Rudy Adrian › Par Avion

Voici le dernier volet de la série ‘’Sequencer Sketches‘’ où Rudy Adrian mélange ses douces atmosphères à des harmonies séquentielles souples, minimalismes et mélodieuses. Sans être un album concept, le synthésiste néerlandais débute et termine Par Avion sur une vieille trame de cinéma français, avec tous les pastiches et effets sonores qu’on peut y coller, tout en nous dévoilant ses visions musicales.
C’est avec les bruits d’une bicyclette de postier, qui serpente un sentier égayé par des cris d’oiseaux, que s’ouvre la pièce titre, Par Avion. Une femme y lit une lettre, alors que l’ambiance trempe dans un décor flottant où le synthé module un air de tristesse et de mélancolie. Graduellement, le tempo augmente sur un fin mouvement séquentiel aux cadences hypnotiques, comme un battement flottant au milieu des stries vrillantes et des accords d’une guitare léthargique. Un vent lointain pousse les premiers gémissements de Bavarian Eagle. Enrobé d’une teinte flûtée, le mouvement se module en un délicat dandinement aux synthés harmonieux et à la cadence progressive, qui à chaque fin de rotation augmente l’intensité. De beaux solos parsèment cette 1ière partie de Bavarian Eagle, avec de fines vrilles et une séquence plus vivante aux approches érodantes. Un excellent exemple de titre migratoire qui puise son design dans les griffes des mouvements minimalismes. En délicatesse, la cadence ralentie pour entreprendre une migration musicale très près de Crystal Lake de Klaus Schulze. Un beau morceau.
Across the Canyons est aussi poétique que son titre. Un fin mouvement ‘’landscapes’’, à la Steve Roach, inondé d’effets sonores aux froissements métalliques, autour d’un synthé aux rotations accentués et mus par la violence des souffles.
Un doux piano harmonieux sirote l’espace, mêlant ses accords à ceux d’une guitare et un délicat synthé qui enrobe Soaring Bird d’une ode aux essences orientales, soutenu par un séquenceur au mouvement hypnotique. Un titre aux rythmes en cascade, comme Par Avion, qui termine son parcours dans la sérénité éolienne. Sore Birds termine Par Avion avec une intro sombre aux battements lourds et menaçant. Caché par un vent acide et un tempo minimalisme, une superbe séquence aux vrilles échotiques remoule la structure, avec une agressivité très rare chez Rudy Adrian. Un titre aux limites de l’électronique psychédélique et progressive avec des sonorités de guitares acérées et distordues, des synthés voraces aux ondes destructives et un séquenceur lourd, névrosé aux percussions éclectiques. Le tout se termine dans la pièce de notre française mélancolique, que seul les chants d’oiseaux parviennent à capter la vie.
Starfields II est une lente ascension atmosphérique que Rudy Adrian entend explorer un peu plus dans ses prochaines compositions. Une belle nappe flottante aux modulations très souples, qui oscille entre les styles de Steve Roach et Michael Stearns. Sans séquenceur, ce lent mouvement de 30 minutes évolue aux grés des souffles synthétiques et des sonorités paysagères (landscapes), qui modulent dans l’imagination créative de Rudy Adrian.
Par Avion dépeint à merveille l’union des atmosphères à des séquenceurs sans frontières. Rudy Adrian embrasse toutes les étapes de la tendresse et la peine à la démence et révolte. Une belle histoire musicale, à laquelle on peut aisément y écrire notre scénario, où les harmonies côtoient un monde musical légèrement complexe, mais pas assez pour y perdre tout intérêt. Une belle façon de découvrir un artiste contemporain qui aime explorer toutes les facettes d’une musique sans frontières.