Milford Graves › Meditation among us

J'ai déjà eu l'occasion d'en parler ici, en 2003, Universal Japan eut la bonne idée de republier une douzaine de titres dans le cadre d'une série baptisée pour l'occasion Hardcore Jazz. On y retrouve le Globe Unity Orchestra, Don Cherry, Derek Bailey, Pharoah Sanders, Sun Ra, Cecil Taylor. Bref, que des références. Et au milieu de tout ça, "Meditation among Us" de Milford Graves. Batteur free qui passerait pour discret si l'on devait s'arrêter au nombre peu conséquent de disques à avoir été publiés sous son propre nom depuis qu'il exerce ce métier, Milford Graves compte néanmoins parmi ses représentants les plus tumultueux, aux côtés de Rashied Ali ou Andrew Cyrille, avec qui il collabora du reste... Remarqué pour l'intensité de son jeu, Graves a presque tout du sorcier, apportant ce petit côté tribal aux rythmiques fondamentalement swing qu'il porte à bout de bras, sorte de relais entre le Art Blakey de "Orgy in Rhythm" et les cartes postales de Collin Walcott en provenance de l'Hémisphère Sud. Pour ce "Meditation among Us", Graves s'invite au sein d'un quartette japonais étonnant car dépourvu de contrebassiste. Aux trois solistes - saxophones et trompette - il vient gonfler les rangs d'une section rythmique déjà bien solide assurée par Toshiyuki Tsuchitori. Même si la configuration est radicalement différente, cette session me fait songer à l'album "Clay" du Yosuke Yamashita Trio paru à la même époque sur Enja ; un disque débridé, complètement décomplexé, où ça explose dans tous les sens. Il y a bien certaines pauses au sein des deux morceaux, le temps pour Graves de changer de siège et de passer de la batterie au piano, mais dans l'ensemble, aucun des intervenants ne semble se soucier de l'espace qu'ils pourraient laisser aux autres. Pas beaucoup de nuances à vrai dire, et c'est bien dommage, le quartette nippon semblant batailler dur pour essayer d'exister en tant que tel face à un Milford Graves qui, à juste titre, mène les débats. Convenable sans être génial, contrairement à l'énoncé, "Meditation among Us" n'incite pas à la tranquilité d'esprit.