Ce qui fascine Those Poor Bastards, dans l'americana, c'est la culture mystique et d'amérique profonde, la passion millénaire pour le tout religieux et le colonialisme sauvage obscur digne d'un Jamestown historique. Et sur ce Behold the Abyss comme sur les autres ça s'entend bien, tant ils aiment décharger leur alt-country de tout artifice inutile. Instrus éraillées, vocaux débraillés, imagerie religieuse et thématiques malheureuses, ils sont assez talentueux pour remettre la old-time music au goût du jour en l'inondant de litanies dark cabaret, qui viennent rappeler que la sorcière ne se tient jamais bien loin du pendu. Ça fait beaucoup penser à du Slim Cessna's Auto Club, surtout dans le chant et l'ambiance dégénérescente omniprésente. Mais ça manque, toujours, je trouve, un peu de longueur. Those Poor Bastards s'ils ont bien verrouillé leurs centres d'inspirations, n'en dépeignent souvent qu'une image un peu trop caricaturale. Les banjos anémiques se noient souvent dans un déluge d'orgues horrifiques qui font office de cache misère. Leurs gospels pour messes noires s'époumonent un peu vainement dans les chapelles longtemps reconquises par les herbes sauvages. Ça fonctionne malgré tout des fois plutôt bien, au milieu d'une préciosité macabre dont ils savent au moins se faire avec talent les prédicateurs. Mais souvent, ça donne plutôt envie de se replonger chez les glabres du Denver, voir un peu comment on peut autrement jongler entre la peste et le choléra avec une boîte de sangsues et quelques vieux rasoirs.