The Human League › Reproduction

Quand on voit actuellement la facilité à écrire un tube pop, quelques textes bidons collés sur une programmation, on en oublie parfois qu'à une certaine époque le maniement du matériel électronique était compliqué et coûtait fort cher. Pour les premiers groupes new wave de la fin des 70's, se proccurer et utiliser un synthé n'était pas chose aisée tant leur maniement était complexe. L'heureux paradoxe de tout ça fut de voir des formations souhaitant écrire de la pop boudées par le grand public ou reconnues dans l'underground de par une musique électronique jugée trop avant-gardiste. Citons notamment Gary Numan, Ultravox, Visage mais aussi The Human League. Ces artistes souhaitaient créer des morceaux qui ne devraient rien à l'héritage rock des USA et puiseraient dans des racines purement européennes...Ainsi naquit la new wave, style rompant tout lien avec les schémas du rock mais qui, à ses débuts du moins, surprit totalement le public pop par ses sonorités froides, ses feelings mélancoliques et une certaine audace de composition. Les débuts de The Human League furent donc laborieux et leur premier essai, 'Reproduction' ne rencontra qu'un accueil mitigé. En l'écoutant aujourd'hui, on réalise ce que la pop pouvait avoir de créatif à cette époque. Boîtes à rythmes sèches, claviers froids, sons synthétiques hérités de Kraftwerk mais mélodies efficaces et un bon chanteur, le jeune Phil Oakey qui cultivait alors un look vaguement androgyne. Les climats effectivement dégagent une sorte de gravité mélancolique qui étouffe vite la naïveté des textes ('Being boiled', la reprise de 'You've lost that loving feeling') pour tisser des ambiances prenantes, quelque chose de curieusement mature malgré son aspect spontané. Certes, les musiciens ne maîtrisent pas totalement leurs machines, les sonorités tournent un peu un rond et les essais expérimentaux ('Introducing', 'Dignity of labour') sont passablement ratés. Il n'empêche, des pièces comme les très bons 'Empire state human', 'Circus of death' , 'Blind youth' ou même 'Austerity/girl one' témoignent d'un potentiel qui se confirmera le temps de deux albums encore avant que The Human League ne cèdent à la facilité, sombrant dans une pop ennuyeuse et sucrée.