Rosalina Mar › S/t

La vie a quand même de bons côtés. Faut essayer de voir les choses comme ça. Quand on vit dans un pays dont le ciel ne semble connaître du spectre complet des couleurs qu'un dégradé de gris déclinable à l'envie, on rencontre les pires des difficultés à esquisser le moindre sourire. Quand tout vous paraît morne et terne, que même votre passion ultime, la musique, semble vous échapper, contaminée par la sinistrose ambiante de produits jettables et autres dérivés que l'on élève en batterie et à la chaîne pour gaver un auditoire transi par tant d'absurdité, on est comme déboussolé, sans repères, sans envies. Non, il n'y a rien de foutrement original dans la musique de Rosolina Mar. Rien qui puisse faire crier au génie. C'est juste un disque honnête et sincère. Il y a, comme ça, des choses qui ne s'expliquent pas ; des disques qui atterissent dans votre lecteur, alors que des tas d'autres trépignent d'impatience sur vos étagères poussiéreuses, et qui vous donnent exactement ce que vous attendiez, comme vous l'attendiez, au moment précis où vous n'osiez même plus l'espérer ; de la fraîcheur, de l'énergie, de la spontanéité. Une forme de providence. Mais peut-être aussi et surtout une nouvelle raison de croire. Croire que tout n'est pas encore perdu, et qu'il existe encore et toujours des petits microcosmes un peu partout sur Terre qui ne veulent pas se laisser laminer par ce vent de médiocrité qui finirait bien par vous pousser à rejeter au loin et à jamais ce que vous aviez toujours si ardemment défendu et adoré, dégoûté, échoeuré par ce nivellement par le bas auquel personne ne semble assez fort afin d'y résister. Le rock instrumental de Rosolina Mar, avec ses deux guitares rock'n'roll gentiment en avant, n'a pour seule et unique prétention que de renouer avec ce qui trop souvent nous a échappé, à savoir l'essentiel : le plaisir de la musique pour la musique. Celui d'en écouter. D'en jouer. D'en faire. D'en être tout simplement.