’aimes pas les poils et la sueur et si t’as jamais eu de pote alcoolo du genre qui aime montrer sa bitte pour la faire claquer sur le comptoir, là tu pourras pas comprendre. Alors je résume pour les rangs du fond : Tad c’est le menu classique : cheveux gras, ventre lâche, vomi verdâtre, bonne humeur et mauvaises odeurs, le tout dans un emballage Leader Price du plus bel effet. Et comme dirait l’autre parasite ostrogoth dans Le Père Noël est une ordure : « oui, c’est un produit artisanal… c’est roulé à la main sous les aisselles. »