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Brainbombs › Obey

cd • 8 titres • 45:26 min

  • 1Kill Them All5:43
  • 2Die You Fuck5:32
  • 3Anal Desire4:56
  • 4Lipstick On My Dick4:34
  • 5Drive Around5:04
  • 6To Hurt5:02
  • 7Obey7:19
  • 8Fuckmeat6:16

informations

Non crédité.

line up

Jonas Tiljander (guitare), Peter Råberg (voix), Anders "Drajan" Bryngelsson (batterie), Lars Anders "Lanchy" Orre (guitare), Dan Råberg (trompette)

chronique

J'en croise sans arrêt, ces jours-ci : des kékés l’air fiérot mais pas méchant, le poil ras en général, avec des t-shirts sur quoi s’étale fièrement ce seul mot : OBEY. Ils jacassent avec leurs petites copines précieuses et vulgaires autant qu'eux – c’est unisexe, au vrai, ce type d’affliction. Il paraîtrait, il semblerait, sûrement que c’est encore un truc viral. Un machin de marque à concept, giclée de graphiste malin… Chaque fois je pense à ce disque et je me marre en coin. Parce que la chose – Obey, troisième album de cette bande de crevards nihilistes suédois nommés Brainbombs – est, dirons nous, un peu ailleurs. Loin de cette mâle assurance cosmétique du kakou, bien tranquille et posée. Loin du street-art pour adepte des beats-tuning et casquettes à l’envers achetées dans des boutiques qui puent l’immaculé.

Ou alors, peut-être… Que ce disque, que ce groupe, que cette musique, poussent le concept à fond : du "mec sûr de lui", player, chasseur de minettes. Sauf que dans leurs histoires, on en est tout de suite au moment où celui-là pète un câble, laisse sortir la bête. Les paroles de ces morceaux ne parlent que de sévices, dégueulasseries, humiliations, d'exploits ridicules – petites haines meurtrières imbéciles et cruelles. Obsédées par le sang, la sodomie forcée, la merde ; le viol, l’avilissement et la dégradation physique des putes bon marché ramassées sur le boulevard ; le pouvoir, la destruction gratuite des êtres, l’impunité. Crevards, nihilistes, oui. Mais brillants, les salopards, dans leurs sales besognes. Partout à propos d’eux – rarement dans Public ou sur Arte, TF1 ou Canal +, OK – on cause de Peter Sotos, du Marquis, de Whitehouse. Sans doute. Pour ma part je n’ai pas lu Sotos. Et la bande à Bennett me fait parfois simplement rire ou bailler – pas toujours, je ne dis pas, évidemment parfois ça touche (en raclant, bien sûr, au fond et sur les bords). Et Donatien Alphonse François m’ennuie très vite, souvent, pour ce que j’en lis. Brainbombs ont ce vice de plus : jouer rock’n’roll. Salement, bruyant jusqu’à l’obscénité. Mais rock. A l’essentiel, en rythme brutal et primaire mais avec ce groove incroyable. C’est de là que vient le malaise – là où d’autres jouent le contraste avec le raffinement de la forme ou son absence presque totale. Ici, chaque chanson répète à l’envi un riff ; parfois deux : un par guitare ; parfois l’une des deux dégueule de la tôle pliée ou en particules arrachées, flot éreintant – mais l’autre continue de scander sans sortir des rails. La batterie a cette puissance de bestiau, aussi, cette précision de tueur des halles dans le maniement de la masse. Celui-là même qui sait où taper pour estourbir d’un coup ; mais vise juste à côté pour faire durer le plaisir. Et puis il y a cette trompette malade des tripes qui file son cafard nauséabond de temps en temps pendant que l’autre – son frangin, d’ailleurs, au micro, pour qui le soufflant semble-t-il écrit la plupart des textes – suinte son timbre morne, délité comme en fond de défonce.

Bien sûr, Brainbombs ne font que répéter l’habituelle provocation, prennent les sujets de scandale faciles, foutent des tueurs psychopathes sur leurs pochettes – ici un certain Ed Gein dit le Boucher de Plainfield (la presse n’a jamais eu d’imagination et le lieu d’exactions va jusqu’à s’appeler champ-plat, donc…). Et bien sûr, ils font ce qu’il faut : pousser tout ça aussi loin que possible, trop loin, au delà de la blague, du drôle, même du coup de pub seulement malsain. Je trouve quelque chose de surréaliste, d’halluciné, de cauchemardesque véritablement dans la violence grotesquement sadique, ressassée, de ce que disent ces chansons, de ce qu’elles jouent. Leur sans fin et sans issu. J’ai toujours l’impression d’ailleurs que Die You Fuck est le récit d’un de ces rêves horribles dont on n’arrive pas à sortir, où on ne parvient à rien faire – le gars dont on réduit la gueule en purée et qui se relève sans arrêt (incidemment ça me rappelle également le Mandarin Merveilleux de Bartók ce côté "ennemi qu'on ne parvient pas à finir" mais je ne me suis pas penché sur l’éventuelle influence de cette œuvre sur la leur, tiens ; j’ai comme un doute). J’ai toujours cette sensation que les épisodes éveillés que sont censé raconter d’autres plages ne sont pas distincts de ça. Que leur sale tour le plus réussi est de brouiller exprès cette limite – à propos de l’équarrissage, de la capture, de l’achat, de l’acharnement sur les proies fantasmées ou bien qui auraient trouvé leur terrain, leur circuit.

Bien sûr que tout ça reste de la fiction – les types ne courraient sans aucun doute pas les rues sans ça, à se vanter de ces faits s’ils les avaient perpétrés. Mais dans ce que ça décrit, ça refuse de faire la différence. Ou d’expliquer. De culpabiliser. Ça dépeint… J’allais dire avec jubilation mais c’est pire : sur le ton de l’histoire ordinaire, parce qu’il faut bien meubler. La voix du gars au micro est une de leur grande force, d’ailleurs : blasée, limite asthmatique, la diction molle, épuisée – avec cet accent impossible, en plus ("Aï vante tou heurttt"...) ; le genre d’animal dont on se dit que même dans cet état de fatigue terminale, il trouvera le geste machinal pour vous percer la jugulaire ou bien la fémorale ; et puis le moyen et l’énergie – en pleine inertie mentale – de jeter dans le coffre de sa caisse ou par dessus le bar votre copine, votre sœur, votre mère ou votre gamin… Die, die, die you fuck. Mais non, il ne tombe pas. Si ça se trouve même il ne vous a pas achevé histoire que vous profitiez jusqu’au bout du spectacle. On ne va pas s’étendre plus… Obey – oui, oui : menace personnelle et mot d’ordre totalitaire – est un disque très vil et très réussi. Insortable et dérisoire dans son excès. Flippant et réjouissant – flippant parce que réjouissant. Évidemment ça n’est qu’un disque. Bien entendu on peut s’enfuir. Ou si on bosse pour M6, en faire un reportage pour démontrer que la jeunesse est en pleine perdition. Ou devenir féministe ou continuer d'être geek de porno glauque, ensuite. Ou même s'en foutre, en fait.

Le mec sur la pochette a également inspiré, dit-on, les personnages de Norman Bates (celui de Psychose d’Alfred Hitchcock en 1960), Leatherface (le tronçonneur principal du Texas Chain Saw Massacre de Tobbe Hopper, en 1974), quelques autres figures… C’est beau la culture populaire. Il est mort la veille d’un de mes anniversaires, tiens – d’insuffisance respiratoire. Vive l’anecdote chic et pitoresque… Ça m’étonnerait un peu qu’on arbore si souvent la fringue à son effigie, celui-là, dans les transports en commun.

note       Publiée le mercredi 15 octobre 2014

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Note moyenne        8 votes

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Dioneo Envoyez un message privé àDioneo  Dioneo est en ligne !
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Ah oui, les textes sont déjà degueu ! Mais les "cibles" sont plus variées, disons ! (After Acid est bien n'imp, dans le genre cauchemar chez les gens ordinaires...). Et oui, il est plus, euh, "grunge" (?) musicalement.

cyberghost Envoyez un message privé àcyberghost

Tu dis ça mais les textes de Burning Hell restent quand même assez ignobles ^^ Par contre clairement musicalement il a un truc qui s'est un peu perdu sur la suite !

Je prends bonne note pour Regler...

Dioneo Envoyez un message privé àDioneo  Dioneo est en ligne !
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Jamais écouté, tiens, j'irai tenter ça (Regler/Regel)... Je ne connaissais même pas l'existence du projet, à vrai dire ! (Et même pas sûr d'avoir écouté Totalitär, en fait, le groupe - hardcore il me semble - d'un des deux guitaristes).

Kranakov,j'imagine que tu as écouté Burning Hell, sinon ? Je le trouve un peu à part de la suite (pas encore dans le délire "grrr grrr enculer mutiler des putes" qui a fini par me fatiguer un peu, à force, ici ou sur d'autres).

Message édité le 26-03-2024 à 14:58 par dioneo

kranakov Envoyez un message privé àkranakov

Nouvelle tentative à la maison ce midi. Bon, de tous ceux que j'ai écoutés d'eux, c'est celui qui a la touche la plus "folle" par cet enlisement dans le rock le plus répétifif et flangué. Ca fait un truc. Surtout à fort volume.

Mais bon, je trouve que ce que tente le batteur à l'extérieur du groupe est tout de même beaucoup plus intéressant. REGEL, anyone ?

Note donnée au disque :       
Dioneo Envoyez un message privé àDioneo  Dioneo est en ligne !
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Pour ma part le côté "textes dégueulasses violents/miso/obsédés/psycho/too-much à n'en plus finir" à fini par me fatiguer un peu, chez Brainbombs, et j'écoute beaucoup moins le groupe, maintenant, j'ai moins la pente de trouver ça drôle qu'un temps, aussi, disons... Après ça reste du beau boucan pulsé, musicalement, bizarrement et absurdement funky.

Quant à Whitehouse... Bah perso j'ai toujours trouvé ça un peu grotesque, cette avalanche de haine en mode "toujours plus"... Pour l'intention humoristique je ne sais pas mais j'ai toujours trouvé ça impossible à prendre complètement au sérieux, e' tout cas, malgré eux ou pas ! Un peu comme un quelconque neuneu du net braillant torse-nu devant une caméra JE SUIS UN MÂLE ALPHAAAAA !! TU ME RESPEEEECTES !!!, quoi - je veux bien croire que Bennett et Cie avaient un peu plus que ça conscience de la connerie de leur truc mais... Je n'en n'ai jamais été complètement persuadé, pour être honnête. Disons que le power-electronics dans son ensemble m'a toujours donné l'impression que les mecs ne venaient pas là pour rigoler voire détestaient ça, rigoler - alors que c'est sans doute plus varié, les approches, dans cette scène là, je ne dis pas...

Message édité le 18-01-2024 à 17:44 par dioneo