John Robb, encore un de ces mecs multifonctions qui a su faire de sa passion pour la musique son gagne-pain: écrivain (un remarquable ouvrage sur l'évolution de la scène de Manchester notamment), journaliste, musicien, fondateur de label, commentateur...S'il officie aujourd'hui au sein du combo punk Goldblade, il n'a pas attendu bien longtemps pour se faire mordre par le virus puisqu'il lançait en 1977 un groupe du nom de The Membranes dont le statut culte ne s'est pas démenti chez les amateurs underground. Ouais, ouais, John, la philosophie DIY du punk, ça lui a tout de suite plu et ça se sent dans les structures économes des premiers titres. Pas de grands musiciens, les mecs, ils aiment à laisser tourner les structures, des structures presque plus post-punk que punk au début, comme s'ils se gênaient de se laisser aller vraiment. Progressivement, on sent monter un souffle de folie, des influences garage lointaines se décèlent mais à aucun moment The Membranes ne foulent les parterres de plantes carnivores des Cramps, ils n'ont même pas cette lourdeur bluesy glauque des compatriotes Inca Babies mais glanent dans des prés voisins, font le grand écart entre l'urgence du punk, une forme de décadence batcave ('Im fish eye'), un groove gothabilly sauvage, sans renier l'atmosphère post punk ambiante de l'époque ni dédaigner de bons grincements bruyants. Pas forcément des spécialistes de la mélodie qui tue non plus mais niveau climat, il n'y a rien à redire, ces types-là savent mener leur cirque. On sent néanmoins l'assurance gagner les plumes et les amplis au fur et à mesure des années, les compositions se charpentent, un sax barré, un harmonica sous speed, font de fugaces apparitions, le corps des chansons se fait plus soigné. Comme je l'expliquais plus haut, hormis les fans éclairés, peu de gens se souviennent réellement des Membranes et pourtant les chroniqueurs sont unanimes à affirmer leur influence jusqu'aux USA, préfigurant le son des Sonic Youth, Big Black et autres ('Spike MIlligan's tape recorder'). Onze années de carrière résumées en vingt brûlots. Et si John porte encore et toujours des creepers, la chaîne à la ceinture, la Harrington col relevé sous le veston de costard et la banane iroquoise ébouriffée, ce n'est pas pour la hype, cet homme est un pur depuis le départ. 4,5/6