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Grandaddy › Sumday

  • 2003 • V2 VVR102232 • 2 CD

cd • 12 titres • 52:26 min

  • 1Now It's On04:08
  • 2I'm on Standby03:12
  • 3The Go in the Go-for-It03:40
  • 4The Group Who Couldn't Say04:08
  • 5Lost on Yer Merry Way06:16
  • 6El Caminos in the West03:22
  • 7"Yeah" Is What We Had03:45
  • 8Saddest Vacant Lot in All the World03:51
  • 9Stray Dogs and the Chocolate Shake03:43
  • 10O.K. With My Decay06:11
  • 11The Warming Sun05:43
  • 12The Final Push to the Sum04:24

informations

Enregistré à la maison et produit par Jason Lytle.

Cette édition limitée propose un excellent second CD avec 9 pistes live enregistrées à Glastonbury en 2003 (The Crystal Lake, For the Dishwasher, Yeah Is What We Had, A.M. 180, Our Dying Brains, Laughing Stock) et en Black Session le 23/06/2003 (The Go in the Go-for-It, Saddest Vacant Lot in All the World, He's Simple, He's Dumb, He's the Pilot), prouvant que le groupe était également excellent une fois sur scène.

line up

Jason Lytle, Kevin Garcia, Aaron Burtch, Jim Fairchild, Tim Dryden

chronique

  • merveilles pop dépressives

"Sumday" se devait d'être la grande oeuvre de Jason Lytle. Terminé la galère, il était temps de décrocher la timbale. Alors Jason Lytle avait écrit ce qu'il voulait être sa meilleure collection de chansons, de pures chansons avec des mélodies partout, des arrangements chiadés avec ses synthés pourris et des auto-harmonies vocales de sa petite voix de tête fragile, des refrains qui s'insinueraient dans l'esprit à la première écoute. Et il a réussi. C'est sa meilleure collection de chanson. Pas une à jeter. Pas une qui soit moins bonne, moins belle qu'une autre. Et ça commence fort, avec une sorte de déclaration d'intention, "Now it's On", qui envoie la sauce comme rarement avant pour attraper l'auditeur par le collet. Jason Lytle va à la pêche au tube, au gros, et son écriture va vite prouver qu'il sait ferrer. It's on, but what's on ? On pourrait dire, "The shit's on.", car dès la suivante on retrouve le territoire connu d'un appareil ménager débranché, mis en stand-by et pas prêt d'être réparé. C'est sublime, encore mieux que tout ce qu'il a pu faire dans le style auparavant. Du Grandaddy, mais en mieux. Ecoutez-moi ce refrain, suivi de ce petit gimmick de clavier dont seul Lytle à le secret. Ouais, l'ex-skater a un truc. Même si il a tendance à reprendre toujours le même genre de construction. Tiens d'ailleurs la troisième chanson ressemble à la précédente, et elle est encore plus triste. Blues du col blanc, professionnellement suicidaire, en plein nervous break-down comme disait Raoul. Jason dresse le portrait d'un type qui s'est vidé de sa volonté. Avec toujours sa science du refrain, toujours une ritournelle de synthé d'occase imparable. Il en a combien dans ses poches des comme ça ? Et puis la quatrième débarque. Et un doute s'installe. Mais c'est pas encore la même mélodie qui redémarre ? La même ligne de chant ? Y a quelque chose qui ne tourne pas rond. Ou qui tourne en rond. A ce point, deux choix s'imposent : soit l'auditeur feignant lâche l'affaire devant une monotonie apparente, soit il s'accroche, et ce malgré les histoires toutes aussi déprimantes, dépressives et briseuses de moral que Jason Lytle déroule sans coup férir jusqu'à la fin de l'album. L'effet est garanti. C'est comme une sorte de variation sur un thème, le thème Grandaddy : rythmique simple et carrée qui gagne en intensité soit au refrain soit à la coda, mélodie irrésistible au clavier cheap qui revient comme un leitmotiv et petite voix aiguë parfois dissimulée sous un filtre de poussière, souvent doublée ou triplée en harmonies. Une monotonie apparente seulement, Lytle ne manquant pas de ressources pour renouveler sa formule magique de simples pincées de savoir-faire. Alors qu'on se croit sur une route maintenant tracée droite, il transforme sa chanson suivante en mini-épique et y fait succéder son arme secrète de single pop "El Caminos in the West", pas beaucoup moins tristos si on y prête bien attention, mais la mélodie et les arrangements sont tellement accrocheurs que ça passerait dans le cadre de l'album pour un vrai moment d'exaltation. Ca va pas durer, d'autant que si Lytle semble maintenant varier un peu plus la forme des morceaux (comme si il avait délibérément fait le tri chez son public en enchainant les plus similaires d'une seule traite au début), entre ballade aérienne et pop de chambre baroque au piano, il continue d'aligner des récits d'une tristesse sans nom : les regrets d'une relation amèrement dissolue; une nana qui chiale dans sa cuisine alors que son mec, raide bourré, pionce dans sa Datsun (notez la précision géographique de l'importation), garée dans un pauvre terrain vague. Avant de donner le coup de grâce, il sert néanmoins une petite sucrerie, une sorte de concentré de la quintessence de ce qui fait la magie de Grandaddy : "Stray Dogs and the Chocolate Shake", avec sa ritournelle stupide de clavier, reprise en charge au refrain en version débile-cramée, au point qu'on croirait entendre une de ces musiques du génial jeu Lemmings (les enfants des 90's comprendront), alors que Lytle donne des détails assez croquignolets sur la vie chiante d'une de ces villes américaines paumées, Modesto paraîtrait presque rigolote dans son absurde désoeuvrement. Trois minutes quarante de bonheur pur. C'est bon, vous avez repris des forces ? Maintenant le coup de grâce, un de ces morceaux qui m'habite depuis la première fois où je l'ai entendu et qui, en des circonstances idoines, m'a déjà collé des larmes aux yeux : "OK with My Decay" constat d'un renoncement, d'une troublante résignation sereine devant sa propre déchéance, un seul couplet puis ce refrain tragiquement apaisé ("I'm ok with my decay, I have no choice, I have no voice, I have no say on my decay, I have no choice, so I rejoice") et des voix qui parcourent l'éther, un final élégiaque qui aurait constitué une fin d'album géniale en soit. Du coup la tentation vient d'en terminer. L'écoute de l'album je veux dire. Grave erreur, la suite est à l'avenant, aussi magnifique mais s'enfonçant encore plus dans la dépression post-rupture, dans une lettre d'excuse à une fille qu'il a bien mal traité et dont il rêve encore qu'elle l'attend derrière sa porte, alors qu'elle a fui depuis longtemps dans les bras d'un autre. Une petite envie de se pendre peut-être devant cette déclaration, d'une sincérité et d'une lucidité déchirante. "Sumday" est bien la grande oeuvre de Jason Lytle, sa meilleure collection de chansons. Pas une à jeter. Des mélodies en veux-tu en voilà, des refrains imparables et des arrangements de toute beauté. Oui mais voilà, elle se mérite, elle demande d'insister, de craquer la surface d'une première impression souvent décevante, trompeuse, et de pouvoir supporter autant de désespoir poliment déguisé en merveilles pop.

note       Publiée le dimanche 21 septembre 2014

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    (N°6) Envoyez un message privé à(N°6)
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    L'album est toujours aussi beau aujourd'hui, mais faut lui reconnaître quand même un défaut, c'est que c'est un putain de downer. T'écoutes ça d'une traite et à la fin tu te jettes par la fenêtre ou tu avales un tube entier de somnifères. Le gimmick de clavier de "Stray Dogs" reste le meilleur gimmick pop-conne de l'univers et "OK With My Decay" est toujours aussi sublime et poignante.

    salida Envoyez un message privé àsalida

    "la grande oeuvre de Jason Lytle" ? Hum...les chansons sont effectivement peut-être les plus futées qu'il aie écrit, en rajoutant plus de variations (le refrain jusqu'au ciel d'O.K with my decay, The warming sun qui sonne comme du John Lennon sous Prozac) mais pr moi la grosse faiblesse de cet album est la prod. Après avoir inventé le lo-fi version claviers bontempi il se contente ici d'une prod très classique où tout est "bien" enregistré. Dommage.

    dariev stands Envoyez un message privé àdariev stands
    avatar

    Beaucoup moins tubesque que le précédent, oui. Mais si attachant. Ce disque c'est vraiment un genre de gris-gris, fidèle et confortable, solide comme un baton de pêlerin en épicéa sous le duvet d'hiver... Du Beach Boys d'hivernation (j'ai mis longtemps avant que l'influence me saute aux oreilles bizarrement), de la pop 200% US qui pour une fois ne doit strictement rien à l'europe (un peu à Neil Young, par contre, aussi). Jason Lytle est un sacré auteur,l'air de rien, ouais...

    Aladdin_Sane Envoyez un message privé àAladdin_Sane

    Je me rappelle qu'à l'époque, après le sublime "The sophtware slump", j'avais été un peu déçu par cet album un peu trop sage. Mais il faut avouer qu'il résiste plutôt bien au temps et que finalement, on peut effectivement affirmer aujourd'hui qu'il s'agit bien d'une "merveille pop".

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