Portishead › Chase the Tear

Le retour du Portishead à la fin des années deux-mille les aura propulsés à un niveau encore supérieur à celui qu'ils occupaient comme tête de pont du mouvement trip-hop, comète dépressive du milieux des nineties. Personne n'était prêt pour la transformation de la formation bristolienne emblématique en étrange usine expérimentale dégorgeant des influences allant d'une l'électro glacée jusqu'au krautrock le plus motorik (quitte à donner dans la dénomination foireuse, autant y aller à fond). C'est dans cette veine là que le groupe enfonçait le clou un an plus tard en proposant un titre inédit, au bénéfice d'Amnesty International, titre qui aurait facilement pu sortir du lot du pourtant très impressionnant album "3". Ton donné d'entrée de jeu, une rythmique aveugle héritée de ce fameux rock allemand des années soixante-dix et des arpèges électroniques magnétiseurs qui ne cesseront pas une seconde sur la durée d'un morceau profondément hypnotique, quasiment frénétique, sur lequel vient se poser les vocaux fantomatiques de Beth Gibbons, décidément une des chanteuses les plus singulières et fascinantes de ces vingt dernières années. Un refrain aux accents dramatique sans que jamais ne cesse le martèlement électro-machinique, avec juste une pointe de mélodie qui décolle un instant de sa déprime pour mieux l'appuyer. Une tournerie infernale dans la plus pure lignée de ce qui avait constitué l'évolution du groupe, loin, bien loin du downtempo devenu depuis facilité illustrative (et dont on annonçait alors un revival imminent), ici les beats se font tachychardiques pour mieux secouer les consciences, toujours mauvaises. Un petit bijou noir de jais, pour la bonne cause. Portishead, immense en cinq minutes.