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Ludwig Van Beethoven (1770-1827) › Dernières sonates pour piano

20 titres - 148:10 min

  • CD 1 – N°27 en mi mineur Op. 90 – 1/ Mit lebhaftikgeit und durchaus mit empfindung und ausdruck – 2/ Micht zu geschwind und sehr singbar vorgetragen – N°28 en la majeur – 3/ Allegretto ma non troppo – 4/ Vivace alla marcia – 5/ Adagio ma non troppo, con affecto – 6/ Allegro – N°30 en mi majeur Op. 101 – 7/ Vivace, ma non troppo-adagio espressivo-tempo I – 8/ Prestissimo – 9/ Andante molto canabile ed espressivo – N°31 en la bémol majeur Op. 110 – 10/ Moderato cantabile molto espressivo – 11/ Allegro molto – 12/ Adagio ma non troppo – 13/ Fuga (allegro ma non troppo) – CD2 – N°29 en si bémol majeur Op. 106 – 1/ Allegro – 2/ Scherzo (assai vivace) - 3/ Adagio sostenuto – 4/ Largo-allegro risoluto – N°32 en ut mineur Op. 111 – 5/ Maestoso – 6/ Allegro con brio ed appassionato – 7/ Arietta (adagio molto semplice e cantabile)

informations

Les interprétations d'Alfred Brendel sont absolument magnifiques. Grand schubertien, il offre des visions de Beethoven d'une grande finesse. Elles allient le respect technique virtuose à la sensibilité nécessaire. Ce double CD, de la collection duo, donc au prix d'un seul, est selon moi, à privilégier. Les versions de Claudio Arrau (phillips); Kempf (DG), Pollini (DG), ou encore les versions surprenantes des opus 109 et 110 en complément du concerto n°4 par Hélène Grimaud (teldec) sont aussi à conseiller. J'en oublie par ailleurs un nombre inavouable : tous les plus grands noms du piano s'y sont essayé, évidemment.

line up

Alfred Brendel (piano)

chronique

  • piano seul-classique/romantique

À l’instar des derniers quatuors à cordes, les dernières sonates pour piano de Ludwig van Beethoven sont le lieu de la maîtrise classique absolue, de la virtuosité ; une maîtrise qui l’amènera au doute, à la douleur, et à la remise en question de ces formes canonisées. Il va les pousser, les faire craqueler sous l’impulsion incoercible de son pathos. Des thèmes puissants à très haute densité harmonique qui s’achèvent dans le silence… Beethoven rompt ses constructions académiques et classiques à coup d’infimes comptines, de ralentis, suspend soudain le temps et suggère alors l’ennui mélancolique, par cette lassitude des formes séduisantes éprouvées, poussées ici à l’expressivité extrême ; accès, formes et richesses parfaites, une virtuosité à couper le souffle, tout cela rendu finalement vain car au bout de leurs forces, et qui s’effacent d’un coup sous les besoins du calme, de l’angoisse existentielle avant l’heure, et de la nostalgie. Car Beethoven était profondément épris de perfection, et ainsi condamné au désespoir. Renoncement face à l’énergie, à la perfection feinte des formes académiques, et victoire de la tristesse, de la note qui surgit, du silence abyssal ; revenu aux sources de l’expressivité, Beethoven ne cherche plus seulement la joliesse ou l’élégance… mais aussi le soupir, l’âpre… l’ennuyeux. Alternant martelage de pianiste possédé et gouttelette mélodique à haute mélancolie, l’artiste exprime ce doute à travers le tourment qu’il lui impose. Par ces premières tentatives minimales et subtiles de quête de la note juste, de l’infime suffisant, Beethoven, déjà grand maître compositeur à l’heure de ces partitions, avoue, démontre son impuissance à trouver cette pureté ailleurs que dans ses propres larmes, au delà des formes acquises, à l’instar du Kafka désespéré par les limites de l’expression littéraire. Sauf que Beethoven, lui, s’acharne et cherche encore : la musique n’a pas dit son dernier mot. Immense virtuose, Beethoven multiplie les cascades, les fleuves, les rapides, il en ourdit des harmoniques subtils qui s’en dégagent et dureront ensuite, habiteront le silence qui s’ensuit, devenant élément pathétique essentiel des mélodies infimes aux notes indispensables, toutes de calme résigné et de mal de vivre. Ayant atteint le sommet du langage classique comme en témoignent de nombreux passages de ces pièces, Beethoven voulut plus, et poussant à bout les canons de l’époque pour en extraire les formes expressives à venir, il fût le premier à véritablement privilégier le fond sur la forme, les tourments à la bienséance, il fut le premier romantique. Il se montre tempétueux dans l’académisme rigoureux, triste ou contemplatif, mais toujours larme à l’œil, dans ses douceurs fréquentes. Ludwig nous raconte son ennui des formes imposées, et in-fine sa lassitude de n’être qu’un homme, et de ne pouvoir toucher à l’expression parfaite qui l’obsède, qu’au sacrifice de sa pudeur… il est le premier à avoir compris que la musique devait se détourner de ses aspirations formalistes et parfaites, si elle voulait grandir. Tout au long de ces sonates on croisera la douceur, la délicatesse absolue… des adagios d’une pureté mélancolique déchirante… lassitude de ce piano qui écoute ses propres silences, les travaillent : autant que par les notes, Beethoven nous dessine dans son art du silence la silhouette de sa solitude, son vide, entre deux furies inspirées, roulis graves ou séduisants. Il a compris que la musique devait désormais parler aussi des hommes, et non plus seulement s’adresser à Dieu, ou au simple plaisir des sens. Il se replace au centre du discours artistique. Dans sa quête forcément désespérée de perfection, Beethoven a trouvé l’homme, sa faiblesse et sa beauté, sa fragilité, mais aussi sa grandeur. Oui, il s’agit bien de musique sombre, malgré le classicisme, au travers des craquelures… la première musique à la première personne, seule face à son piano, la première musique qui dit Je… qui dit avec désespoir : « Je… ne serais jamais Dieu ». Un message que chacun d’entre nous peut entendre hurler, encore, au fond sa propre solitude.

note       Publiée le lundi 22 juillet 2002

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Tallis Envoyez un message privé àTallis

Oui, clairement ! Ça ne vient pas du pianiste (Alfred Brendel en l'occurrence pour la version que j'écoute). :o)

nicola Envoyez un message privé ànicola

Ha ha, tu trouves toi aussi ? J’écrivais la même chose hier.

Message édité le 30-03-2023 à 20:02 par nicola

Tallis Envoyez un message privé àTallis

Extraordinaire dernière sonate où, pendant quelques minutes du 2ème mouvement, Beethoven semble s'essayer au jazz...

mangetout Envoyez un message privé àmangetout

Pour une somme modique, le dernier numéro de DIAPASON offre en bonus le CD des superbes "Variations Diabelli" par Rudolf Serkin, la modernité de ces variations est impressionnante malgré leur presque 200 ans au compteur.

Mountain of Judgement Envoyez un message privé àMountain of Judgement

J'y connais que dalle en classique, mais la radio a passé tout à l'heure cette 14ème en question, dite sonate au clair de lune, et ça m'a plombé grave... Si toutes les sonates de Beethov' sont d'une telle "pureté mélancolique déchirante" comme dit cette bien belle chro, alors faut vendre ça en offre groupée avec antidépresseur. Bundles CD+Prozac.