Vous êtes ici › Les groupes / artistesPProject Pitchfork › Io

Project Pitchfork › Io

cd • 11 titres

  • 1Io
  • 2The gate
  • 3The silver thread
  • 4Carrion
  • 5The seeker
  • 6The swamp of secrecy
  • 7Terra Incognita
  • 8Renascence
  • 9Antidote
  • 10Equilibrium
  • 11Conclusion

informations

line up

Peter Spilles (chant, musique), Patricia Nigiani (musique, chant), Dirk Scheuber (musique)

chronique

Un coup d'oeil à la pochette suffit, 'Io' a toutes les chances d'être pour Project Pitchfork l'album de la maturité, ce que confirme l'écoute. Nos Teutons ont réussi à composer un disque plus mélodique, fouillé au niveau des atmosphères, sans perdre pour autant l'énergie noire des premiers opus. On sent simplement qu'ils maîtrisent totalement leur matériel et qu'ils ont une idée précise de ce qu'ils veulent obtenir. Du coup, l'héritage EBM a étouffé une part de son agressivité pour ne conserver que l'efficacité du rythme et l'aspect sombre a pris le dessus. Peter Spilles module davantage sa voix, sait la rendre moins sauvage ('The seeker') ou au contraire l'appuyer quand celà est nécessaire. Le travail sur les sonorités est très bon, sur des rythmiques travaillées, le groupe sait poser LA petite touche mélodique imparable ('The swamp of secrecy', 'Terra Incognita', 'Renascence'...). Ainsi, Project Pitchfork n'est pas seulement une machine à produire des tubes pour les dancefloors mais bien un groupe capable de décliner une palette d'émotions plus large. Même si cet aspect ne sera pas celui privilégié pour la suite de leur carrière, 'Io' reste leur chef-d'oeuvre.

note       Publiée le jeudi 23 février 2006

chronique

Yo. S'il me faut puiser dans les découvertes que je dois au pilier de Guts of Darkness, le seul d'entre nous ayant continuellement nourri notre site en chroniques depuis plus de vingt ans ? J'en choisis une qui est restée dans son coin d'archive, telle cette fève charnelle lovée dans ses branchages. Une qui semble avoir été oubliée, peut-être parce que la passion brute de fruit de notre gothique stakhanoviste n'avait pas encore atteint maturité (au moins contrairement à l'auteur de ces lignes était-il concis) ? Regardez : 5 votes en dix-huit ans, 5 commentaires. L'humain est décevant, autant parler aux étoiles. Ce fœtus fantastique est resté au congélateur, ou plutôt en sommeil cryogénique, biostase de voyage spatial, à dériver dans ses songes fluctuants, au gré des blasts organico-synthétiques de sa dark electro mystique, mue par des mécanismes fascinants, nourrie aux rêves de voyages intersidéraux et intérieurs...

Secret bien gardé de la darkwave teutonne, Io est un disque rare et précieux qui vous envoûte depuis son alcôve biomécanique, ses inspirations new age-SF bien amalgamalaxées, dès la majestueuse "The gate". Si on pourra pointer quelques gimmicks enquiquineurs ou intonations pour le moins saugrenues (tel ce sample crypto-vomisseur sur la sublime "Antidote"), si on pourra tiquer sur le chant très particulier de l'énigmatique énergumène Peter Spilles - aux relents batcave fort éloignés de son cousin apparent Eskil Simonsson - malgré la fantastique richesse des modulations et effets sur sa voix lui donnant ces airs de métamorphe omniscient, rien de tout cela ne fait poids face à ce qui meut ce messie-album, qui n'apparaitra qu'aux snobs et aux cœurs rances aussi fumeux qu'un billet astrologique d'Elizabeth Teissier : la grâce jusque dans la débilité synth-pop-EBM la plus décomplexée, le raffinement jusque dans des beats éligibles aux sessions gym-tonic. La beauté jusque dans l'expression d'une abjection, la lumière dans des containers enfouis. Et surtout : la candeur absolue des mélodies ("Renascence"), qui sont ici reines déesses. Et mine de rien, cette richesse d'inspirations, canalisée dans des tubes underground aux airs de visions fantasmagoriques. La "dance-darkwave" qui se répandra jusque dans les samplers D-Side et Elegy n'a pas encore gâté leur mixture, se situant grosso mood-o quelque part entre Skinny Puppy et Vangelis (celui de Blade Runner mais aussi des Charriots de Feu), mais l'aspect "secte des dancefloors goths" est déjà présent sous une forme pure, brute d'aventure, une electro gothique qui fourmille d'idées et de sons, hérités des années 80 et pas encore noyautés par le tuning beauf des années aggrotech/futurepop (même les relents nunuche-la-praline de "The Silver Thread" touchent)... Loin des calculs faciles, comme s'ils ne cherchaient à plaire qu'à eux-mêmes, à leur vision, à leurs rêves de jeunes êtres humains, autrement qu'à une quelconque mode ou scène, les aliens allemands signent leur magnum opus. L'alchimie à l'œuvre ici est plus que singulière : elle est unique. Cet album qui est sorti en 1994 est hors du temps. Hors de considérations comme "kitsch" ou "mauvais goût". L'électronique se pare de romances difformes, contaminée de soies fines, de liquides minéraux précieux, elle a ce grain végétal, charnel, réel, le club aux corbeaux se confond avec un vaisseau en partance pour on ne sait où... mais haut et loin. C'est beau.

Sous les cartomancies et les constellations scintillent des trésors de poésie, dont je m'émeus même des miasmes. S'enchaînent les perles-hymnes au fil des dimensions entrelacées : l'imparable "Carrion", "The Seeker" et sa folk batcave abstraite aux relents Virgin Prunes dans un bunker muant en bourrinage ministrien étouffé, "Terra Incognita" et ses chœurs d'aliens infantiles et ses synthétiseurs en crème épaisse sur mes songes, la porte des étoiles ouverte par "Antidote", la ronflante et solennelle "Equilibrium". Abstrait, émotionnel, sublime. Et que dire de "The Swamp of Secrecy" ? Si vous ne l'avez jamais entendue, vous l'avez toujours connue. "Renascence" aussi, encore, plus mielleuse que la Grande Ourse et neuneu-doudou que le générique des Moumines, mais que voulez-vous ? Cœur d'artichaut ressent émotion. Merci, Project Pitchfork, pour ce seul chef d'œuvre de votre carrière... Et merci à Twilight, ou désormais Shelleyan, pour ses 5000 chroniques ("!!!"), merci pour cet énorme pan de notre archive assemblé avec la patience d'un Facteur Cheval, et avec cette régularité confinant au superpouvoir, à m'en inspirer des tirades faciles sur la fiabilité des horlogeries helvètes... Mais es-tu seulement d'ici, suisse ? Tu es d'ailleurs, comme Starman, comme ce disque... 5000... C'est plus qu'un nombre de chroniques, mon frère, c'est une galaxie, à laquelle je souhaite rendre hommage en choisissant cette étrange et familière lune de Jupiter... Io.

note       Publiée le vendredi 22 mars 2024

dernières écoutes

Connectez-vous pour signaler que vous écoutez "Io" en ce moment.

tags

Connectez-vous pour ajouter un tag sur "Io".

notes

Note moyenne        7 votes

Connectez-vous ajouter une note sur "Io".

commentaires

Connectez-vous pour ajouter un commentaire sur "Io".

Raven Envoyez un message privé àRaven
avatar

Gute reise, Cyb !

(Ici j'avais peur qu'il perde en force avec les années, que du contraire :D)

Note donnée au disque :       
cyberghost Envoyez un message privé àcyberghost

Oyeoye ! Voilà qui donne bien envie de se le ressortir ^^

born to gulo Envoyez un message privé àborn to gulo

... wesh

Note donnée au disque :       
Shelleyan Envoyez un message privé àShelleyan
avatar

Plaisir intact

deadmoney Envoyez un message privé àdeadmoney

Un album extraordinaire, au sens propre: il est unique non seulement dans la discographie de Project Pitchfork, mais il l'est aussi plus généralement, vis-à-vis de ce qui se fait généralement dans l'EBM/New Wave/etc. Rien dans l'album n'est à jeter, et deux chansons en particulier méritent d'être recommandées plus que les autres: "The Gate" et "Carrion" (qui a d'ailleurs son propre single, mérité). Vraiment dommage qu'aucun autre album de ce groupe ne soit aussi bon que celui-ci.

Note donnée au disque :