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Programme › L'Enfer Tiède

cd • 8 titres • 35:46 min

  • 1Il y a
  • 2Une vie
  • 3N'importe quoi pour n'importe qui
  • 4C'est bien
  • 5Cette page d'histoire
  • 6Entre deux feux
  • 7Le Sort
  • 8Et la ville disparait

informations

line up

Arnaud Michniak (paroles et musique), Damien Bétous (musique et programmation).

chronique

"Mon Cerveau dans ma bouche" avait été un coup de poing dans la gueule; "Enfer Tiède" lui équivaut à rouer de coups la victime juste tombée. "Bogue" sera le journal intime d'un schizophrène; "Enfer Tiède" est le disque d'une génération ratée. Le "je" et le "tu" sont remplacés par le "on". Programme parle à un public déjà acquis à sa cause, et en profite pour aller encore plus loin dans le nihilisme et l'ultra violence textuelle. "Enfer Tiède" est à la musique ce que Wolfgang Paalen et Francis Bacon sont à la peinture, Gaspard Noé et Michael Haneke au cinéma ou Lautréamont et Antonin Artaud à l'écriture: un OVNI sombre plus sombre que le plus sombre des trucs sombres. Vicieux et intelligent. Il faut dire qu'en commençant l'album avec "Il y a" et en le finissant par "Et la ville disparaît", il ne fallait pas s'attendre à du Vincent Delerm. "Il y a" et sa longue descente sonore dans les graves, cette voix qui radote "on a raison de faire ce qu'on fait, de penser ce qu'on pense, d'être ce qu'on est, de continuer dans le même sens", cette faculté à observer et à dire… "Et ça c'est une clocharde… p'têt qu'on l'a écarté parce qu'elle buvait trop ou qu'elle s'est mise à boire après"… La peur des autres, l'angoisse et la frustration face à sa propre image, la remise en question qui nous "fait peut être plus de mal qu'on en mérite"… "Et peut être qu'on ne souffre pas vraiment tant qu'on ne souffre pas physiquement". Se sentir à l'écart, inutile, de ne pas avoir l'impression d'être compris, par fainéantise des autres ("les gens croient nous connaître mais non, même nos proches"), se sentir coupable, de quoi ? "Et si on ne nous avait pas fait souffrir on ne connaîtrait pas la souffrance, et si on ne nous avait pas menti on ne connaîtrait pas le mensonge ". EST-CE QUE TU CONNAIS CA, TOI ? J'aimerais te voir prendre "Une vie" en pleine gueule, avec ce piano dissonant, hypnotique, cette batterie puissante, et ces paroles toujours plus… "UNE VIE OU PLUS ON REFLECHIT, PLUS ON SE DIT QU'ON AURAIT PREFERE UN FUSIL". Supporte "Entre deux feux", et sa contrebasse géniale, où Michniak évoque les femmes, une première depuis Diabologum. Mais ne t'attends pas à du romantique, ici c'est pour souffrir et regarder notre misérable condition: "On a connu plusieurs filles, certaines voulaient faire de nous le père leurs enfants, mais nous on voulait pas… ni s'accrocher à elles, même quand elles étaient belles". Le flow est génial, entraînant comme une leçon de vie: "En bon rejeton de la classe moyenne, celle qu'on a demissioné après avoir compris que la renvoyer coûterais trop cher… on est pas solidaire. La collectivité et nous c'est fini". Les 7 titres de cet enfer musical sont tous des sommets textuels, les meilleurs sans doute de Michniak. Musicalement, Bétous fait de véritables merveilles, avec des jongleries ahurissantes sur les samples, un travail de basse d'une réelle inventivité, des rythmes originaux, etc… Tu vas me dire que j'ai omis le 8e titre, et c'est normal. Bétous y joue du saxophone dissonant, et Michniak y déballe ses paroles avec une violence et une force jamais entendue. Seulement, ce titre est tellement surréaliste que je ne peux même pas t'en parler. Tout simplement parce qu'on ne peut pas écrire une chronique qui soit à la hauteur des sommets de Programme. Alors, si tu veux faire l'effort de comprendre, si tu as le courage d'affronter tes défauts, si tu n'as pas peur quand on te hurle dessus, si tu crois être fort, si tu es égoïste, si tu es sensible, si tu crois avoir tout vu, tout entendu, tout lu, si tu ne t'aimes pas, si tu n'aimes pas les autres, si tu n'aimes pas leur hypocrisie, leurs mensonges, leur lâcheté, leur ignorance, leur soif de pouvoir, leur morale, leur capacité à te manipuler, si toi-même tu te leurres, si tu as peur des filles, si tu angoisses avant de dormir, si tu ne te sens pas à ta place ici, si tu te sens à l'écart, ignoré, aliéné par la société, si tu n'as pas peur de mourir, si tu as honte de toi, si tu as envie de te flinguer mais qu'il te reste une once de force pour te battre encore un peu, alors écoute ce disque et serre les dents.

note       Publiée le vendredi 4 février 2005

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Ntnmrn Envoyez un message privé àNtnmrn
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"Et la ville disparait" c'est du Scott Walker !

Damodafoca Envoyez un message privé àDamodafoca

15 ans plus tard, je mets un nom sur la technique qui permet la réalisation d' "il y a". https://pcd.wikipedia.org/wiki/Jean-Claude_Risset

mangetout Envoyez un message privé àmangetout

Une fois le débroussaillage effectué, élaguant une bonne partie des conneries "adulescentes" nihilistes, j'avais perdu le souvenir que "Une vie" était une putain de chanson.

Raven Envoyez un message privé àRaven
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" La seule chose qui promet...
...
C'est de continuer jusqu'au bout...

Note donnée au disque :       
Procrastin Envoyez un message privé àProcrastin

"The Lobster" de Yorgos Lanthimos ( dont le Canine était excellent aussi) m'a fait découvrir Alfred Schnittke: coup de foudre, donc je parcoure. Et puis voilà que ceci m'est très familier dans les deux dernières minutes ; Étonnant, non?

Et pour les curieux : ça part dans tout les sens l’œuvre de ce monsieur, avec une espèce de mystique de l’extrême. Le feu Trimalcion avait d'ailleurs commencé à agiter ses doigts pudiques par sa fin. Ya une esthétique à découvrir en farfouillant chronologiquement, bien en lien avec une radikalité qui manque un peu aujourd'hui.

Note donnée au disque :