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Cem Karaca › Kardaşlar & Apaşlar

cd • 12 titres • 48:35 min

  • 1Cem Karaca & Kardaşlar - Lümüne4:47
  • 2Cem Karaca & Kardaşlar - Demedimmi3:33
  • 3Cem Karaca & Kardaşlar - Kara Sevda4:20
  • 4Cem Karaca & Kardaşlar - Tatlı Dillim4:20 [reprise de Neşet Ertaş]
  • 5Cem Karaca & Apaşlar - Niksar3:29
  • 6Cem Karaca & Kardaşlar - Kalender3:52
  • 7Cem Karaca & Kardaşlar - Oy Gülüm Oy5:26
  • 8Cem Karaca & Kardaşlar - Dadaloğlu4:42 [adaptation de Dadaloğlu]
  • 9Cem Karaca & Apaşlar - Felek Beni3:34 [adaptation de Karacaoğlan]
  • 10Cem Karaca & Apaşlar - Zeyno3:20
  • 11Cem Karaca & Kardaşlar - Kara Yılan4:22
  • 12Cem Karaca & Apaşlar - Bu Son Olsun2:48

informations

line up

Cem Karaca (chant), Ünol Büyükgönenç (guitares coustiques et électriques, bağlama, choeurs 1-4, 6-8, 11), Seyhan Karabay (basse, iklig, choeurs), Hüseyin Sultanoğlu (batterie, percussion, Turkish folk drums 1-4, 6-8, 11), Alex Wiska (guitare électrique 1-4, 6-8, 11), Mehmet Soyarslan (guitare électrique 5, 9, 10, 12), Leon Habib (batterie 5, 9, 10, 12), Ferdy Klein Orchestra (cuivres et cordes 5, 9, 10, 12)

Musiciens additionnels : Kardaşlar, Apaşlar

chronique

N’est-elle pas superbe cette pochette très « Les damnés de la terre » ? Parfaite pour illustrer le premier format album de Cem Karaca. Les travailleurs agricoles, le labeur sous les feux du soleil couchant dans les plaines d’Anatolie. Chanter les histoires des humbles, leurs peines, leurs amours, leurs révoltes. Cem Karaca, il est communiste ! Il est, avec Selda Bağcan, la voix la plus contestataire de la scène musicale turque des années soixante-dix. Mais avant ça, Karaca, moustache d’homme, lunettes de soleil stylées, est un des piliers de ce qu’on appelle alors l’anadolu pop, un de ceux qui ont porté ce mouvement musical dans l’effervescence des sixties, quand les groupes de rock se constituaient, se bousculaient aux portes du concours Altın Microfon pour décrocher un contrat, une tournée. Karaca s’y présente avec Apaşlar, groupe à la Shadows qu’il rejoint en 1967 et qu’il propulse très vite, par sa présence et sa puissance d’interprétation, vers les sommets. Puis, au retour d’une tournée allemande, Karaca, fils de bonne famille et d’artistes, se politise, entrainant une scission inévitable et la formation des fameux Kardaşlar avec lesquels sa voix prendra encore une autre ampleur. Pourquoi une compilation, même pas autorisée par l’artiste ? Parce que c’est l’usage. Après un changement de label, voici que Türkofon ressort de ses tiroirs une poignée de singles fantastiques, dont les derniers enregistrés avec Apaşlar. Groupe de rock beat avec guitare au son surf acidifié et arsenal de cuivres et de cordes ramené dans les bagages après les tournées germaniques, propice à la grosse artillerie pop-pathétique du genre « Niksar », relevée par un solo de guitare qui picote, ou au rock solaire et percussif de « Felek Beni », baigné de l’esprit des sixties. Au pire, ça se vautre dans un schlager dégoulinant comme un loukoum d’aéroport sur « Bu Son Olsun », écoeurante avant la première minute mais pas dénué de charme de fin de soirée pétée à la bibine pas chère dans une taverne insulaire. En comparaison, Kardaşlar, c’est plutôt un groupe d’hommes. Avec une approche plus folk, plus annatolienne, plus politique et plus expérimentale. Seul musicien à suivre le charismatique camarade moustache dans sa nouvelle formation, le bassiste Seyan Karabay ressort même un instrument à cordes ancien, construit à base de calebasse et jouée à l’archet, l’iklig (cousin du kemenche persan) produisant un son mystérieux et lancinant, en nappes embrumées. Autour de lui, des percussions traditionnelles, souvent quasi-tribales, un bağlama envoutant et des irruptions de guitares électriques déchirées, qui, ancrées sur la section rythmique rock classique, fait le lien entre ce folk de troubadour turc, parfois pioché dans un répertoire vieux de plusieurs siècles, et la pop psychédélique venue de l’Ouest. L’enchainement de quelques premiers titres est extraordinaire : l’élégie crépusculaire de « Lümüne », la dramatique « Kara Sevda » (« Amour aveugle », tout est dit) et son solo d’iklig à la « Il était une fois en Anatolie » et surtout, surtout, cette version incroyable de « Tatlı Dillim ». Ecrite par le troubadour Neşet Ertaş, popularisée par Selda, que Cem a du entendre alors qu’il passait au club Beethoven à Ankara, la version de Kardaşlar, avec ses zébrures de guitares aveuglantes comme des éclairs transperçant la mélancolie du refrain et l’interprétation habitée de cette voix grave et chaude, puissante et précise, aussi douce que virile, est à foutre au panthéon. La voix, cette voix unique qui fait de Karaca le chanteur le plus fort de toute la scène de l’époque, une voix de stentor, comme entendue sur « Dadaloğlu », une histoire de rébellion, celle d’un troubadour-guerrier qui refuse les ordres insensés de son sultan, contée en folk opératique. Tous les morceaux de Kardaşlar planent à ce niveau, tissés de cordes pincées entre Est et Ouest, soufflant un vent de révolte, celle des sans-voix, les percussions fières de « Kara Yılan » comme coup de semonce pour Karaca, considéré comme un danger à l’ordre public par les autorités. Chevauchant avec ses Amis, ses Compagnons, ses Camarades, toute traduction de leur nom leur irait, il a laissé une trace indélébile dans les consciences et l’histoire louvoyante de la pop anatolienne. En deux mots : la classe.

note       Publiée le samedi 3 décembre 2016

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    (N°6) Envoyez un message privé à(N°6)
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    Merci ! Ah, "Winter Sleep", tu me prends par les sentiments là.

    Scissor Man Envoyez un message privé àScissor Man

    Et bien bravo pour cette chronique qui fait bien envie… Très documentée et précise ! C'est peut-être l'effet Winter Sleep qui stimule ma curiosité mais ouais ! Ça donne bien une idée même si les instruments mentionnés me sont inconnus.