Tim Berne › Big Satan

Grand habitué des défis hors normes, Tim Berne fait partie de ces forces vives de la scène jazz contemporaines qui permet de remettre à plus tard l'idée comme quoi le jazz est un mode d'expression mort et enterré, ayant succombé aux lourdeurs d'un académisme castrateur. Je vous invite donc à suivre le parcours de ce diable de Tim Berne pour vous rendre compte par vous-même de l'extraordinaire vivacité du bonhomme. En solitaire, ou en compagnie de ses formations parallèles (Bloodcount, Caos Totale ou Paraphrase), Berne s'est toujours montré à la pointe du jazz moderne, rivalisant seulement avec Ellery Eskelin, Ken Vandermark, David S.Ware ou John Zorn lui-même. Pourquoi "Big Satan" me direz vous ? Tout simplement parce que l'entente et la précision de ce trio (guitare/saxophone/batterie) est purement diabolique. Enregistrée au déjà incontournable Instants Chavirés de Montreuil, l'équipe qu'il forme avec le prodigieux Marc Ducret à la guitare, tour à tour radicalement abstraite ou efficacement subtile, donne libre cours à des improvisations explosives qui passent du tout au rien, d'un grand moment de détente à une explosivité aussi brutale que décisive. L'inventivité dont ces musiciens arrivent à faire preuve au cours d'un même concert est tout simplement phénoménale, et ce disque, dans la superbe et luxueuse collection Winter & Winter, est là pour l'attester. Pour que le jazz puisse encore avoir de beaux reste, il lui faut des artistes de cette trempe, de cette générosité et de cette audace. Peut-être faut-il même aussi pactiser avec la bête...