Atriarch › Forever the end

Vous trouviez le Mordor lugubre ? C’est un vrai club de plaisance par rapport à ce que les Américains de Atriarch vous proposent tout au long des 36 minutes que dure ce mini (LP ?). Imaginez-vous dans une grotte face à un puits; regardez le gouffre, si profond qu’on ne distingue rien que l’obscurité, une obscurité dense et épaisse, aux remugles malsains; l’air se fait pesant et ce n’est pas le rythme qui s’installe, lent et funèbre (jamais pachydermique) qui rassure. Une voix s’élève dont on ne sait si elle exhale souffrance ou malédiction…Ou les deux à la fois. Encore qu’elle finisse par se muer en hurlement démoniaque, juste avant que le vrombissement tissé par la basse et les guitares se change en mélodie…Le timbre devient décadent même si toujours aussi lointain, limite deathrock (vous avez capté mon intérêt pour ce groupe ? Même si ce n’est pas vraiment sur ce mini qu’il faut y chercher les influences deathrock du combo). Abyssus Abyssum invocat…Le faux répit aura été de courte durée, l’espoir de sons clairs aussi; on plonge plus profond encore. Existe-t-il une couleur plus sombre que le noir ? Atriarch semble le penser et Lenny reprend une voix claire, incantatoire, comme pour expliquer le rituel qui se met en place, lent, hypnotique, funèbre. Compris ? Le désespoir se vomit d’un coup, à renforts de vocaux hurlés comme une invitation à la pourriture…Accélérer le tempo ? Pourquoi faire ? Si c’est lourd et lent, la souffrance n’en sera que plus lente…Ouf, une petite pause claire dans les guitares…A nouveau, cette impression gothique dont le quatuor se sert pour mieux tromper son monde et vous replonger la tête dans la vase. On en vient à s’attendre à une accélération pour conclure ce ‘Shadows’ terrifiant mais non, les roulements ne sont là que pour rendre la spirale infernale plus glauque encore, idem dans la tension de la guitare, comme si la pièce se concluait en un chaos terrifiant, toujours plus bas. La chute de Satan sur terre n’a pas dû être plus affreuse et cette voix déchirée au bord de l’agonie pourrait être la sienne. Inutile de vous préciser que les deux compostions qui enchaînent sont du même tonneau et il s’avère nécessaire de reprendre son souffle sur les intros atmosphériques avant que les vagues du désespoir et de la mélancolie ne vous submergent encore. C’est lourd mais pas chiant, glacial mais pas ennuyeux, ça n’accélère jamais et ça augmente en intensité dans l’adversité. Et quel remarquable travail vocal ! Certes, il est plus notable sur d’autres travaux du groupe mais tout de même, cette aisance de Lenny pour passer d’une voix gothique, légèrement décadente, à des râles de démon ! Une chose est certaine: la lumière ? Rappelez-vous-en comme d’un souvenir lointain…Et à jamais perdu. 4,5/6