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Fred Neil › Bleecker & MacDougal

cd • 13 titres • 34:16 min

  • 1Bleecker & Macdougal2:14
  • 2Blues On The Ceiling2:22
  • 3Sweet Mama2:40
  • 4Little Bit Of Rain2:21
  • 5Country Boy2:26
  • 6Other Side Of This Life2:54
  • 7Mississippi Train2:16
  • 8Travelin’ Shoes2:15
  • 9The Water Is Wide4:16
  • 10Yonder Comes The Blues1:51
  • 11Candy Man2:28
  • 12Handful Of Gimme2:15
  • 13Gone Again3:15

informations

Enregistré par paul Rothchild aux Studios Mastertone, New York.

L’édition LP Elektra de 1970 (sous la seconde pochette ici présentée) porte en fait le titre Little Bit Of Rain. Les morceaux sont cependant les mêmes, présentées dans le même ordre, que sur les autres éditions du disque, toutes nommées Bleecker & Macdougal.

line up

Fred Neil (voix, guitare), Pete Childs (deuxième guitare et dobro), John Sebastian (harmonica), Felix Pappalardi (basse), Douglas Hatlelid (basse)

chronique

Le blues blanc… Le Blues et les Blancs. Le blues par les blancs. Allez ! Admettons que cette fois-ci ce soit la question. LeRoi Jones (dans son essai Blues People, paru deux ans avant que ne sorte ce disque), avait peut-être bien quelques raisons de le tenir pour aberration, impossible… Abomination, même ! Du point de vue historique – du sien, matérialiste-historique, précisément, marxiste guère orthodoxe, peu aligné – c’était en fait plus que défendable : incontestable. Un vol perpétré au fond de la Misère. Un viol d’âme, sa mise sur le trottoir par la classe même – déguisée en race – qui l’avait avant ça forcé à ramper, lui avait inculqué l’innommable souffrance, ne lui avait plus laissé que ça en guise d’amour de soi. Oui… Une sale comédie… Ça se défend, disais-je. Cela s’entend. Sauf que le monde est bien poreux et que dans ses cassures – dans les crevasses locales qu’elle taille aussi, l’histoire, à hauteur d’hommes – il s’en passe. Et qu’avec la vie se propagent par contagion formes et affects et confusions. Et puis voilà… Il y avait eu avant l’ère Pop – avant Elvis, aussi, avant le rock’n’roll, tiens – Folk, et Country. Musique du Peuple, littéralement, des gens (that ol’ folk, ça se traduit aussi par ce vieux type, rappelons). Et du Pays, autant que de la Campagne. Bref : il y avait eu depuis le début maldonne et trafic, frelaté, bas commerces ; oui mais aussi, là où se mêlaient pauvretés et sueurs et tous fluides : exceptions et tricheries aux barrières, aux interdits. Il y avait eu Jimmie Rodgers – et entre deux numéros de brave cheminot juste un peu tubard et trop souvent yodlant, on se rappellera que le gars pouvait balancer des tranches aussi salement grivoises que du Robert Johnson en grande verve d’obscénité. Ou crocher une version démarquée mais bien clouante du fameux St James Infirmary (autrement nommé That Gambler’s Blues, mais c’est surtout une question de fraude au copyright, ça, pour le coup). Et puis il y avait eu Hank Willliams, ensuite – le vieux, le premier du nom sur l’affiche – chez qui le swing n’était pas qu’une question de duplication, formule prise avec mépris et pour le tic, la sensation, chez les travailleurs noirs… Il n’y avait pas eu qu’eux. Et là voici Fred Neil. Folkeux efflanqué, silhouette Beat – et on se souviendra comment un autre de ces philosophes historiens formés sur le tas (c’est à dire en l’espèce et comme bien d'autres sous les verrous… il s’agissait cette fois d’Eldridge Cleaver – celui du Black Panther Party, oui – dans son saisissant Soul on Ice, écrit donc en incarcération) décrivaient ceux-là. Comme les premier passeurs, la première étape. Le début. Encore englués dans l’histoire – encore elle ; les culpabilités et leurs dénis ; les stupéfiants et leurs oublis. Avec en partage authentique : bitume, errances, nul asile qui soit sur. Fred Neil, donc, à tout ça répond Présent. Sûrement sans réfléchir, sans toutes ces théories, questions, interdits et certitudes. Barré de Floride pour New York la Glaciale et sa Gloire au Marquises de Néon. Nous le trouvons planté au croisement. Pauvre encore jusqu’à l’os. Comme son ami Tim Hardin, future pourvoyeur d’autres noms prestigieux. (Le coup de bol, pour lui, ce sera Everybody’s Talking, passé à la postérité par la version d’Harry Nilsson pour le générique du film Drugstore Cowboy – chez nous Macadam Cowboy, hum – en 1969), Fred écume pour l’heure les scènes plutôt miteuses. Assure soir après soir. Envoie solide et chaud, virile et sensible. Tout en acoustique : guitare, dobro, basse, harmonica. Pas de place pour une batterie. Écrit et puise, aussi, aux répertoires des légendes communes, prolétaires. Joue les symbolistes en Sauvage. S’amuse des doubles sens – le Candyman c’est l’homme en sucre, si l’on traduit, autant que cette espèce de croquemitaine… Et pour l’instant il voudrait du bien, plutôt, à la dame. Mais rappelez vous : "L’amour", c’est une faim qui ravage et tiraille, et puis un accident est si vite arrivé. Fred marche. Sur l’autre face de la vie. Où elle se tient nue, vulnérable, en qui-vive. Neil chante. Et on en parlera pas de voix d’Or et de Miel Chaud, blabla publicitaire insuffisant, ressassé à chaque crooner. On causera profondeur, plutôt, fêlures pour l’instant bien cachées. On rappellera que le feu, c’est une question parfois d’entrailles qui se tordent. Fred Neil est jeune encore. Il en sait déjà trop. Mais il est innocent et quand il donne dans la ballade, l’air soudain purifié des vapeurs hydrocarbures vient envelopper un instant, caresser nos bleus. L’illusion passe. Et le chanteur se mire avec dédain, dans la glace pas lavée ; dégoût aux lèvres d’avoir encore cédé pour un flirt au cœur creux, claqué la dernière piécette pour un tour en ferry, elle y tendant ses doigts avides – il aurait du y aller tout seul : c’est plus facile pour discrètement plonger, s’enfoncer dans les eaux, à la fin, indifférente miséricorde de l’ultime hypothermie… Alors est-ce du blues ? est-ce LE blues ? Qu’est-ce qui échappe aux vains folklores, ici ? Eh bien… On répondra que les historiens ont leurs raisons – et que la vie qui renâcle et qui veut, sans pouvoir les déjouer, leur fait parfois dans le dos de curieux enfants qu’on ne saurait trop nommer, si encore on s’en souciait. On n’aura sûrement pas l’heur de trouver celui-là simple pourvoyeur de trop faibles bluettes. On admettra que ce râle cousin de l’autre sache aussi bien s’ouvrir la peau – pâle oui, hâve, livide – du même geste tranquille, surréel, terre à terre et souverain.

note       Publiée le jeudi 9 janvier 2014

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    Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
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    C'est un truc qui arrive avec lui... Moi-même j'ai tendance à préférer la version de Blues on the Ceiling par Tim Hardin, par exemple. Et la reprise de Dolphins (l'originale est sur son album épo sorti l'année d'après celui-là) par Tim Buckley pourrait un poil éclipser sa propre version... Quoique celle-ci soit déjà très belle, remarque, la sienne. Le mec avait "pas de chance" avec ça, en fait, enfin, une chance "à revers" - d'être toujours repris par des interprètes fantastiques. Son plus grand succès, aussi - Everybdoy's Talking" - il le doit à l'interprétation d'Harry Nilsson pour le film Midnight Cowboy (Macadam Cowboy, chez nous). Version qui l'a sans doute rendu riche ou du moins mis à l'abri un moment mais... Dont beaucoup, avec ça, ignorent qu'elle est de lui.

    WZX Envoyez un message privé àWZX

    Vraiment bluffant la variété de son chant. Coup de coeur pour les éclaircies du refrain d'Other Side to this Life, et pour le Candy Man un peu grinçant/inquiétant.
    Par contre, y venir après être passé par la case Karen Dalton rend les deux chansons que reprendra la dame un peu fadasses, forcément...