Adrian Belew › Desire caught by the tail

Après s'être donné en spectacle avec l'épisode King Crimson qui semble alors avoir été mis définitivement au placard, Adrian Belew revient en force avec un album tout simplement invendable. À se demander comment Island a pu laisser faire l'artiste sans y mettre son grain de sel ! Ce sera tout de même sa dernière contribution pour le label, et on comprend pourquoi. Alors "Desire Caught by the Tail" est-il encore un de ces disques de fin de contrat, du type "Zero Tolerance for Silence" ? Peut-être bien. Plus encore que pour Pat Metheny, pour qui l'exercice fut pour le moins inhabituel, Adrian Belew n'a jamais su trouver le parfait équilibre entre les ficelles pop et l'expérimentation à tout va, deux approches musicales, plus complémentaires qu'on ne le croit, entre lesquelles il restera à jamais tiraillé. Ici, vous l'aurez compris, il s'abandonne volontiers à la seconde. Ce fanatique de Fender Stratocaster et du tremolo qui l'accompagne s'amuse ici comme un enfant à créer de longues plages instrumentales aux sons synthétiques bien dans l'air du temps, à rapprocher peut-être des exercices solo réalisés à la même époque au Synclavier par un de ses anciens employeurs, Frank Zappa (l'album "Jazz from Hell" particulièrement). Le procédé d'écriture de Belew ne découle pourtant pas ici d'un travail de composition mais plutôt d'une recherche texturale de tous les instants, dans une série d'effets alors inédits et dont le parti pris extrême s'illustre le mieux sur "Guernica". Adrian Belew orne ses bandes superposées, modifiées et/ou inversées de différents effets percussifs qui aident à ne pas se sentir totalement dépaysé. L'échec cuisant de ce disque tiendra pour longtemps à l'écart Adrian Belew de toutes autres formes d'expérimentations en dehors du cadre pop. C'est pourtant dans ces moments d'intense inventivité que Belew a le plus de choses à nous apprendre.