The Cure › The Top

Bien que ‘The Top’ ne fasse pas forcément l’unanimité parmi les fans de Cure, j’avoue qu’il compte parmi mes préférés. Après l’étrange interlude ‘Japanese whispers’ qui en avait surpris plus d’un avec son mélange de tristesse et de pop new wave décalée, nous laissant incertain quant à leur futur, il s’en vient confirmer que les démons n’ont pas tous été exorcisés. Nous sommes bien sûr loin des climats lourds et étouffants de ‘Pornography’ mais l’apparente folie psychédélique qui domine ici me semble masquer un grand désenchantement. ‘Shake dog shake’ qui ouvre le disque marque un retour clair à une cold wave sombre aux guitares lourdes et grinçantes. Dans la même voie, ‘Give me it’ est étonnement rapide et violent pour un titre des Cure, la voix de Robert s’y débat, possédée et désespérée, dans un tourbillon de guitares hurlantes. ‘Bird mad girl’ en apparence plus léger avec ses cordes aux accents hispaniques, me semble en fait empreint d’une profonde mélancolie, de même que ‘Caterpillar’ où l’on sent que derrière les arrangements folk décalés, Robert rit jaune. Pas de double sens pour ‘Wailing wall’, morceau triste et lancinant aux ambiances arabisantes ponctué de grincements malsains, ni pour ‘Piggy in the mirror’ véritable conte d’une folie désespérée qui semble flamboyer pour ne pas sombrer. Autre chanson particulière de la discographie du groupe, ‘The empty world’ est une véritable marche guerrière sur fond de roulements de tambour et de ligne de flûte… une merveille. ‘Bananafishbones’ est probablement le titre le plus fou et le plus psychédélique de ‘The Top’ ; ses orgues et son harmonica décalé nous plongent au cœur d’une étrange ronde où le concept de santé mentale n’a plus vraiment sa place. ‘Dressing up’ est le morceau le plus serein malgré le timbre plaintif de la voix car ‘The Top’ qui clôt le disque sur des battements sombres et répétitifs sonne comme une transe malsaine qui n’est pas si éloignée de certaines chansons de ‘Pornography’. Dense, complexe, poignant, torturé, débridé, intimiste et extraverti à l’extrême, triste et fou à la fois mais d’une folie qui éclate à outrance pour ne pas sombrer totalement sont les qualificatifs que l’on pourrait accorder à ce brillant album servi par une interprétation magistrale et une production impeccable. Pour moi, ‘The Top’, à la suite de ‘Faith’, ‘Pornography’ achève la trilogie des meilleurs albums de Cure même si l'avenir réserve encore son lot de surprises.