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SECRET CHIEFS 3 à l'Embobineuse, Marseille, le 28 Mai 2010

par Dariev Stands › jeudi 3 juin 2010

Les Secret Chiefs 3 dans la cité phocéenne... pfiouh, laissez moi souffler, déjà, laissez moi m'imprégner du pouvoir ésotérique dégagé par cette simple phrase... Foin de considérations cabbalistiques, auxquelles votre serviteur ne comprend pour l'instant pas grand chose (il est d'ailleurs loin d'être le seul puisque c'est le cas d'à peu près tout le monde) , les SC3 ont prouvé ce soir-là qu'ils étaient aussi capables d'envoyer la sauce harissa, et de faire se déhancher un public marseillais plutôt nombreux (pour l'Embobineuse, s'entend...) et chaud comme il se doit pour accueillir ces orientalistes impénitents... Et moi qui n'osais à peine espérer les voir un jour au festival Rock in Opposition, les voilà qui jouent à Marseille ! Je ne sais pas si, en leur temps, Mr Bungle avait joué dans cette ville si bucolique (big up aux apprentis pickpocket marseillais, dont un qui opère près du métro National, et qui n'a pas réussi à me gauler mon portable), mais les SC3 ont sué sang et eau - costumes de Jedi oblige - pour égaler les prestations légendaires du groupe culte dont fit jadis partie Trey Spruance, seul membre de Bungle à faire encore partie des SC3, puisqu'il en est le leader. D'ailleurs, tant qu'on parle de leur accoutrement si particulier, de ces costumes à capuche similaires à ceux des Jedi, sans doute pour évoquer un genre d'ordre secret et gnostique, il convient de se demander qui de SC3 ou de Sunn0))) les a utilisés en premier sur scène... Perso, j'ai ma petite idée sur la question, pas vous ?

SECRET CHIEFS 3 ( world gring / ex Mr Bungle / Revolver / San Francisco) FAT32 ( swing trash /duo clavier-batterie /gaffer rec / Lyon) CONGS FOR BRUMS (Concrete / Gothic Jazz / Brooklyn)

C'est donc accompagné du même gutsien (il se reconnaîtra, et je le salue) que pour Savage Republic, Marc, qui m'a une fois de plus très généreusement hébergé, que je me rendais à ce concert, après une collation locale que le monde entier nous envie - à savoir le Kebab sauce algérienne, exquis. D'ailleurs, Savage Republic et Secret Chiefs 3, la coïncidence est trop belle: c'est comme si l'Embobineuse avait cherché à accueillir les deux seuls groupes californiens à s'inspirer des musiques méditerranéennes et orientales ! Je m'attendais à quelque chose de lourd, de grand, d'épique, à une révélation quoi, eh bien je ne fut point déçu.

Passons sur les premières parties, comme trop souvent sans réèl rapport avec la tête d'affiche, et ce malgré le fait que Congs for Brums soit le projet solo de Ches Smith, le batteur des SC3, puisqu'il s'agissait surtout d'un HENAURME solo de batterie, passionnant il faut dire (si si!), mais nettement moins poétique que la musique de son groupe... Tout au juste cela nous a-t-il permis de frémir d'avance en constatant la force de frappe du gazier, et en observant son ombre projetée au plafond par un spot, qui le rendait semblable à un golem aux bras énormes et à la tête minuscule. à noter une cymbale placée à 1m50 du niveau du sol, pour une raison que je ne me suis pas encore expliquée (éviter de que les bouts de cymbales pétés lui giclent à la gueule ?). Il y eut ensuite FAT32, duo noise lyonnais (et pourquoi pas lillois tant qu'on y est, cong !), signé sur Gaffer Records, label qui semble sponsoriser l'embobineuse (ou l'inverse)... Alors ça n'avait strictement rien à voir avec la musique des SC3 mais Trey Spruance n'en a pas perdu une miette et a kiffé ! Fat32 fait un genre de noise/noise rock proche des norvégiens de MoHa!, mais sans gratte et en remplaçant le côté légèrement intello par une bonne grosse lampée de bon esprit franchouillard, et vas-y que je te fout des samples à la con de partout, que je te joue une version écorchée du canon de Pachebel entrecoupée de saillies bruitistes, et que je te démonte les tympans à coup de multiples pédales d'effets (dont une scotchée sous le pied, je pensait voir ça qu'en angleterre, bêtement)... Ils s'en sont donnés à coeur joie, ça crachait les décibels, et c'était jouissif. un peu longuet , peut être, vu le côté ultra haché et instantané de cette musique.

Après avoir décidé que nous ne prendrions pas le dernier métro (nous aurions raté les 3/4 du concert) et résolu de rentrer à pattes, nous étions fin prêt pour ce qui allait s'avérer être l'un des 5 meilleurs concerts de ma vie de chroniqueur. Ni plus ni moins. Le groupe, un peu à l'étroit sur la minuscule scène de ce garage reconverti, donne tout ce qu'il a à chaque seconde, dès les premières minutes, et ce malgré un son pas génial qui n'ira heureusement qu'en s'améliorant au fil du set. Pas de blabla avec le public, une attitude d'une humilité incroyable (et dire qu'ils font encore les toutes petites salles), et une chaleur qui ne fait que monter à mesure que toutes les compos cultes du groupe défilent, presque toutes celles du best of, et donc une large partie logiquement tirée de Book of Horizons, avec tout de même deux surprises : un genre de medley du dernier album, "Le mani restre...", vraiment excellent pour un début de set bien Surf comme il faut, et puis une version d'Exodus, célèbre thème sur la diaspora juive qu'on attendait pas forcément au beau milieu d'un concert plutôt heavy et très rythmé ! Le résultat nous a soufflés comme des grains de riz, la mélodie d'abord pleurée par le violon en intro, puis cette envolée, ce mélange de lourdeur et d'emphase glorieuse et orchestrale, rappelant le "The Anvil Will Fall" de Harvey Milk, mais en mieux ! Sans hésitation le moment le plus émouvant du concert... Mais pas le seul. Car partir en transe sur un morceau comme Hurqlaya, au bout de plus d'une heure de concert, et voir les gens adhérer pleinement à cette musique (même celui qui criait "joue Zelda" avait en somme capté l'esprit), ça n'a pas de prix... Pour tout le reste, c'est pas qu'il y a eurocard mastercard, mais c'est que finalement, il n'y pas tant de choses à dire, si ce n'est que chaque titre était sublimé, parfois joué avec de subtiles variations sur les "guitares" non homologuées de Spruance, mais en gardant toujours ces rythmiques hallucinantes, ici jouées avec une violence inouie, un batteur qui a besoin de parpaings pour caler sa grosse caisse, et un bassiste qui envoie de grosses doses de Zeuhl tranquille dans son coin... Je maintiens que ce groupe ferai un tabac au festival Rock In Opposition, et se situe dans la droite lignée de l'esprit renvendiqué par Roger Trigaux, et fi des barrières continentales, car après tout, les Secret Chiefs 3 sont en quelque sorte dans leur élément à Marseille, ce que confirmera Spruance après le concert, qui discutait tranquillement derrière le stand cd. Je lui ai d'ailleurs promis de lui reparler par email de l'Enfance Rouge et de Kampec Dolores, qu'il ne connaissait pas... Ceci non pas pour me la jouer mais pour vous inciter également, vous qui me lisez, à vous pencher sur ces deux groupes, qui mélangent musiques orientales avec un certain rock assurément en opposition, tout comme les SC3, mais pour des résultats radicalement différents. On pourrait encore ajouter Savage Republic, Mahmoud Awad (non, pas Mahmoud Awad, pitié !!!), ou tout simplement certains passages de Mr Bungle... D'ailleurs, pour ceux que ça intéresse, un article de ma confection sur eux est lisible ici : http://freakscorp.over-blog.com/pages/Mr_BUNGLE_musique_pour_Serial_Killers-2866035.html

Mention spéciale au maître de cérémonie de ce concert, un mec déguisé en travelo nous pondant des discours hilarants et de plus en plus enflammés avant chaque set (jusqu'à s'emballer complètement pour les SC3, ce qui est la moindre des choses). Le genre de détails qui font de l'embobineuse une salle à part, avec la sympathie du personnel, le prix d'entrée dérisoire pour le sol français, et les picon-bière (pas de pastis par contre, t'y es pas fada ?)... Une salle à soutenir, coute que coute.

"abd-al-hakim a toujours le regard dirigé vers l'Est ..."

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Dernière mise à jour du document : jeudi 3 juin 2010