Bad Brains › Black Dots

Ceci est la toute première session studio des Bad Brains, datant du début de l'été 1979, à une époque où ils cherchaient à éditer leur demo de ouf dingue, un an après leur formation. Cette session dépoussiérée en 1996 inclut donc bruits parasites, sons de criquets dus à l'été 1979, accordages et blabla avec des gens - le gamin du producteur Don Zientara traine dans le studio, HR annonce tous les morceaux... Sorti des décombres des années 70, ce disque vaut le coup d'être acheté pour écouter un groupe tout fraichement formé et qui monte patiemment sa bombe dans son coin tout en larguant quelques exocets dans les clubs de Washington DC, jusqu'à ce qu'un membre du groupe se fasse jeter d'un de ces lieux lors d'un de leurs propres concerts, restreignant les possibilités - l'autre club étant en travaux, il fallait voir plus loin, à New-York et notamment au CBGB, le reste c'est de l'histoire que je vous laisserai lire dans les bonnes chroniques et les bons livres de mémoires de ces années-là. Le son est ici tout cru, mais on s'en tape, le style le veut bien et vous avez ici tous les morceaux des débuts des Bad Brains à savoir leur live set de l'époque, avec sauvageries devenues standards, des plus lentes (le rock ramoné "Why'd you have to go", le reggae "The Man won't Annoy Ya") aux plus endiablées ("Black Dots", "Regulator", "How Low Can a Punk Get", "Attitude", etc.). Même si c'est enregistré en une prise (remixé en 1996) sur un quatre pistes, même si le batteur joue dans un placard et que tout le monde se serre dans la cave du producteur alias le "studio", c'est joué au poil carré, et vous entendrez alors pourquoi ce groupe a une aura si puissante encore aujourd'hui : y a plein de riffs hardcore et même thrash qu'on écoute ici en 1979, les mecs sont des musiciens de talent bien loin de la branlitude punk qu'on s'imagine, bien loin du nawak d'un Sid Vicious ou d'un amateurisme brut de pétrole comme les Ramones... non non, ici ce sont des musiciens de talent qui ont juste envie de jouer sur les rythmes les plus violents et les plus énergiques possibles (la basse sur "Banned in DC", faut la tenir, la batterie sur "Just Another Damn Song", pfiou... PS : et la guitare sur "Black Dots", hem... arf), tout cela joué avec une attitude "faut pas me baver sur les rouleaux" qui ne peut pas être remise en question, y a qu'à voir le regard des mecs sur les quelques photos de l'époque... Ceci pour dire aussi que ce disque n'est même pas à réserver aux fans, mais à tout amateur de musique rapide, bien foutue, hargneuse et mélodieuse, pour tout amateur de hardcore, et je dirais même plus pour tout amateur de metal, les gammes ici présentées faisant le lit de nombre de groupes furieux qui prospéreront sur les cendres de ce hardcore punk joué à fond les ballons.