Fates Warning › Perfect symmetry

Arrgghhh ! Que cet album est difficile ! Dès l’incroyable «Part of the machine», on voit qu’il va falloir s’accrocher, écouter, encore et encore, avant de commencer à pouvoir évoluer dans ses mélodies absconses , montagnes russes, impaires et manques, presque arythmiques, qui relèguent le déjà trouble «No exit» au rang de récréation auditive. L’arrivée de Mark Zonder, le batteur le plus fin du métal, à la précision inégalée permet toutes les tentatives, tous les risques, et si des pièces comme le très beau «Different eyes» évoquent clairement la tournure plus accessible du «Parallels» à venir, on est ici face à un album extrêmement opaque. La recherche d’une esthétique formelle globale toujours plus poussée est évidente. Le son s’affine encore, les arrangements se millimétrisent de plus en plus et la précision des musiciens est tout aussi remarquable que salvatrice. Pas de démonstration réelle pourtant, ni de virtuosité inutile ; car c’est dans sa facture primaire, son ossature même que cette musique est déstabilisante, surprenante, très exigeante. Mélodies venues d’ailleurs au charme longtemps douteux, et dont il faut se repaître tant de fois avant de commencer à comprendre le langage, et ce qu’elles véhiculent. Finis, et pour de bon, les fées, les châteaux, les sorciers. Mais plus que jamais, Fates Warning est triste, froid, sombre, sans joie aucune, sans plaisir. Rien ne se passe comme on s’y attend, rien n’est là pour nous guider, pas un riff accrocheur, pas d’épique déplacé, pas d’envolées trippantes ; rien qu’un labyrinthe complexe de métal dans lequel résonne la voix virtuose et poussée de Ray Adler. Une basse-batterie à l’unisson qui assure un véritable autre niveau de construction et d’écoute ; déstructurant la musique des guitares, structurant en sous-face les courbes de cerf-volant d’un chant aux lignes insaisissables. C’est aussi l’arrivée de Kevin Moore en renfort de l’équipe, on lui doit un break instrumental qui va définir bon nombre d’équivalent à venir, et pas uniquement chez FW. Après un tel album que ce «Perfect symmetry», il ne sera finalement pas étonnant de voir Fates Warning entamer le temps de deux albums( «Parallels» et «Inside out»), une démarche plus accessible, usant de mélodies plus classiques. Mais pas plus dans le passé que dans cet avenir le groupe n’offrira de sourire ou de positivisme. Fates Warning est sombre, Fates Warning est froid, et ce «Perfect symmetry» en est une quintessence, à la science formelle remarquable, et au déroulement déroutant et unique.