Talvin Singh › Ok

"Ok" est un album qui fera date. De ceux sur lesquels on se retournera pour illustrer une époque, une étape importante qui amena des changements durables. C'est sur le tard que Talvin Singh se décide à publier son premier disque de musique originale puisque jusqu'alors il s'était surtout fait remarquer comme musicien studio, apportant aux enregistrements de Bill Laswell, Adrian Sherwood ou Björk, pour ne citer que ceux là, les touches indiennes requises. Et c'est sans doute nourri de ces expériences forcément enrichissantes que le jeune anglais d'origine indienne a fini par se dire que cela était possible. Car "Ok" n'est rien d'autre qu'un disque de musique indienne passée par le filtre des technologies modernes. Vous lisez bien ; une musique indienne sur laquelle se sont greffés des arrangements électroniques, et non l'inverse ! De sa vie nocturne, Talvin Singh a gardé le goût des rythmes brisés de la drum'n'bass. Celle-ci étale son influence décisive sur tout le disque, et plus particulièrement sur les pièces "Butterfly", "Sutrix" et "Eclipse". Enrichis de percussions indiennes, ces titres en deviennent d'autant plus indomptables. Quant à "Traveller", qui ouvre le disque de la manière la plus convaincante qui soit, il est quasiment impossible de ne pas être instantanément subjugué par la magnifique orchestration qui referme sa marche glorieuse. La seconde moitié de l'album tend à proposer un discours moins agité, finalement plus proche d'une forme de trip hop parfumé au santal. Ryuichi Sakamoto fait plus que prêter main forte à Talvin Singh ; il met à sa disposition les fabuleuses choristes qui avaient illuminé son album "Beauty" en 1989, et cela nous donne le mystérieux "Soni" et sa toute aussi belle plage titre. "Ok" est une réussite qui eut entre autres effets positifs de pousser à ce que l'on s'intéresse enfin d'un peu plus près à la communauté indienne de Londres qui a pourtant toujours été très active (Asian Dub Foundation, Fundamental et le label Outcaste). Depuis, beaucoup se sont entichés d'adapter ce style, même le label Realworld ("Joi"), mais personne n'est encore arrivé à faire mieux que l'original.